The Cook
(2008)
“I am cook !”
J’ai raté le coche de ce 1er Avril pour vous parler de ce The Cook, un petit slasher insignifiant qui date de 2008 (à ne pas confondre avec The Cook de 2013, un gros Z mal branlé) et qui a été produit par une firme baptisée Red Gourmet Productions. Celle-ci n’a naturellement jamais rien sorti d’autre, et ce n’est pas étonnant: il n’y a qu’à voir le nom de la compagnie associée (The Cook Movie) pour comprendre que ces boites ne sont que des créations temporaires pour quelques raisons légales, et qu’elles n’abritent qu’une poignée de personnes qui portent généralement différentes casquettes durant la création de leur “bébé”.
En l’occurrence ici, il s’agit d’une bande de techniciens disposant d’une expérience minimaliste sur quelques films / court-métrage, lesquels se sont réunis pour un premier véritable travail au sein de l’industrie. Un long-métrage simple et rapide à faire qu’ils écrivent à six mains avant d’en confier la responsabilité à un autre débutant, un assistant réalisateur inconnu qui n’a œuvré que sur quelques séries télés et dont il s’agit là aussi du baptême du feu.
Autant dire que l’histoire derrière The Cook n’est pas différente des milliers de DTV modernes qui échouent sur les étalages, mais le détail amusant vient ici du fait que sa date de sortie officielle fut un 1er Avril. Cela si l’on en croit l’IMDB évidemment (et on sait à quel point celle-ci est fiable), car notre confrère américain de Horror Movie A Day, lui, a chroniqué le machin un 29 Mars. Mais l’idée reste amusante. Surtout après avoir vu le film.
Le fait est que The Cook est un film profondément inutile et oubliable. L’exemple même de ce qui cloche avec l’exploitation du cinéma d’Horreur, de nos jours. On sait le genre souvent ciblé par les apprenti-cinéastes de tout poil, puisque très simples à écrire, à mettre en boite et à vendre. Et compte-tenu du résultat ici, beaucoup pourraient penser qu’il s’agit d’une grosse blague tant les clichés s’enfilent comme des perles, tant l’originalité est inexistante et tant on cherche l’intérêt du film sitôt le générique de fin.
Le cas n’est pas nouveau et j’ai déjà parlé en longueur de multiples slashers au rabais se refusant à sortir des sentiers battus et qui, au final, apparaissent comme inutiles. C’est encore une fois la même chose et donc la liste des défauts se répète à n’en plus finir: le scénario est confondant de nullité, les péripéties sont terriblement convenu, la mise en scène est on ne peut plus basique, les dialogues sont pitoyables, et les comédiens sont globalement mauvais.
Après The Redwood Massacre, Charlie’s Farm, Reaper et Curse of the Forty Niner, en dire plus ne servirait pas à grand chose tant j’ai l’impression de me répéter. Certains pourront se demander l’intérêt d’écrire à propos de ce type de productions (et ils auraient raison !), et je répondrai simplement que cela fait des chroniques faciles à faire. Il n’y a pas beaucoup de choses à analyser, d’éléments à interpréter ou d’évènements à placer dans un contexte particulier.
Cependant dans le cas présent, le constat n’est pas totalement mauvais. Si le film est indubitablement médiocre et laisse indifférent, il y a tout de même quelques petites choses à relever qui rehausse un peu sa valeur, ou en tout cas son l’encéphalogramme du spectateur.
Tout d’abord il y a ce refus de se prendre au sérieux, et de verser dans une forme d’humour à cheval entre la comédie crasse américaine (nudité et vulgarité) et celle, noire et extravagante, anglaise. Un bon point car cela change des films qui se prennent beaucoup trop la tête par rapport à leur niveau et fait passer la pilule. Hélas cela semble malgré tout extrêmement forcé et seuls quelques gags fonctionnent ici et là, sans pour autant faire rire aux éclats: la lesbienne rock’n roll qui drague et dévergonde la catho de service, forcément prude et timide, le flic qui découvre un cadavre putréfié et déclare à ses collègues qu’il va aller dégueuler dans un coin, sur un ton parfaitement enjoué et hors-propos, et le point de départ du film lui-même qui décide de ne pas suivre le groupe d’étudiantes partant en vacance au Mexique mais plutôt celles qui restent sur place, et qui en toute logique devraient passer une semaine ennuyeuse et sans aucun problème.
Il y a également le fait que tout le scénario s’articule autour d’un jeu de mot pourri, le tueur du film se faisant passer pour un cuisinier d’origine hongroise. Dans la langue de Shakespeare cela donne “the Hungary cook”, donc en contractant, “the hungry cook” (le cuisinier affamé). Pathétique, mais il est plus que certain que l’intégralité du projet ait été mis en place à partir de ça !
Ainsi l’histoire raconte comment quelques étudiantes écervelées et globalement détestables se retrouvent à passer les vacances ensembles, dans le manoir de leur fraternité, plutôt que de participer à un voyage organisé. L’absence de personnel les obliges à passer une annonce afin de trouver un cuisinier et le jeune homme qui arrive se révèle être un étranger qui ne parle quasiment pas un mot d’anglais, si ce n’est un “I am cook !” très enjoué et un “Okay !” qui n’est pas sans évoquer Christian Clavier.
Le garçon semble gentil et serviable, préparant effectivement la nourriture et s’attirant même la sympathie d’une des adolescentes, la seule du lot à faire preuve d’un peu d’humanité durant tout le film. Seulement voilà, il s’agit en fait d’un tueur en série particulièrement violent qui prévoit de les massacrer une à une durant la semaine et de recycler les corps sous forme de plats qu’il va ensuite servir à ses proies…
Pour autant le tueur n’est pas cannibale puisqu’il ne va jamais goûter à ses mets, et cela cache un inutile twist final où l’on découvre qu’il n’est effectivement ni européen ni cuisinier et qu’il a en fait assassiné le véritable marmiton pour prendre sa place, allant jusqu’à dévorer un dictionnaire Anglais-Hongrois pour assurer sa couverture.
Quoiqu’il en soit, l’aspect culinaire / choc des culture est parfait pour livrer quelques meurtres exagérés, dans le même ton limite parodique que le reste du film, et permettre à The Cook de se ranger du côté d’un Dr. Rictus ou d’un Ice Cream Man.
C’est vraisemblablement ce qu’avaient les créateurs en tête, seulement voilà, cette approche a été sabordée par le réalisateur, lequel préfère virer dans l’horreur absolue lorsque son assassin frappe. Il apparait véritablement menaçant, avec le visage couvert de sang et hurlant de rage à la face de ses victimes, dans des séquences qui évoquent sensiblement les pertes de contrôles de Patrick Bateman dans American Psycho.
Mention spéciale pour cette pauvre victime qui se débat et griffe le tueur durant leur lutte, le Cuisinier pétant un plomb et transperçant la gorge de la malheureuse avec un tire-bouchon. La scène est brutale, vicieuse et sans la moindre trace d’humour, l’antagoniste apparaissant sous une nature résolument bestiale et bien loin du nigaud d’auparavant.
Inutile de dire que le déséquilibre engendré est perturbant. D’un côté les actes commis par le dément paraissent véritablement cruelles, comme si The Cook était censé avoir un côté sadique et tendu, et de l’autre on vous passe des bloopers durant le générique de fin, comme si nous étions dans une quelconque émission Canal + totalement bête et innocente ! Il y a clairement eu une désaccord entre la vision des producteurs / scénaristes et celle du metteur en scène, et le commentaire audio du DVD (zone 1 uniquement) semble en apporter la preuve vu l’absence de ce dernier et les dires des autres.
Difficile de porter un jugement sur la situation et de dire quel était le meilleur choix à faire, mais peut-être que le soucis était tout simplement le script lui-même, qui est juste mauvais.
Comme évoqué auparavant, le trio responsable a visiblement voulu jouer avec les codes du cinéma d’horreur, détourner le slasher pour offrir quelque chose de plus fun et moins stéréotypé, mais ils se sont embourbés dans des situations grotesques et surtout répétitives. La structure 1 jour / semaine, avec généralement une des filles qui y passe le soir durant, fini par tourner rapidement en boucle et donner l’impression de voir des variations autour de la même scène, encore et encore.
En plus de cela vient se greffer quelques imbécilités qui diminuent fortement le capital sympathie du film. Pour citer le moins grave, deux personnages se mettent à raconter une scène de Vendredi 13: Chapitre Final en se prétendant être fan de la saga. Sauf que les évènements qu’ils racontent ne proviennent pas du tout du film ! En soit rien de dramatique, mais lorsque l’on se met à trois pour écrire un film d’horreur, il serait bon de soigner les choses un minimum. Plus problématique, ce refus – tout à fait contemporain – de rendre les personnages supportables. Les jeunes femmes présentées ici sont de véritables salopes qui passent leur temps à se tirer dans les pattes et à se comporter de façon vulgaire. Pour tout dire, l’un des retitrages allemand du film est carrément Cannibal vs. Bitches !
Du coup, peu importe à quel point on tente de nous vendre leur sex-appeal, leur nudité, et tout un tas de situations sexuelles, il est tout simplement impossible d’éprouver le moindre sentiment à leur égard. Des caricatures d’êtres humains de la génération télé-poubelle, qu’il faut malheureusement supporter pendant la plus grande partie du film, le Cuisinier lui-même n’apparaissant qu’ici et là entre chaque meurtre.
De la même manière, on n’accorde pas beaucoup d’attention à l’étrange relation qui s’engage entre l’assassin et l’héroïne, laquelle ne débouche de toute façon sur rien. Alors que l’antagoniste parait tomber amoureux de la seule personne qui se montre agréable à son égard, allant même jusqu’à la droguer afin qu’elle s’endorme durant son carnage de la dernière nuit (présumablement pour l’épargner), l’intrigue fini par nous tromper et tuer la jeune femme sans que le Cuisinier n’y accorde la moindre importance. Ceci afin de créer un twist final imprévisible où le statut du personnage est échangé avec celui de sa meilleure amie, victime désignée qui se retrouve être une survivante contre toute attente.
Bref, même en désirant s’éloigner des stéréotypes, The Cook ne propose rien de neuf ou de sympathique et tombe dans les mêmes travers que tous les autres slashers au rabais. C’est dire à quel point il est incroyable que la vision du film ne soit pas si dérangeante que ça. L’œuvre essaye comme elle peut de nous divertir, s’y employant un peu n’importe comment, mais au final l’intention est tellement louable qu’elle fini par se ressentir malgré la débâcle générale.
Et son atout principal, c’est le Cuisinier lui-même, qui est effectivement très mémorable. Joué par un Mark Hengst inconnu (surtout un régulier de la Asylum, puisqu’on le retrouve dans 2012 Doomsday, The Terminators, Death Racers et Mega Shark vs. Giant Octopus), il est tout simplement adorable dans sa gestuelle exagérée et son faux sourire niais qu’il ressort à longueur de temps pour donner le change, tandis que les sous-titres prouvent qu’il raconte les pires horreurs aux américaines qui viennent lui parler.
Le fait est que le comédien possède une palette d’expressions assez variées, et qu’il peut aussi bien paraître touchant, amusant, hésitant et terriblement sauvage. Et alors que le réalisateur tente de l’établir comme un dangereux prédateur qui hurle et découpe ses proies avec hargne et énergie, le scénario s’amuse à le placer dans des situations plutôt coquasses. Coincé le cul entre les deux chaises, Hengst s’en tire miraculeusement bien et reste crédible autant en monstre psychopathe qu’en assassin maladroit.
Parmi les moments mémorables, citons son affolement lorsqu’il est surpris dans sa cuisine pleine de sang par une étudiante: paniqué à l’idée de se faire prendre la main dans le sac, il gesticule comme un cartoon, incapable de savoir comment cacher son merdier, jusqu’à ce que la jeune femme quitte la pièce sans même avoir vu quoique ce soit ! Autre moment d’anthologie: lorsqu’il pénètre dans la salle de bain pour assassiner une jeune femme, qu’il surprend en pleine séance de masturbation ! Choqué, gêné, incapable de savoir comment réagir devant le comportement très énergique de la demoiselle, il préfère sortir et attendre qu’elle termine avant de revenir la trucider.
En comparaison, les autres protagonistes sont desservis par une caractérisation minimale. Une bande de pétasses qui s’insultent et se crêpent le chignon à longueur de temps, se traitant de gouines d’un air désapprobateur alors qu’elles semblent toutes l’être. Au moins le film capitalise un maximum sur leurs corps et ne perd jamais une occasion pour en dévoiler autant que possible: lingerie, baisers lesbiens, séances de Bondage, body shots visiblement mal compris et scènes de sexe. Comme je l’ai dis plus haut, l’érotisme ne pointe jamais vraiment le bout de son nez en raison du comportement agaçant des personnages, mais ce n’est pas faute d’essayer. Chapeau à l’une des héroïnes qui passe 90% de son temps en soutif de sport, ce qui devrait d’ailleurs être une tenue obligatoire pour les jolies filles.
Enfin évoquons l’autre acteur masculin du film, improbable étudiant puceau qui perd forcément ses moyens devant tant de beautés. Celui-ci parle constamment à son pénis, trouve le moyen de lui donner un nom, mate à droite à gauche sans jamais faire preuve de subtilité, et pourtant parvient à se taper la fille de ses rêves au final ! Probablement la chose la plus irréaliste du film.
Bref il n’y a pas grand chose à manger dans ce The Cook, ce qui est tout de même un comble, mais on y trouve de quoi picorer ici et là, ce qui est déjà pas mal. Fadasse cependant, tellement en fait que je cherche toujours à comprendre comment ce machin a pu se frayer un chemin jusqu’à chez nous. Très franchement, si vous le croisez, passez votre chemin à moins de le trouver pour une poignée d’euros. Pour ce prix là, c’est comparable à du McDonald’s !
Sur le DVD français, un label de recommandation pour 2012.
Pas de bol, c’est périmé depuis déjà 4 ans !
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