Horrible High Heels (1996)

horriblehighheels (2)

 

Horrible High Heels

(1996)

 

horriblehighheels (5)b

 

Il fut un temps où Horrible High Heels était placé aux côtés d’autres grands category III comme Dr. Lamb, Ebola Syndrome ou Red to Kill. C’était à l’époque où ces bandes étaient encore difficiles à dénicher et entourées d’une aura de mystère. Depuis les choses ont bien changées et la plupart de ces titres sont devenus facilement trouvables, permettant à chacun de juger par soi-même de leurs qualités. Et si certaines demeurent effectivement à la hauteur de leur réputation (The Untold Story régnant probablement champion, suivi de près par Run and Kill) d’autres se révèlent être de sacrée déception comme celle-ci, qui est loin d’être le Massacre à la Tronçonneuse chinois que certains décrivent. De son véritable titre 人皮高跟鞋 (Human Leather High Heels), ou parfois Bloody Shoe (notez le singulier trahissant un mauvais cas de chinglish), le film se plante avant tout à cause d’un scénario extrêmement confus.

 

horriblehighheels (4)

 

Une histoire à l’origine écrite par un seul homme, Chow Cheung, réalisateur de Devil Cat et d’un City on Fire à ne pas confondre avec celui de Ringo Lam, qui officie aussi en tant que metteur en scène. Mais pour on ne sait quelle raison il partagea ce poste avec deux autres cinéastes, Chen Wei-An (Roller Blade Killer) et Mao Chiang-Pang (Painting With Human Skin), dont la présence ne fut pas sans entrainer de gros bouleversements. L’intrigue devient incompréhensible puisque introduisant et abandonnant différents évènements et personnages que l’on peine à connecter, et l’idée de ce psycho killer utilisant la peau de ses victimes pour en faire du cuir de chaussure devient presque secondaire. A la place le script se perd dans un triangle amoureux tragique, une sous-intrigue à propos de trahisons entre membres des Triades et une conclusion explosive d’actioner, tandis que quelques séquences softcore viennent faire du remplissage.

 

horriblehighheels (14)

 

Un sacré mélange qui ne prend jamais et fini par rendre perplexe, encore plus d’un point de vue occidental où il faut déjà composer avec les habituelles ruptures de tons typiques des productions chinoises, moments dramatiques et pantalonnades puériles se côtoyant souvent en dépit du bon sens. Ainsi le film s’ouvre dans un abattoir où une vache est véritablement tuée, dépecée et coupée en morceaux, sa carcasse débitée à la tronçonneuse: aucun rapport avec le reste du film et le tueur n’a absolument aucun lien avec cet endroit. C’est dans une tannerie pour chaussures que les choses commencent vraiment, le propriétaire étant criblé de dettes pour cause d’addiction au mahjong. En panique, il s’apprête à voler l’argent de son propre business pour continuer à jouer et se dispute avec Xiuling (Sherry selon les sous-titres peu fidèles du VCD), l’employée en charge des finances. L’homme se cogne accidentellement la tête durant la confrontation et un mystérieux individu intervient…

 

horriblehighheels (7)

 

Psychopathe masqué et ricaneur, celui-ci kidnappe le patron inconscient afin de le démembrer et lui arracher la peau. Se sentant coupable de la disparition, la jeune femme évite de parler de l’incident et l’inquiétude grandit au fil des jours au point d’alarmer Tianzuo (Tien dans le VCD), le fils de la victime, qui va alors prévenir la police. Au même moment Dacuo (Wang), un autre employé, débarque avec un cuir de haute qualité permettant la création de nouveaux modèles de talons hauts qui vont faire sensation. Une aubaine pour ces artisans au bord du gouffre, mais pas tellement pour le spectateur qui va devoir attendre 40 minutes pour que le meurtrier refasse son apparition. Entre temps il va falloir se coltiner les états d’âmes de Xiuling, très amoureuse de Tianzuo, lequel l’ignore et lui préfère la bimbo Wenli (Wendy). Heureusement quand même que les deux femmes finissent par se battre à s’en déchirer les vêtements, allant jusqu’à se donner des coups de téléphone dans l’entrejambe !

 

horriblehighheels (8)

 

L’héroïne se transforme d’ailleurs en vilain petit canard lorsqu’elle demande à Dacuo, qui est amoureux d’elle, de se débarrasser de sa rivale, en échange de quoi elle se donnera à lui. Certes elle ignore que son collègue est le fameux maniaque sanguinaire, mais tout de même. Sa responsabilité dans ces évènements joue un rôle intéressant dans la seconde partie du film lorsque les autorités viennent enquêter sur les fameuses chaussures faites de peau humaine, puisque si elle demeure innocente des crimes, elle se montrera peu coopératrice de peur d’être de se retrouver impliquée. Mal lui en prend car cette attitude va la rendre coupable aux yeux de ses collègues lorsqu’ils découvrent le cadavre de leur ancien boss, l’un d’eux lui réclamant même une grosse somme d’argent pour son silence. Quant à Dacuo, il ne prendra pas la poudre d’escampette avant de réclamer son dû à la pauvre demoiselle.

 

horriblehighheels (10)

 

Category III oblige, cela se traduit par une violente bagarre entre les deux, Xiuling découvrant la vraie nature de son prétendant. Tout ceci se termine dans le sang lors d’une prise d’otage… pour continuer encore en reliant entres elles différentes sous-intrigues dont on aura franchement pu se passer. Horrible High Heels se traine sans pour autant expliquer clairement les tenants et aboutissants de son scénario décousu. On se retrouve pêle-mêle avec un mafieux en fauteuil roulant fétichiste des talons aiguilles, des hommes de mains s’entretuant pour mieux gérer ce trafic de chaussures de luxe, des flics jouant les action heroes explosifs aussitôt qu’ils tentent d’arrêter un suspect, et même une escapade dans le film de vigilante lorsque Tianzuo entreprend de tuer Dacuo et ses partenaires criminelles pour venger tout le monde. Bref, les réalisateurs tentent tout, absolument tout, pour captiver l’attention du public.

 

horriblehighheels (11)

 

Romantisme cul-cul, combats d’arts martiaux entre flics et truands, et bien sûr beaucoup de sexe et de violence à travers des scènes délirantes comme seuls les cat III pouvaient en faire. Quand Tianzuo ne besogne pas Wenli devant des posters de Dragon Ball Z, c’est Sherri qui se caresse dans son lit en pensant lui faire l’amour. Les actrices se déshabillent totalement et les choses déraillent lorsque le beau garçon laisse place au psychopathe pervers qui est autant obsédé par le sexe que le sang. Il force l’une à se caresser les seins avec la main fraichement coupée d’une victime avant d’arracher son propre bleu de travail, dévoilant un slip léopard du plus mauvais goût. Et quand l’autre tente de s’échapper en rampant à quatre pattes, le voilà en plein flashback du temps où il avait collé une photo d’elle sur le cul d’une oie, un trou à la place de la bouche, sodomisant le volatile avant de le décapiter durant l’orgasme !

 

horriblehighheels (6)

 

Pas d’inquiétude pour l’animal, le film ne semble pas (trop) sombrer dans la brutalité animale gratuite même lorsque Dacuo est censé décapiter un rongeur avec ses dents pour boire son sang. Les mutilations se déroulent hors champ ou dans l’ombre et les créatures n’ont pas l’air en souffrance, ce qui relève presque du miracle quand on connait la façon de faire des chinois. Tant mieux, cela permet de rire beaucoup plus facilement des actions de l’antagoniste, caricature totale du tueur de film d’horreur qui respire bruyamment et rigole du moindre méfait: “I will have my shoe store someday !” hurle t-il après démembré quelqu’un. Il coupe pieds, mains et têtes à l’aide de couteaux ou d’un taille-haie électrique, et si le gore est furtif, les jets de sang sont nombreux et la mise en scène en fait des caisses. Bien sûr le résultat est loin d’être aussi viscérale qu’un Ebola Syndrome ou Red to Kill, mais cela demeure relativement efficace.

 

horriblehighheels (9)

 

Si l’intrigue des chaussures en peau humaine avait été le vrai sujet du film, on aurait pu y retrouver un petit quelque chose de Human Lanterns dans ce mélange action / horreur où l’assassin exploite à son avantage les relations conflictuelles des personnages. Hélas non seulement tue t-il en fonction de son humeur, mais il n’est qu’un pion dans une plus grande affaire policière que les réalisateurs foirent complètement, n’en montrant jamais les éléments les plus importants. Ainsi l’identité du mafieux en fauteuil roulant n’est jamais dévoilée, son assassina par un sbire déchu est expédié à toute vitesse et on ignore comment le meurtrier parvient à se hisser à la tête du cartel après ça. Les liens entre Dacuo et les Triade est plus que mince et jamais, Ô grand jamais, n’est expliqué où, quand et comment est venu la décision d’utiliser de la peau humaine comme cuir de chaussure. Un ratage complet qui se ressent particulièrement lorsque le script tente d’imiter Daughter of Darkness.

 

horriblehighheels (12)

 

Arrêtée par la police en cours de film, Sherri doit justifier ses actions devant l’homme qu’elle aime, confessant ses sentiments malgré sa responsabilité dans la mort de Wenli. Et si les personnages finissent par se déclarer leurs amours trop tard, l’une finissant en prison tandis que l’autre se lance dans une croisade vengeresque dont il ne reviendra peut-être pas, nous sommes à des années lumières de la tragédie de Daughter of Darkness premier du nom. Ici l’héroïne devient antipathique à force de réactions impulsives et d’étranges décisions, au point qu’elle semble faire preuve de pulsions meurtrières plutôt que d’autodéfense lorsqu’un de ses collègues venu lui soutirer de l’argent tente de la violer en bonus. Il faut dire que toute cette scène vaut bien celle de l’oie déflorée dans l’escalade du délire. L’agresseur parvient à arracher la petite culotte de l’héroïne même poignardé, et le flic désamorce la prise d’otage qui s’ensuit en criant “Attention, derrière toi !” au ravisseur pour le décontenancer.

 

horriblehighheels (3)

 

Le blessé sera carrément abandonné sur place par les flics trop occupé à appréhender l’autre personne, le laissant mourir sans même contacter une ambulance. Quand à la jeune femme qui pense se suicider pour en finir, elle est interrompue par le capitaine qui à la présence d’esprit d’utiliser Tianzuo afin de la ramener à la raison: il tire à répétition sur le garçon pour lui faire peur ! Ajoutez à tout ça une bande son composée de morceaux bien connus provenant de Aux Frontières de l’Aube, Body Double et Phantasm, des apparitions éclaires de Billy Chow (le terrifiant japonais de Fist of Legend) et Fui-On Shing (A Better Tomorrow 1 et 2, The Killer), ainsi que la présence du vétéran Dick Wei (Eastern Condors, Le Marin des Mers de Chine), et vous obtenez finalement un pur film d’exploitation bien bête et méchant qui représente parfaitement ce Hong Kong subversif et copieur, mais totalement libre, d’autrefois.

 

horriblehighheels (13)

 

 

horriblehighheels (1)    horriblehighheels (15)    horriblehighheels (16)

Leave a reply

You may use these HTML tags and attributes: <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>