Aquaslash (2019)

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Aquaslash

(2019)

 

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Aussi étrange que cela puisse paraître, le slasher n’a jamais exploité le milieu du parc aquatique ou de la pataugeoire malgré les possibilités que cela représente. Une occasion pourtant parfaite pour réunir du jeune, mettre les filles en bikini et inventer des meurtres créatifs en lien avec l’environnement. Seul l’allemand The Pool a vraiment tenté le coup, mais dans une piscine couverte et avec bien peu d’inventivité, à l’exception de cette machette traversant un toboggan et venant stopper brutalement la glissade d’une malheureuse en se fichant entre ses jambes. C’est peut-être justement cette scène qui inspira le québécois Renaud Gauthier, déjà auteur d’un slasher à thème avec Discopath, pour cet Aquaslash dont le titre est évidemment un jeu de mots avec Aquasplash, le ”P” en moins. Une référence à peine cachée à Motel Hell qui donne le ton. Car son film d’horreur, le réalisateur le veut différent, tout reposant sur la présence de lames cachées à l’intérieur d’un tunnel de glissoire qui feront tout le boulot à la place du psychopathe habituel.

 

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Un gimmick surprenant que certains n’acceptent pas, considérant le résultat comme ennuyeux puisque n’engageant le massacre que dans les vingt dernières minutes. Une structure de film catastrophe, presque, avec une longue présentation du cadre et des personnages un peu envahissante même si l’on peut compter sur une très courte durée afin de faire passer la pilule: 71 minutes qui en font seulement 66 en retirant le générique de fin. Le fait est que nous sommes là dans le territoire du high concept dont Larry Cohen s’était rendu maître, et dans le même genre on pourrait citer Nightmare Beach avec sa moto-chaise électrique. Et il y a un certain charme dans ce parti-pris différent et un rien forain avec son attraction, même s’il faut reconnaître qu’ici cela se résume à bien peu de choses faute de budget et par la nature ”produit pour services streaming” du projet. C’est dommage car le potentiel était là, totalement nonsensique, très 80s dans l’âme et même un rien giallesque dans son aspect whodunit et les motivations du coupable.

 

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Au Wet Valley Water Park, c’est une tradition depuis les années 80 d’organiser un weekend de fête pour les étudiants du coin après leur remise de diplôme. Comme tous les ans un grand nombre d’élèves se rend sur place pour boire, fumer, baiser et plonger dans l’eau, même si l’ambiance n’est pas rose pour tout le monde. Employée au parc depuis qu’elle a quitté l’école, Kim retrouve son ancien amour pour qui elle a toujours des sentiments malgré qu’elle soit désormais en couple avec un petit copain jaloux et violent. Priscilla, la femme du propriétaire du parc, découvre que son mari la trompe, et Josh, apprenti musicien, doit composer avec des camarades violents qui le déteste et un père riche qui n’a jamais été là pour lui mais lui propose de racheter l’endroit et lui offrir pour se faire pardonner. Et puis il y a cette rumeur persistante de meurtres qui auraient eu lieu des décennies plus tôt, lorsque l’établissement ouvrit ses portes pour la première fois…

 

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Un crime ou un simple accident, comme l’assure le vieil homme d’entretien qui était déjà là à l’époque ? Le film reste volontairement vague sur le sujet de manière à entretenir le suspense mais aussi la folie de l’assassin, dont l’identité n’est révélée qu’à la toute fin. Un maniaque qui se met à l’œuvre la nuit venu, pile après que les conflits entre chaque protagoniste aient éclatés au grand jour, brouillant ainsi les pistes. Il piège alors le Serpent de Mer, une gigantesque structure à triple toboggans qui mêlent tunnels et sections ouvertes, véritable fierté du parc. Celui qui choisira le mauvais chemin se retrouvera démembré par de grandes lames entrecroisées, et ça tombe bien puisqu’un concours de glisse est justement prévu le lendemain ! Le jeu de massacre qui s’ensuit n’en sera que plus jouissif puisqu’aucun personnage n’est attachant ou sympathique, à l’exception peut-être du meilleur pote de Josh qui ne sera de toute façon pas concerné, celui-ci étant bloqué dans une position d’observateur à tous les niveaux.

 

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Bien sûr pour en arriver là il faut attendre cinquante bonnes minutes et les impatients pourront dire que le jeu n’en vaut peut-être pas la chandelle puisque si gore il y a, ce n’est toujours pas si spectaculaire que ça, avec même quelques morts se déroulant hors champ avec un simple bruitage et un peu d’eau rougie en guise d’effets. Mais ce serait être mauvaise langue et si le manque de moyen ne permet pas de faire des miracles, Aquaslash réduit les corps en charpie sans aucune retenue ni images de synthèse, à grand renfort de latex. Un peu trop peut-être puisque les débris humains ont tendance à flotter à la surface comme des ballons en plastique, conférant cet aspect limite ”nanar volontaire” tant redouté et pas vraiment compatible avec la démarche ”hommage sérieux aux films de genre d’autrefois” que le réalisateur semble vouloir adopter. Les images restent heureusement parlantes avec ces cadavres mutilés qui s’entassent dans le tunnel, certains malheureux ne mourant pas directement car protégés par ceux qui les précèdent.

 

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Une situation rendue d’autant plus délirante que le comportement détestable des protagonistes est toujours pris en compte, certains n’hésitant pas à jeter dans le toboggan ceux qui viennent les avertir, prenant tout ça à la rigolade. Quant au coupable, il tire secrètement les ficelles et envoyant quelques proies à l’abattoir sous couvert de les guider, au point de griller sa couverture auprès du spectateur doté d’un minimum de cervelle. Dans quelques cas il fait aussi le boulot à l’ancienne, tuant à la machette ou au pistolet (en plein jour sans que personne n’entende les coups de feu !), comme ces surveillants qui s’envoient en l’air en haut de la structure au lieu de faire leur job. Tout ceci en vue subjective comme dans le premier Vendredi 13, énième référence venant caresser le fan dans le sens du poil. Il appartiendra à chacun de juger si Aquaslash remplie le cahier des charges ou pas malgré le déséquilibre évident entre les scènes d’expositions et de violence, d’autant que le film propose d’autres petites choses.

 

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Comme son atmosphère antipathique et crasse qui vient ici dépeindre un univers corrompu où l’innocence n’existe pratiquement pas. L’héroïne trompe son mec sans la moindre hésitation, Priscilla est fidèle à sa réputation de MILF débauchée, les teenagers s’enfilent des rails de coke dans leur chambre et le père de Josh dévore un homard au restaurant de façon plus bruyante, comme pour insulter sa partenaire. Le directeur du parc s’envoie en l’air avec l’adolescente ayant organisé l’événement, et une rave party nocturne à base de liquide fluorescent tourne bien vite à l’arrosage de seins nus. Ironiquement c’est Alice, censée être la bitch arrogante de service, qui est la plus gentille du lot ! Serez-vous surpris d’apprendre qu’elle est la première à mourir ? Une forme d’humour peut-être, à la manière de ces goths toujours maquillés et n’affichant aucune émotion alors qu’ils descendent de la glissoire à toute vitesse. Ou du trophée de compétition, avec son serpent en plastique enroulé autour et peint en doré.

 

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Il convient aussi reconnaître que le film est joliment filmé, avec une belles couleurs et une image un peu éthérée pour lui donner une patine vintage, tandis qu’une caméra sur drone met en valeur toute la complexité architecturale du Serpent de Mer et de ses nombreux tuyaux. Enfin les amoureux du Bis italien apprécieront sans doute certaines séquences étranges et perturbantes, comme l’enfance du tueur qui plonge dans une piscine et tombe sur un cadavre de son père, ou ce gamin au pied blessé qui découvre un Walkman enterré dans le sable puis observe le massacre final sans réaction, en écoutant de la musique. Sacré programme au final pour cet Aquaslash qui ne devait être qu’un one-trick pony, même si l’abus de références peut nuire à l’honnêteté de l’entreprise. Bilan plutôt positif donc, même s’il serait plaisant de voir un jour un slasher plus traditionnel se dérouler dans le même décor.

A lire également sur le sujet la chronique de l’ami Rigs Mordo, dans sa fameuse Toxic Crypt !

 

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