Texas Chainsaw 3D (2013)

 

Texas Chainsaw 3D

(2013)

 

 

Faisons un point très rapide sur la série Massacre à la Tronçonneuse. L’original est un film culte et un chef-d’œuvre du film d’Horreur, inégalé et inégalable. Hormis les multitudes d’imitations qu’il a engendré au fil du temps, on retrouve plusieurs “suites” qui ne sont pas vraiment connectées entre elles. En fait à part Massacre à la Tronçonneuse 2 réalisé par Tobe Hooper, qui est effectivement une séquelle direct de l’original (malgré une rupture de ton tellement énorme qu’on ne le croirait pas), les autres films agissent plus comme des pseudo remakes. Leatherface et Texas Chainsaw: The Next Generation font chacun quelques références au premier film mais établissent leur propre univers, totalement indépendant.
En quelque sorte, chacun d’eux est un Massacre à la Tronçonneuse 2 alternatif. Ne comptons pas le remake de 2003 et sa préquelle, qui conçoivent leur propre histoire, et venons en à ce Texas Chainsaw 3D qui reprend la tradition et que nous pourrions presque retitrer Massacre à la Tronçonneuse 5 pour l’occasion.

 

 

Le film semble en avoir surpris plus d’un dans sa décision d’offrir une suite direct à Massacre à la Tronçonneuse. Il est vrai qu’environ quarante ans plus tard, il paraît étrange et même compliqué de raconter ce qu’il advient de la famille Sawyer après la fuite de Sally Hardesty sans avoir à utiliser quelques ficelles scénaristiques.
Pourtant l’introduction nous ramène juste après la conclusion du premier opus, les Autorités débarquant sur place quelques instants après que Sally se soit présentée au poste. Le shérif demande à Drayton Sawyer (The Cook) de venir se rendre avec son frère mais l’arrestation est interrompue par une bande de rednecks venus faire Justice eux-mêmes. Évidemment la situation dégénère vite et une fusillade éclate, laissant le clan Sawyer sur le carreau.
Seul un bébé survit au drame, le plus jeune membre de la famille qui est récupéré en cachette par l’un des Texans et sa femme. La suite se déroule naturellement une vingtaine d’année plus tard lorsque le nourrisson est devenu une plantureuse jeune femme, laquelle va alors découvrir l’horrible secret de ses origines…

 

 

Honnêtement ce point de départ en vaut un autre et semble déjà beaucoup plus clair que ceux de Leatherface et Next Generation. Certes il semble lorgner du côté de Devil’s Reject a qui il reprend à peu près tout, du siège de la maison à la résistance musclée du clan (et ça fait bizarre de voir des Sawyer brandir des fusils pour se défendre), avec les pertes qui en découlent, mais au moins Texas Chainsaw 3D à le mérite de ne pas juste répéter la formule maintes fois utilisée de l’original, ce qui avait justement plombé le dernier épisode en date.
Passé la déception de ne pas pouvoir retrouver les personnages originaux réunis pour une nouvelle aventure, il faut reconnaître que l’histoire tente quelque chose de nouveau en plaçant Leatherface dans une situation différente. Plus vieux, privé de sa famille, il vit reclus dans les sous-sols d’un manoir et rumine sa vengeance. Et pourtant, problème il y a. Celui-ci vient avant tout de l’exécution de ce prologue, qui finalement ne se rattache absolument pas au film que l’on connaît. Pourquoi ? Parce que subitement la famille Sawyer s’agrandit, et pas qu’un peu.

 

 

On se doutait bien qu’il faudrait probablement rajouter un nouveau membre de la famille pour que la présence de ce bébé soit justifiable, et après tout Massacre à la Tronçonneuse 2 et 3 avaient leur façon de faire. Le soucis c’est qu’ici, il n’y a pas d’ellipse temporelle entre les deux histoires pour arranger les choses. Du coup le clan de quatre cannibales compte maintenant une dizaine de personnes que l’on avait jamais vu avant !
Combien y a t-il de frères, de cousins, d’oncles et de tantes dans cette maison et où étaient-ils passés durant les évènements du premier Massacre à la Tronçonneuse ? Car les voir tous sur place quelques instants à peine après l’évasion de Sally sous-entend qu’ils ne devaient pas être bien loin à ce moment là… Sont-ils également des tueurs fous ? Des cannibales ? Comme si tout cela n’était pas assez confus, voilà que le film brouille encore plus les pistes en modifiant ici et là l’identité des personnages !

 

 

Ainsi The Cook est désormais interprété par le vétéran Bill Moseley, qui jouait déjà Chop-Top dans Massacre à la Tronçonneuse 2, le frère caché revenu du Vietnam. Le chef de famille, un dénommé Boss Sawyer, est quant à lui joué par Gunnar Hansen qui fut Leatherface dans le premier Massacre à la Tronçonneuse. On apprend également que le véritable nom de Leatherface serait Jedidiah, ce qui diffère avec Massacre à la Tronçonneuse 2 où il s’appelait Bubba. Hors, une liste de noms indique pourtant bien la présence d’un Bubba dans la famille ! Enfin l’héroïne du film, Heather, découvre que sa véritable mère est Loretta Sawyer, la fille de Drayton. Cela reviendrait à dire qu’elle est la nièce de Leatherface, pourtant le film semble affirmer qu’elle est sa cousine.
Si vous pensiez que Leatherface et Next Generation étaient bordéliques au possible avec la constitution de la famille (souvenez-vous ce mystérieux W.E. Sawyer), vous n’avez encore rien vu. La preuve, je viens moi-même de galérer quelques temps pour vous résumer la situation ! La présence d’autant de personnages apporte son lot de problèmes (qui sont-ils, d’où viennent-ils, qui est lié à qui ?) mais ceci n’est que la partie visible de l’iceberg.

 

 

L’un des gros points noirs du film, le plus évoqué par les critiques, provient de la chronologie du film. Alors certes, ça semble presque secondaire de se soucier de la gestion du temps dans un film portant le nom de Massacre à la Tronçonneuse, mais quand même, ils ont fait fort: Texas Chainsaw 3D se déroule après les évènement du film original, qui ont eu lieu en août 1973, et se concentre sur Heather, qui est maintenant une jeune femme d’une vingtaine d’année. Cependant le récit ne se déroule pas dans les années 90, comme le bon sens le voudrait mais… en septembre 2012 !
Alors de deux choses l’une. Ou bien Heather est âgée de 39 ans malgré son apparente jeunesse (l’actrice avait 26 ans durant le tournage) et traine avec des gens qui ne sont pas de sa génération, ou bien Massacre à la Tronçonneuse s’est déroulé quelque part à cheval entre les années 80 et 90. Quelque chose que l’on aurait peut-être pu gober si le film n’avait pas eu la bonne idée de placer des extraits de son prédécesseur pendant le générique d’ouverture !
Apparemment les créateurs étaient conscients de ce “détail”, allant jusqu’à pousser le vice en cachant volontairement les dates qui apparaissent à l’écran. Ainsi les documents de la police n’affichent que le jour et le mois de l’année, et les inscriptions sur des tombes sont camouflées par des hautes herbes… Manque de bol, dans les deux cas on peut quand même relever un 1973 et un 2012 apparents ! Voilà une inconsistance tellement énorme qu’elle suffirait à stabiliser le Plot Hole de To Boldly Flee à elle toute seule…

 

 

En vérité, les responsables s’en foutent totalement et auraient même espérés que le public ne remarque rien (véridique !). Outre le fait que c’est clairement prendre les spectateurs pour des cons, cela témoigne également d’un cas de laxisme absolument impardonnable pour une grosse production. Il n’était pourtant pas bien compliqué de surveiller le script afin de corriger les quelques scènes qui évoque les technologies modernes. Cela aurait créé l’illusion d’une temporalité logique et les spectateurs n’auraient pour la plupart même pas prêtés attention aux quelques anachronismes qui se seraient échappés !
Pourquoi tout simplement ne pas avoir joué la carte du film “d’époque” comme pour les versions de Platinum Dunes ? Ça n’a pourtant pas l’air bien compliqué. Ou bien peut-être espéraient-ils qu’on réajuste notre propre perception du Massacre à la Tronçonneuse pour l’accorder à leur film a ceux ? Enfin.. Tant pis pour eux car les critiques auront été nombreux à pointer du doigt cette décision aberrante, ce qui n’a pas dû jouer en faveur du film.
En tout cas, voilà un parfait candidat pour favoriser l’utilisation de l’Hypertime comme justificatif de continuité, car c’est la seule chose que j’ai trouvé pour donner un tant soit peut de logique à tout ça. Si vous n’êtes pas familier avec concept, renseignez-vous ! Vous allez voir, c’est un outil bien utile pour suivre les chronologies chaotiques comme celle-ci…

 

 

Enfin, dernier gros reproche envers ce Texas Chainsaw 3D, et pas des moindres, c’est sa volonté d’humaniser Leatherface et les Sawyers au point d’en faire… des gentils ! Incroyable mais vrai, les détraqués cannibales sont ici perçus comme les pauvres victimes d’un horrible lynchage mené contre l’avis de la police et resté impuni des années plus tard. Et peu importe si Leatherface met en pièces les amis d’Heather sous ses yeux, car celle-ci fini par s’allier avec lui pour venger une famille qu’elle n’a jamais connu. Immorale ? Peut-être, mais en l’état c’est surtout complètement stupide. Le pire c’est que cette idée n’arrive même pas comme un cheveux sur la soupe et semble être, au contraire, le cœur même du film !
Dès le prologue les Sawyer sont montrés comme une famille soudée, et alors que le shérif vient faire son travail, c’est uniquement Leatherface qui est désigné comme responsable du massacre. C’est vite oublier à quel point The Cook et The Hitch-Hiker étaient impliqués, mais bon. Ici Drayton montre du regret à devoir livrer son frère à la police et les quelques plans de leur demeure évitent soigneusement de nous montrer les différents corps et trophées d’anciennes victimes. Chaque photo de famille semble vouloir prouver a quel point les Sawyer formaient une “bonne” famille, une que Heather pourrait regretter de ne pas avoir connu et vouloir rejoindre malgré l’existence de Leatherface. Texas Chainsaw 3D va même jusqu’à pousser la caricature en représentant la famille adoptive de l’héroïne comme un couple white trash détestable.

 

 

Cela fait beaucoup de problèmes au sein d’un même film, trois gros défauts qui sautent aux yeux et prennent le pas sur tout le film. Je soupçonne fortement des réécritures orchestrées par les producteurs, car Texas Chainsaw 3D possède pas moins de… trois scénaristes. Parmi eux Adam Marcus, responsable du très polémique Jason va en Enfer où il s’amusait déjà à modifier les codes de la saga au point de s’attirer les foudres des fans. C’est peut-être à lui qu’il faut attribuer cette modification du comportement des Sawyer, où l’idée de placer Leatherface dans une situation nouvelle. Celle-ci n’étaient d’ailleurs pas mauvaise et en l’associant avec le personnage d’Heather, il y aurait peut-être eu matière à un film meilleur.
Si le film avait prit son temps pour montrer la jeune femme comme une personne un peu plus perturbée, borderline, peut-être que sa décision de rejoindre les Sawyer auraient été plus crédible. Elle aurait pu se sentir abandonnée, trahie par ses proches, sombrant au point de rejoindre Leatherface, son protecteur, et partir venger sa véritable famille. C’est honnêtement ce que le film semble vouloir faire, nous la présentant comme une artiste faisant des tableaux à bases d’ossements, comme si elle avait ça dans le sang (comme par hasard, elle travaille en boucherie). Une scène montre même son compagnon la tromper avec sa meilleure amie, ce qui aurait pu amorcer la trahison que j’évoquais plus haut avant que l’idée ne soit abandonnée en cours de route.
Malheureusement le scénario ne semble pas vouloir suivre cette voie et le résultat à l’écran paraît bien bancal. Faire passer le génocide des Sawyer pour une tragédie ne prend pas et il paraît peu crédible que Heather puisse pleurer sur leur sort ou que le shérif décide finalement de couvrir Leatherface, même par culpabilité. Certains personnages disparaissent carrément, comme ce jeune adjoint, faux héros mais vrai pourri qui kidnappe Heather sur ordre de son père.

 

 

Le bilan de ce Texas Chainsaw 3D n’est franchement pas fameux et les critiques assassinent sont parfaitement justifiées. Mais malgré ce naufrage, tout n’est pas à jeter et on peut encore y trouver quelques bonnes choses ici et là, comme les très bons effets gore signés Berger et Nicotero. Certaines idées sont à retenir (Leatherface qui coud son masque sur son propre visage !) et le film se permet quelques délires dignes de Massacre à la Tronçonneuse 2 lorsque notre cannibale fouille dans un placard bourré de tronçonneuses ou lorsqu’il se retrouve confronté au Pighead de Saw en pleine fête foraine !
Les plus nostalgiques pourront se montrer sensibles aux nombreux clins d’œil disséminés un peu partout (les robes et maquillages de Leatherface, l’auto-stoppeur, le crépitement de flash et jusqu’au célèbre plan au ras du sol sur les fesses de l’actrice, qui est répété plusieurs fois ici) et au retour inattendu de Marilyn Burns et de John Dugan, qui reprend le rôle du grand-père qu’il a tenu en 1973 ! A leur côté, la belle belle Alexandria Daddario retient l’attention dans le rôle de la Final Girl grâce à ses étranges yeux gris et son petit nombril qu’elle exhibe durant tout le film.

 

 

J’aurai préféré conclure sur ces quelques points positifs, hélas il m’est absolument impossible de ne pas évoquer cette ignoble scène façon found footage qui ne sert à rien et que l’on doit probablement à la demande des producteurs pour surfer sur la vague Paranormal Activity. Je le soupçonne fortement puisque le jump scare qui conclu la séquence n’est finalement même pas mis en scène par la caméra embarquée ! Si c’était cette idée qui a justifié que le film se déroule à notre époque, alors ça n’en valait vraiment pas la peine…

 

 

Aucun mots sur la 3D du film puisque j’ai préféré éviter de m’infliger ça. De toute manière, elle ne me semble pas tellement présente puisque je n’ai relevé que très peu de scènes jouant de l’effet.

6 comments to Texas Chainsaw 3D (2013)

  • Rigs Mordo Rigs Mordo  says:

    Assez énorme le coup du Pighead, ça doit être rapide, je l’ai pas remarqué dans le film… Sinon ben tu sais mon avis: je suis d’accord avec toi sur tous les points soulevés mais j’ai étrangement envie de défendre l’idée d’un Leatherface victime et « gentil », ou en tout cas d’une héroïne qui vire de bord.

    • Adrien Vaillant Adrien Vaillant  says:

      Oui oui, le Pighead est super bref et la capture a été faite avec succès après plusieurs essais (la caméra bouge pas mal et le plan est très bref), mais pour avoir croisé plusieurs de ces « faux » Leatherface dans les fête foraines, c’était un peu une revanche amusante !

      Sinon oui effectivement, et pour me répéter, ces éléments (Adam Marcus ? Un autre scénariste ?) devaient probablement être le focus à l’origine, avant de multiples réécriture. Le coup du portable qui film la scène, c’est clairement un rajout pour surfer sur le found footage et ça a dû entrainer des modification par exemple. Si ça se trouve, le film n’avait que peu de mort et se concentrait sur les relations de famille, avant que les producteurs n’exige du gore pour le public, etc.

      C’est un film victime, hélas quand t’as le problème temporelle qui te sort par la tête dès les premières secondes, et que le film tâche vraiment de faire passer les texans pour des bouchers alors que les cannibales étaient une « bonne » famille, j’ai l’impression qu’un idiot a regardé l’intro de Devil’s Reject sans comprendre le film et à décidé de faire ça en plus grossier…

      (et je dis ça, je suis une des rares personne à défendre Massacre 3 et Next Generation hein)

  • Oncle Jack Oncle Jack  says:

    Je n’ai jamais eu le courage de le regarder ce machin, de peur surement qu’il ne vienne piétiner sans honte le chef d’œuvre d’Hooper. A première vue ça m’en a tout l’air, donc ce sera sans moi. Et puis un boogeyman qui retourne sa veste n’est plus un boogeyman.

    • Adrien Vaillant Adrien Vaillant  says:

      Certaines séquelles allaient déjà fort dans le côté « on est plus du tout comme l’original », mais celui-ci va quand même loin puisqu’il se rattrape dans quasiment aucune catégorie. Je crois sincèrement qu’il est plus mauvais que Texas Chainsaw: Next Generation, pourtant un quasi remake de l’original de la façon la plus mauvaise possible.

      Au moins celui-ci avant un soupçon d’intérêt avec quelques acteurs qui y allait à fond et l’idée bizarre de clans Tronçonneuse « fabriqués » par les Illuminatis d’après les évènements de l’original pour une bizarre expérience à propos de la Terreur. C’est nul, mais ça tente pas de raccrocher les wagons de façon extrême comme celui-ci.

      Perso ils auraient dû concerver les Sawyers comme des déments ET rajouter la Justice texane de l’autre côté pour créer une sorte de monde impitoyable à la Devil’s Reject. Là, ça n’a juste aucun sens. Je ne peux décemment pas te le recommander !

  • Yann Lebret Yann Lebret  says:

    Le seul intérêt de ce film, c’est le jolie petit ventre de l’héroïne…

    • Adrien Vaillant Adrien Vaillant  says:

      Ouaip, c’est plus ou moins ce que je dis à la fin de l’article 😛

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