Howling IV: The Original Nightmare (1988)

 

Howling IV: The Original Nightmare

(1988)

 

 

Un an après le troisième épisode, la série quitte le territoire australien pour s’installer au Royaume-Unis d’où elle ne migrera plus par la suite. Au passage elle se sépare de quelques producteurs dans l’idée de se reprendre un peu en main: exit Philippe Mora et ses délires rocambolesques sur Hurlements II et III, c’est désormais Clive Turner qui va s’imposer sur les opus à venir, et pour l’accompagner sur ce nouvel épisode, rien de moins que Avi Lerner en personne, grand boss de Nu Image.

 

 

Avec la perte de crédibilité total de la franchise suite aux premières séquelles, deux incroyables nanars, il est évident que le but de ce nouveau film est de revenir aux sources du film de Joe Dante. Le sous-titre en est d’ailleurs la preuve: The Original Nightmare (le cauchemar original). Cette fois-ci pas question de “werewolf bitch” ou de marsupiaux, l’histoire va reprendre la trame du roman initial de Gary Brandner. Et par conséquent celle du premier Hurlements !

 

 

Joe Dante s’était relativement éloigné du livre pour n’en garder finalement que l’idée de base. Hurlements IV va lui plutôt opter pour une adaptation fidèle de la vision de l’écrivain. Un exercice plutôt dangereux car malgré des parti-pris radicalement opposés à Hurlements, quantités d’éléments demeurent similaires et risquent d’apparenter cette nouvelle séquelle à un mauvais remake d’un film désormais culte.

 

 

L’histoire est donc celle de Marie, écrivain, qui est victime d’étranges hallucinations dont l’origine semble provenir d’une dépression nerveuse. Contrainte de prendre du repos, elle part alors pour la petite ville de Drago (et non pas Drakho, comme l’indique la mauvaise orthographe du résumé du film) en compagnie de son petit ami Richard. L’endroit, perdu dans la forêt, n’abrite que très peu d’habitants et ceux-ci sont plutôt taciturnes. Alors que le couple s’installe dans un petit chalet, Marie va être troublée par un étrange hurlement animal retentissant dans la nuit. Sans cesse perturbée par ces cris qu’elle semble être la seule à entendre, elle agace de plus en plus Richard qui ne peut pas lui faire l’amour tranquillement.

 

 

Pour ne rien arranger, celui-ci tombe sous le charme d’Eleanor, l’étrange tenancière de la boutique d’art du coin, tandis que leur petit chien fini par disparaître. De plus en plus inquiète, Marie est de nouveau victime de ses visions et fini par apercevoir un loup rôder autour de sa maison. Délaissée par Richard, elle mène alors l’enquête avec l’aide inattendue d’une ex-nonne qui cherche a comprendre pourquoi une de ses anciennes collègues est devenue folle après un séjour à Drago…

 

 

Bien évidemment arrivé au quatrième film de la série, le spectateur l’aura compris: Drago est un repère de loups-garous. Une évidence qui n’est pourtant déclarée qu’en toute fin de film, le scénario reproduisant à la perfection l’intrigue du livre de Brandner. Voilà donc le plus gros défaut de Hurlements IV: tout le monde à déjà un train d’avance sur l’histoire et n’attend finalement qu’une chose… Qu’un loup-garou pointe enfin le bout de sa truffe pour nous offrir quelques séquences horrifiques ! Hélas il faut attendre bien longtemps pour cela, le métrage se trouvant doté d’un rythme de progression très lent, issu du livre, rendant l’enquête de Marie fastidieuse et parfaitement inintéressante.

 

 

Soporifique, Hurlements IV était voué à l’échec. Si l’intérêt du livre Hurlements résidait dans la surprise de la conclusion (tous les habitants sont des monstres), celle-ci est désormais éventée depuis le premier film. Et quand bien même certains ne connaîtraient pas ces œuvres postérieurs, ils n’ont aucun risque d’être surpris par la révélation finale tant tout est couru d’avance. Chiant comme la pluie, ce quatrième opus ne daigne même pas insuffler ce qu’il faut de mise en scène pour faire passer la pilule…

 

 

Si la présence de John Hough à la réalisation pouvait rassurer (il réalisa la même année l’excellent American Gothic et reste surtout connu pour La Maison des Damnés et son Incubus avec John Cassavetes), il faut se rendre à l’évidence: celui-ci ne cherche même pas à sauver les meubles et se contente de poser sa caméra dans un coin, ne manifestant visiblement aucun intérêt pour son film. Le spectateur endure 80 longues minutes où il ne se passe pratiquement jamais rien, hormis quelques séquences franchement accablantes comme une attaque de loup minable car totalement invisible, une sous-intrigue de rivalité masculine qui n’est pas un seul instant exploitée et inutile à l’histoire, et surtout la présence de visions inexplicables de la part de l’héroïne.

 

 

L’ouverture du film élimine toute menace sexuelle, présente dans les versions précédentes (le viol grossier du livre, pratiqué par un ancien détenu réhabilité sur une bourgeoise, et l’agression du tueur en série dans un sex-shop dans le film de Dante), et fait de son personnage principale une femme en proie à d’étranges hallucinations. Un élément scénaristique justifiant son déplacement à Drago et l’incrédulité de son compagnon face à ses dires, mais qui est géré n’importe comment: elles ne sont jamais expliquées et mélangent d’incompréhensibles apparitions fantomatiques à des visions du passés et du futur. Pourquoi la religieuse apparaît-elle à Marie avant même son arrivé à Drago ? D’où proviennent ses dons de clairvoyance ? Ne cherchez pas les réponses, il n’y en a pas.

 

 

Mais passé les longueurs et l’inertie générale du métrage, les dix dernières minutes surnagent un peu et laisse enfin place à l’action. Alors que Marie et sa camarade réalisent enfin que la ville est le refuge de loups-garous sataniques, ceux-ci se décident à les attaquer tout en ralliant Richard à leur cause. Mordu par sa maîtresse, il va nous offrir une incroyable scène de métamorphose pour le moins unique, et le final voit les deux héroïnes se réfugier dans un clocher avec des dizaines de loups à leurs trousses avant que tout explose ! Le film ennuyeux devient subitement un nanar incroyable en bonne concurrence avec les séquelles précédentes, à grand renfort de marionnettes poussives, de mauvaises prothèses en caoutchouc et de chiens déguisés !

 

 

Ne soyons pas de mauvaise foi: les effets spéciaux sont tout de même conçu par le vétéran Steve Johnson (Fog, Jack Burton dans les Griffes du Mandarin, le quatrième Freddy ou encore Flic ou Zombie) et il faut noter la spectaculaire liquéfaction de Richard, lequel fond littéralement sur place avant de jaillir de sa flaque sous forme de loup, comme un Phœnix renaît de ses cendres ! Si le trucage a désormais vieillit (les plans sont entrecoupés d’inserts sur l’actrice principale ou les loups-garous pour changer la progression du maquillage) il n’en demeure pas moins efficace et des plus réjouissants. Une séquence horrifique dans le plus pur esprit des années 80, au même titre que cette explosion titanesque du clocher, dix fois trop puissante mais qui en met plein les yeux.

 

 

Le reste, pourtant, n’est pas très bon. Certaines prothèses sont grossières et, tout en fonctionnant, confèrent aux scènes un aspect un peu trop factice pour être prises au sérieux. La scène de transformation du docteur, qui s’arrache lui-même sa mâchoire gigantesque, en est un exemple. Du old school plaisant mais qui n’a jamais le même impact que les effets spéciaux du Hurlements initial. Il faut aussi rappeler que Steve Johnson a participé à l’horrible second opus et on retrouve ainsi des “loups-garous” aux visages vaguement bestiales qu’on imagine plus tirés d’une Île du Docteur Moreau qu’autre chose. Des humanoïdes dont la moindre apparition est un moment de franche rigolade, auxquels il faut rajouter l’apparition d’une bonne dizaine de toutous (des bergers allemands et un husky) grimés en une meute de loups aux yeux rougeoyant.

 

 

Doté d’un budget bien bas, Hurlements IV possède tout de même un véritable loup-garou. Grande bestiole à la très large bouche, plutôt impressionnante malgré son aspect de grosse marionnette couverte de fourrure, la créature est pourtant à peine aperçue et ne sert finalement que deux scènes (la transformation de Richard puis l’aspect massif du docteur métamorphosé dans le final) très probablement parce qu’elle ne pouvait décemment être utilisé dans des scènes nécessitant d’importants mouvements… Pour rentabiliser, les producteurs la réemploieront dans le cinquième épisode avec une bien belle photo pour l’affiche, mais à peine un ou deux plans dans le film !

 

 

Le scénario hors-sujet, l’absence de mise en scène et les effets spéciaux souvent ringards ne sont cependant par les seuls responsables de l’échec total de ce quatrième film. De nombreuses petites choses ici et là viennent plomber l’ensemble (l’horrible chanson très daté de son époque ouvrant le film, les ridicules “Satan calls you” murmurés indéfiniment lors de la métamorphose de Richard…), le mauvais jeu des acteurs ainsi que l’aspect limité des décors et des figurants remportent la palme: la ville de Drago se résume à un chalet, deux magasins et une église pour une population de cinq ou six habitants (Eleanor, le shérif, le docteur, le couple d’épicier et un dépanneur), nous faisant nous demander d’où provient la dizaine de loups en dernière partie de film. Les personnages secondaires ont un temps de présence ridiculement court et les nombreuses allées et venues de Marie dans la forêt contribuent grandement à l’économie de décors.

 

 

Hurlements comptait sur la participation d’acteurs prestigieux, parmi lesquels Patrick Macnee (Chapeau Melon et Bottes de Cuir), Kevin McCarthy (La Quatrième Dimension), John Carradine (Les Raisins de la Colère, avec Henry Fonda) et Dick Miller (Gremlins). Un casting quatre étoiles que n’égale jamais ce quatrième film, bien au contraire. Pratiquement tous de grands inconnus, les interprètes d’Hurlements IV sont tout simplement nuls et incapables d’exprimer la moindre émotion. Mention spécial pour le shérif, impassible au possible et semblant vouloir s’enfuir au plus vite à chacune des scènes où il apparaît, et à la pauvre actrice interprétant la “sorcière” Eleanor (la Marsha du pauvre, qui était incarnée par la sculptural Elisabeth Brooks), laquelle passe son temps à prendre une voix langoureuse et n’est même pas correctement cadré lors de sa scène de sexe ! Celle-ci, reprenant la fameuse transformation des amants, ne dépasse jamais le stade “humain” et se révèle donc particulièrement gratuite en plus d’être mauvaise…

 

 

Parmi eux, un Michael T. Weiss alors tout débutant et encore très loin du Caméléon. Hirsute et peu mis en valeur par un script qui l’impose comme un vrai mufle, il ne possède pas la moindre once de talent qui pourrait laisser supposer une quelconque ascension dans les années à venir. Un comble pour ce qui est censé être le personnage masculin principal, mais sa compagne n’est guère mieux lotis. Romy Windsor, aperçue la même année auprès d’Oliver Reed et Donald Pleasence dans La Maison des Usher, est des plus crispantes et tape sur les nerfs en raison de son interprétation pour le moins hasardeuse. Tour à tour terriblement naïf ou à la limite de l’hystérie, son personnage ne réagit jamais véritablement et lasse rapidement. Il n’y a qu’a voir avec quel ton inapproprié l’actrice prononce le nom de Richard à la toute fin du film: celle qui devrait être horrifiée de voir son petit ami parmi les corps des loups-garous donne l’impression de vouloir réveiller son homme endormi !

 

 

Ratage complet sur toute la ligne pour ce Hurlements IV qui ne parvient pas a convaincre, ni par son histoire inappropriée, ni par ses mauvais acteurs et encore moins par sa réalisation transparente. Les quelques effets spéciaux arrivant sur le tard n’y peuvent rien et le spectateur ne peut que constater l’ampleur du désastre: en adaptant la même histoire que son glorieux aîné, ce nouvel opus commet l’erreur de se comparer à lui et, dépourvu de toute qualité, ne peut que s’enliser un peu plus loin dans la médiocrité. Cela n’empêchera pas les mêmes responsables de remettre le couvert un an plus tard avec un Hurlements V pas plus réussi…

 

 

 

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