Throttle
(2009)
“Voilà ce qu’ils étaient: le vomi de la route.”
C’est pour rendre hommage à Richard Matheson que Stephen King s’associa à son fils Joe Hill pour cette novella, à l’origine publiée dans une anthologie dédiée à l’écrivain (He is Legend). Comme l’expliqua Hill dans une introduction pour l’adaptation en comic-book, son père et lui partagèrent une passion pour le téléfilm Duel et son camion fou, s’imaginant être poursuivit par celui-ci durant leurs virées en voiture, et le King a déjà montré son amour pour les poids lourds meurtriers dans Maximum Overdrive. Les voilà à reprendre le concept qu’ils chérissent temps pour un remake qui raconte à peu près la même chose, sauf qu’ici la proie du chauffard n’est pas un conducteur isolé mais une bande de Hell’s Angels. Un gang de vétérans du Vietnam dont la Tribu constitue leur seule famille. S’étant ouvert au trafic de drogue sous l’insistance de Race, le fils du chef, le groupe se retrouve dans un beau merdier quand le labo dans lequel ils ont investi prend feu et que leur partenaire cherche à fuir avec l’argent. La confrontation tourne au massacre lorsqu’une ado camée prend peur et tir sur eux, l’un des motards la découpant à la machette en retour, lui aussi sous l’emprise de stupéfiants. Ils fuient les lieux du drame et cherchent quoi faire ensuite, le leader préférant enterrer l’affaire tandis que Race prévoit de traquer la sœur de leur défunt associé au cas où elle aurait le fric, mais un routier va soudainement les prendre en chasse. Si Vince, le boss de la Tribu, est horrifié par la mort brutale de ses amis, Race, petit con arrogant ne se souçiant que de lui même, trace sans même un regard en arrière et se retrouve bientôt avec le camion à ses trousses. Les survivants laissés derrière vont tenter un dernier baroud d’honneur pour sauver leur compagnon, même si Vince réalise en son fort que sa progéniture ne vaut peut-être pas la peine d’être sauvée…
Cette relation père-fils est évidemment le cœur du récit, prenant le pas sur la course-poursuite et parodiant celle des auteurs qui est tout son contraire. Ils en profitent pour détourner les clichés et présentent Vince comme une personne imparfaite mais humaine qui accepte mal les bains de sang et préfère se remémorer les bons moments de sa paternité du temps où son fils était jeune. Il regrette sa propre attitude qui éloigna Race de lui mais n’excuse pas pour autant son garçon, que l’on voit tuer sans état d’âme et qui fut viré de l’armée après une sombre affaire en Irak. A l’opposé est le conducteur du camion-citerne, qui comme dans Duel n’a pas de visage et semble omniprésent sur la route, comme une créature surnaturelle capable de rattraper les motos quoiqu’il arrive. S’il parait agir sans motif comme dans l’histoire originale, des indices permettent de comprendre qui il est vraiment et Vince va devoir se rendre à l’évidence que ses actions sont tout à fait légitimes. Le final amer marque beaucoup plus que les séquences d’horreur routière pourtant bien féroces: les motards sont éjectés de leurs montures à pleine vitesse et finissent broyés sous les roues du véhicule lourd ou écorchés vif sur le bitume. Certains tombent des falaises et d’autres fuient tout simplement – les plus coupables généralement, qui s’en sortent ainsi impunément. Throttle est une aventure plus humaine que mécanique (pouvait-il en être autrement considérant les responsables ?), et il n’en fallait pas plus pour honorer Matheson.
Throttle a également été aussi couplé avec la nouvelle Duel sous le titre de Road Rage en 2012, disponible en audiobook et en comics chez IDW, et dix ans après sa première publication Joe Hill l’intégra à son recueil Le Carrousel Infernal (Full Throttle en anglais), en compagnie de Dans les Hautes Herbes, autre histoire co-écrite avec son père.
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