Weekend at Bernie’s
(1989)
Petit film culte chez les nostalgiques des années 80, Weekend at Bernie’s n’est pas aussi drôle qu’on veut bien nous le faire croire. Cela s’explique peut-être du fait du concept même du projet, finalement pas très permissif, ou bien de son scénariste, Robert Klane, qui fut déjà coupable du très mauvais European Vacation avec Chavey Chase. Celui-ci s’est apparemment inspiré d’un film Bollywoodien inconnu dans nos contrées, Jaane Bhi Do Yaaro (1983), comédie lourdingue où deux idiots doivent combattre le système ultra corrompu de leur pays dans l’espoir d’ouvrir leur business et se retrouvent à devoir trimballer un cadavre un peu partout sans se faire remarquer. Une intrigue dont il ne reprend finalement que quelques éléments, conservant juste l’idée de la comédie un peu noire mais pas trop. A l’origine intitulé Hot and Cold, le film fut un temps considéré comme un projet possible pour les Two Coreys (Corey Haim et Corey Feldman) avant de prendre son envol sous la direction de Ted Kotcheff, le réalisateur de… Rambo !
C’est l’été et la ville de New York est sous le coup d’une grosse vague de chaleur, du genre à faire fondre le bitume. C’est dans ces conditions intenables que deux amis, Larry et Richard, agents administratifs dans une grande compagnie d’assurance-vie, mettent à jour une fraude importante qu’ils s’empressent de rapporter à leur patron, Bernie, dans l’espoir d’être récompensé. Ils semblent toucher le gros lot lorsque celui-ci les invite pour le week-end dans sa villa au bord de la plage, leur promettant un bel avenir, mais c’est un piège: c’est évidemment Bernie qui a détourné l’argent pour le compte de la mafia, et il projette de les faire assassiner. Mais parce qu’il se tape en douce la femme de son partenaire, c’est lui qui est ciblé, un assassin l’empoisonnant juste avant que ne débarque ses invités. Larry et Richard se retrouvent donc avec le cadavre de leur boss sur les bras sans trop savoir quoi faire, hésitant à avertir la police de peur de se retrouver coincé au poste et de cuire en cellule de détention.
Lorsque les locaux, habitués à débarquer sans prévenir pour faire la fête, se réunissent tous chez Bernie sans réaliser qu’il est mort, les compèrent décident de profiter autant que possible de leur week-end avant d’alerter les autorités, manipulant le cadavre comme un pantin pour tromper tout le monde. Et parce qu’ils se débrouillent très bien, les criminels vont finir par croire que le bonhomme à survécu à son meurtre, renvoyant le tueur à gage finir le boulot… Voilà qui promet tout un tas de quiproquos et de situations rocambolesques, et en un sens le film tient ses promesses. Le problème c’est que Weekend at Bernie’s s’enlise un peu dans la répétition et ne joue jamais vraiment la carte de la surenchère, coinçant le spectateur sur les mêmes séquences simples qui montrent les héros trimballer le macchabé à droite à gauche en esquivant les autres personnages. De temps en temps ils malmènent accidentellement le défunt en le faisant tomber ou en le cognant contre quelque chose, mais ça ne va pas plus loin.
Du splapstick à l’ancienne qui ne fera rire que les plus jeunes ou les plus simples, et surtout qui ne profite jamais vraiment de son sujet. Bernie pourrait aussi bien être dans le coma que cela ne changerait rien à l’affaire: pas de décomposition malgré la présence de quelques mouches, pas de relâchement du sphinctère, pas de rigidité cadavérique… Le gag se limite simplement son absence de réaction à la douleur ou aux humiliations qu’il subit. Il tombe d’une ballustrade, est emporté par la marée, se fait enterrer dans le sable par un gamin et Larry invente un système de corde pour le faire bouger. Rien de spécial en gros, et il faut attendre qu’on lui agraphe son toupet sur le crâne pour que avoir l’impression de toucher enfin au gimmick, ce qui n’arrive que dans les 25 dernières minutes du film. Subitement les choses s’accélèrent, les protagonistes réalisant que leur boss voulait leur mort, et ils commencent à trimballer le corps un peu partout plutôt que d’attendre que le temps en passe. Pour simplifier: ils cessent d’être passifs et deviennent proactifs.
Pensant être en sécurité tant que Bernie est “vivant”, ils cherchent maintenant à fuir les lieux en l’utilisant comme bouclier. Ils deviennent aussi un rien paranoïaque et identifient le moindre passant comme un assassin potentiel. On nous gratifie d’une poursuite en chariots de golf et d’une séquence de ski nautique involontaire où le cadavre est trainé à toute vitesse par un bateau après être tombé par-dessus bord, se cognant contre plusieurs flotteurs en métal, et une panne d’essence va forcer le duo à utiliser leur ancien patron comme bouée de sauvetage. Ce n’est pas grand chose en réalité, mais puisque le scénario passe le plus claire de son temps sur l’histoire d’amour entre Richard et la jolie Gwen, une collègue dont il est amoureux et qui débarque à l’improviste, il faudra s’en contenter. Et même là il faudra composer avec des longueurs, comme ladite scène du bâteau qui s’éternise puisque les héros ne savent pas le piloter, bousculant tout le monde et manquant de s’emplafonner avec d’autres navires. De la comédie, oui, mais sans rapport avec le thème abordé !
Pire, le duo fini par devenir antipathique à force de ne jamais vouloir agir ou de prendre les mauvaises décisions. D’abord attachant, Richard commence à taper sur les nefs tant il se perd dans des mensonges idiots et refuse de tenir tête à sa chérie ou son meilleur ami, alors que Larry cesse d’être le copain prêt à aider pour devenir une petite crapule qui vole et manipule sans état d’âme. Exactement le même problème qui venait ternir European Vacation et faire de Clark Griswold un sale con plutôt qu’un aimable imbécile. Heureusement quelques moments viennent rattraper tout ça, comme lorsque nos gars, terrassés par la température, deviennent trop flemmard pour subir un hold up et rembarrent le truand. Ou quand la maîtresse de Bernie décide de s’envoier en l’air avec lui sans remarquer qu’il est mort. Mais c’est surtout le casting qui vient sauver les meubles, à commencer par Terry Kiser dans le rôle titre. Certes le comédien bénéficia d’une doublure pour la moindre roulade au sol, mais il est parfait dans le double rôle de l’ordure friquée et du cadavre inexpressif.
Doté d’une filmographie longue comme le bras (de Tammy and the T-Rex à Vendredi 13, Chapitre 7 en passant par From a Whisper to a Scream), il offre à Weekend at Bernie’s un personnage icônique dont tout le monde se souvient encore des années plus tard. Plus que le film lui-même à vrai dire. Mémorable aussi Don Calfa, le médecin légiste du Retour des Morts-Vivants dont les yeux globuleux font toujours autant rire. Enfin la mignonne Catherine Mary Stewart (La Nuit de la Comète, Starfighter et tout un tas de série B) confère à l’habituelle love interest un peu plus de charme et de personnalité que d’habitude, faisant presque regretter que son rôle ne soit pas plus important. Quant à Andrew McCarthy et Jonathan Silverman, il y a suffisament d’alchimie entre eux pour que fonctionne l’angle buddy movie. Sans eux le film n’aurait certainement pas la réputation qu’il se traine actuellement et serait tombé dans l’oubli. Ce qui est justement arrivé ensuite à Weekend at Bernie’s II.
Écrit et réalisé par Robert Klane quatre ans plus tard, cette suite se contente de refaire exactement la même chose mais avec une partie de l’équipe en moins et un argument surnaturel en la présence de magie vaudou venant réanimer Bernie. Inutile de dire que le succès ne fut pas au rendez-vous et que personne ne porte la chose en estime. De son côté Bollywood boucla la boucle en 2007 avec son propre remake, Nehlle Pe Dehlla, qui lui aussi apporte quelques modifications à l’intrigue pour n’en conserver que l’idée générale et partir dans sa propre direction.
Tu vas rire mais je n’ai jamais vu le premier… alors que le deuxième est un des films cultes de mon enfance, je me passais la vhs en boucle… et ça m’arrive encore de me la repasser 🙂
Haha, tu niques ma conclusion du coup ! Mais honnêtement tu manques rien, c’est exactement la même chose mais en moins délirant. Au point qu’il s’y passe pas grand chose en fait !