Monsters
Rain Dance
(1989)
Autant l’annoncer d’entrée de jeu: Rain Dance n’est pas un grand épisode. Je doute même qu’il soit un bon épisode, la faute à une mise en scène encore plus plate que d’habitude et aux acteurs qui en font des tonnes. Entre leur jeu excessif et le refus du réalisateur de filmer sa créature avec subtilité, dévoilant en gros plan ce qui n’est qu’un nain en costume, l’atmosphère et le suspense s’en retrouvent anéanti. Ce qui est plutôt problématique lorsque le scénario se repose justement là-dessus pour fonctionner ! A l’origine je désirais surtout parler du monstre, au concept intéressant, pour la rubrique Imaginarium de ce site. Une manière de mentionner les qualités de l’intrigue sans évoquer ses défauts. Mais malgré tout elle me reste en tête bien plus qu’elle ne le devrait, se faufilant même dans ma liste de mes histoires préférées de Monsters. Du coup tant pis, plongeons au cœur de ce conte qui aurait fait une bien meilleure nouvelle qu’un court-métrage.
On doit le scénario à Michael Kimball, qui a également pondu celui du tout aussi “bon mais sans plus” A Bond of Silk, où un couple se retrouve dans un hôtel abandonné qui sert en fait de garde-manger à une araignée géante. Celui-ci s’intéresse au triste sort des indiens d’Amérique, dont les richesses sont constamment pillées par l’Homme Blanc…
Dans une zone désertique et ravagée par une chaleur infernal, la population des tribus restantes n’hésite plus à brader sa culture pour survivre, et c’est là que des escrocs comme Tom profitent de la situation. Il rachète au bas prix tout ce qu’il peut trouver afin de le revendre une fortune aux collectionneurs. Son seul problème lui vient de sa femme Vanessa, qui déteste l’endroit et n’apprécie guère de se faire offrir des bijoux antiques poussiéreux. Non pas que le vol des Indiens la dérange, elle préfèrerait juste qu’il soit un criminel en col blanc pour se vautrer dans le confort et le luxe. Heureusement pour lui, l’arnaqueur vient de faire une découverte considérable en retrouvant la cité perdue des Kachinas, un peuple qui s’est mystérieusement volatilisé il y a plusieurs années. Ce qu’il en a exhumé va lui valoir une fortune et ils peuvent désormais plier bagages pour retourner vers la grande civilisation !
C’est à ce moment là que débarque une vieille femme qui prétend appartenir à ce peuple. Elle vient leur vendre une statue sacrée de Masao, le dieu de la Mort, dont la valeur est inestimable. Comme à son habitude Tom la reprend pour une bouchée de pain (“I don’t know, there’s not much of a market for gods of death these days…”) mais ne réalise pas que la vente a été peut-être un peu trop rapide…
Avant de partir l’étrangère va leur raconter la désastreuse histoire sa région et de l’époque où celle-ci était verdoyante et prospère, avant l’arrivée de la cupidité et de la notions de territorialité. Elle comment il n’a pas plu depuis maintenant vingt-trois ans, la sécheresse dévastant tout et entrainant la misère. Et comment son peuple a dansé pour ramener la pluie, vénérant Masao qui réclame cependant un prix: pour que la Vie revienne sur ces terres, il doit y avoir une mort. Ainsi s’explique la disparition des Kachinas, qui se sont tous sacrifiés un par un au fil des ans !
Une terrifiante histoire qui ne touche évidemment pas le couple qui pense avoir touché le gros lot. Cependant, durant la nuit, ils vont entendre des bruits dans leur maison comme si un intrus s’était introduit chez eux. Plus étrange, certains objets récemment acquis par Tom apparaissent brisés, tombant en miettes. “Wherever Masao walks, nothing remains but stone and dust”, disait la vieille sorcière. Peut-être auraient-ils dû l’écouter car le Dieu de la Mort est bien là avec eux, capable de transformer en sable tout ce qu’il touche. Vous l’aurez compris, on ne leur a pas apportée afin qu’ils en profite mais pour un sacrifice. Une exécution symbolique, car avec eux disparait également tout leur trésor, réduit en cendres grâce aux pouvoirs de l’idole vivante. Seul compte la pluie et la Vie.
Voilà une idée très sympa qui aurait mérité un bien meilleur budget. Le script fut clairement écrit en tenant compte des limitations du show, avec une seule unité de lieu et pas plus de trois ou quatre personnages pour un récit ne devant pas dépasser les vingt minutes – et en soit c’est réussi – mais le résultat est clairement affecté par le manque de temps et de moyens. A moins que le réalisateur, Richard Friedman, ne se soit pas senti inspiré, mais cela parait étrange de la part de quelqu’un habitué aux toutes petites productions. Responsable d’une poignée de série B très sympathiques comme Scared Stiff, Doom Asylum ou Phantom of the Mall, il est généralement plutôt inventif lorsqu’il s’agit de créer des visuels intéressants malgré les contraintes.
Ici pourtant il dévoile Masao en gros plan sans jamais se retenir, le montrant se lever de son socle et se promener, voir même de lutter avec Tom dans les toutes dernières minutes. Une grave erreur car on a surtout l’impression de voir Verne Troyer ou Warwick Davis faire le pitre dans un déguisement plutôt qu’un ancien dieu en colère. D’autant plus dommage que les effets spéciaux sont réussi et que le design même de la créature est très impressionnant, évoquant le genre de choses que l’on croise dans les pages des comics Conan le Barbare ! Si seulement Rain Dance avait cherché l’inspiration du côté du segment de la poupée dans Trilogy of Terror…
Pour autant tout n’est pas a jeter, et avant que la bête ne bondisse sur ses petites jambes pour agripper les acteurs, il y a plusieurs séquences qui donnent un bon aperçu de ce a quoi aurait pu ressembler cette histoire avec un meilleur cinéaste. Le fait que l’héroïne se dessèche petit à petit alors qu’elle est très glamour est une bonne manière de montrer le danger, sa peau pelant de plus en plus tandis qu’autour d’elle les objets constitué d’os ou de terre cuite se désagrègent. . La musique évoque parfois une brise surnaturelle, parfois des chants anciens, et surtout revient fréquemment ce bruit de frottement de pierres à chaque déplacement de la statue, créant une ambiance sonore très efficace.
Une scène notable montre Vanessa s’examiner dans le miroir, captant du coin de l’œil le reflet de Masao bouger avant de se remettre en place. En se retournant elle le voit dans sa position originale, mais elle sait ce qu’elle a vu et n’arrive tout simplement pas à l’accepter. La séquence devient cauchemardesque lorsqu’elle ne parvient pas à réveiller son compagnon pour le prévenir et doit affronter le dieu toute seule, son corps devenant de plus en plus rigide comme si elle se transformait elle-même en pierre.
Plus tard Tom va tenter de se rendre dans la salle de bain pour aller la voir, sans y parvenir: une statue de Vanessa bloque la porte ! Et avec une meilleure direction d’acteurs, la confrontation finale entre le voleur et l’esprit Indien aurait fait pour une conclusion très symbolique: d’un côté un être minuscule mais indestructible, incorruptible, véritable force de la nature vouée à venger toute une nation de siècles d’abus, de l’autre un pitoyable opportuniste s’étant nourri de la misère des autres et désormais sans défense, incapable de supporter l’idée que cette fois ce sont ses possessions a lui qui disparaissent.
Kent McCord (le papa militaire du Retour des Morts-Vivants 3) est pourtant très bon dans ce rôle de magouilleur pathétique et persuadé d’avoir un avenir en or devant lui, mais livré à lui-même il ne parvient pas à trouver le ton nécessaire à ces derniers instants et semble subitement jouer un antagoniste de dessin animé ! Tout cela dessert Rain Dance qui du coup est bien plus intéressant en théorie qu’en exécution. Certains vont s’y ennuyer, d’autre vont en rire, mais il faut vraiment saluer l’originalité de son concept qui le rend au moins mémorable et intriguant.
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