J’s Night (2014)

 

J’s Night

(2014)

 

 

Il y a quelques jours c’était Vendredi 13, l’occasion idéale pour se revoir quelques films de Jason Voorhees, le plus célèbre des tueurs au masque de hockey. Une tradition en quelque sorte. Mais pas cette fois. Cette année est une date un peu spéciale puisque a été mis en ligne le “premier” fanfilm français inspiré par la franchise ! A prendre avec des pincettes évidemment puisqu’il existe probablement d’autres vidéos basée sur la saga dans nos contrées, mais peu importe.
Réalisé par Antonio Rossé et Sébastien Rovere, J’s Night (prononcé Jay’s Night) est un court métrage d’une trentaine de minutes narrant une énième résurrection du tueur de Crystal Lake. Rien de bien transcendant dans l’idée et pourtant il aura fallu cinq bonnes années pour que le projet se concrétise pleinement. Auto financé et tourné en 2009 du côté de Montpellier, le film semble avoir connu quelques soucis durant la post-production, ce qui aurait retardé sa finalisation jusqu’en Mai 2014.
L’un de ses problèmes fut bien entendu d’ordre financier, contraignant les responsables à demander de l’aide via Ulule.com afin de réunir les 3500€ nécessaires au budget du mixage sonore. L’autre raison est déjà plus amusante puisque l’équipe dû attendre d’avoir l’aval de la Warner USA pour obtenir les droits d’autorisation du personnage de Jason !

 

 

S’il peut paraître un peu étonnant d’aller jusqu’à récupérer les droits légales pour ce qui n’est qu’un petit fanfilm à but non lucratif, il faut savoir que les plans initiaux (diffusion gratuite en ligne uniquement) ont été légèrement chamboulés lorsque l’équipe a considéré le fruit de ses efforts comme suffisamment convenable pour mériter une exploitation en salles lors de concours en festival.
On serait tenté de croire que personne, aux États-Unis, n’irait fouiner pour retracer l’existence d’une petite vidéo française, mais cette décision a été prise suite à la mésaventures de quelques camarades cinéastes, lesquels ont eu la mauvaise surprise de recevoir un courrier d’avocats après la projection privée d’un de leur film qui reprenait un personnage célèbre du grand écran !
Tout semble être rentré dans l’ordre puisque J’s Night s’affiche ouvertement comme fanfilm “officiel” de la franchise, mais selon Le Blog des DVDpasChériens, les exécutifs auraient quand même refusés la demande des réalisateurs. C’est déjà un véritable parcours du combattant pour mettre en scène un film Fantastique dans nos contrées, alors s’il faut en plus compter sur un autre pays pour mettre des bâtons dans les roues des artistes, il y a peu de chance pour voir d’autres projets comme ça émerger en France…

 

 

Disponible depuis ce Vendredi 13, à 13h (gageons que les responsables auraient voulu sortir le film l’an dernier), J’s Night est maintenant disponible sur YouTube et témoigne effectivement d’un soin visuel surprenant. Tellement, même, que le reste du film ne tient pas vraiment la comparaison, entre un scénario prétexte qui ne vole pas haut et une ambiance sonore pour le moins inexistante. Rien de bien surprenant puisque nous sommes là dans le domaine du fanfilm, mais lorsque le produit affiche une telle prouesse technique, il est quand même dommage que le reste ne soit pas du même niveau.
Ainsi a-t-on l’étrange sensation d’assister à la fois à un véritable film et à une petite vidéo fauchée, en alternance selon les séquences. Il est donc terriblement difficile de porter un jugement sur le résultat et cela aurait certainement pesé en défaveur du court-métrage s’il avait pu concourir.
L’illusion fonctionne dès l’ouverture, lorsqu’un groupe de jeunes vient camper aux alentours du célèbre camp Crystal Lake le temps d’une nuit. Une belle Camaro passe devant un panneau indicateur tout droit sorti du film original et le célèbre thème musical d’Harry Manfredini est là… Hélas l’atmosphère disparaît aussitôt que les personnages ouvrent la bouche, la faute à des répliques mal écrites et atrocement post-synchronisées qui décrédibilisent la réalisation. Les protagonistes sonnent faux, tant dans leur manière de parler (un fléau qui touche toute l’industrie du cinéma français) que dans le rendu sonore du doublage, visiblement un peu à la ramasse.

 

 

Et c’est dommage car même si les campeurs ne sont que de la chair à canon pour le mort-vivant de Crystal Lake, le film ne pouvant se permettre de développer quoique ce soit vis-à-vis de sa courte durée, il y avait un petit élément intéressant en la présence de cette jeune femme fraîchement enceinte. Celle-ci devient bien vite l’inévitable Final Girl qui va devoir se battre non seulement pour sa propre survie mais aussi pour la vie qu’elle porte en elle. Malheureusement il ne s’agit que d’un détail qui n’a finalement que peu d’impact sur le déroulement des évènements et jamais le scénario ne va s’appesantir sur ce sujet: J’s Night se veut classique et old-school, ce qui est bien (et limite nécessaire dans le cadre d’une telle production) mais c’est tout ce que l’on a.
L’histoire montre comment Jason Voorhees, enterré au cœur de la forêt de Crystal Lake, revient à la vie lorsqu’un couple de randonneurs égarés décide de s’envoyer en l’air juste à côté de sa tombe ! Faisant fi de sa potentielle existence, monsieur décide de séduire mademoiselle (pourtant pas vraiment consentante) au milieu de nulle part et aussitôt le Boogeyman s’extirpe de sa fosse pour les massacrer. Ceci fait, il part s’attaquer à leurs amis qui ont plantés leurs tentes au bord du lac…

 

 

Le reste du film se borne a montrer la mise à mort des pauvres fornicateurs venus s’amuser dans les parages et c’est tout. Les mauvaises langues diront qu’en cela J’s Night est similaire aux vieux films de la franchise mais ce serait oublier les rebondissements, gimmicks et personnages qui viennent relancer des intrigues en effet répétitives et peu innovantes.
Et du coup lorsqu’arrive enfin le générique de fin, on est en droit de rester sceptique devant toute cette entreprise. “Tout ça pour ça ?”, c’est un peu la phrase qui vient en tête. Un tel déploiement de moyens pour un récit qui se contente de montrer Jason exterminer une bande de jeunes, ça laisse perplexe et c’est à ce demander si le film n’aurait finalement pas dû être un peu moins soigné. Ainsi l’ensemble aurait été un peu plus homogène et plus simple à appréhender.
Cela étant dit, c’est justement cette beauté plastique qui aide le court-métrage a se différencier de ses nombreux cousins américains. D’une part cela témoigne de la passion qui anime les responsables, cette volonté d’offrir un film intéressant et pas juste de partir en forêt avec un caméscope et un pote déguisé pour faire les cons. Ensuite il faut avouer que le rendu de certains plans est à tomber. Mention spéciale pour les éclairages nocturnes à travers bois et la brume irréelle qui enveloppe les environs de Crystal Lake. La réalisation est parfois inspirée (Jason sort de terre à la manière de L’Enfer des Zombies de Lucio Fulci, ou apparaît discrètement derrière sa proie comme Michael Myers) et les effets gore signé David Scherer, qui a bossé sur The Theatre Bizarre, sont exemplaires. Enfin il faut noter du fanservice généreux, entre la reprise du meurtre au sac de couchage de Vendredi 13, Chapitre 7 et l’apparition surprise d’un certain Chosen One manieur de tronçonneuse. Et quelle bonne idée de donner à Jason cet espèce de 6ème sens qui lui permet de détecter les personnes en plein coït!

 

 

Quelques scories cependant, avec notamment tout ce qui touche au traitement sonore (ce fameux mixage financé par crowdfunding). Déjà il faut noter la quasi absence de musique. Si le fameux “Ki ki ki, ma ma ma” est là et que la dernière partie du film utilise effectivement une bande-son pour accompagner l’action, le court métrage est majoritairement lacunaire à ce niveau. Dommage car cela aurait grandement contribué à l’atmosphère lors de l’arrivée à Crystal Lake…
Il faut également souligner a quel point les bruitages sont surutilisés, avec un rendu exagérément fort. Était-il vraiment nécessaire d’employer un son pour chaque bruit de pas ? On se croirait presque, par instant, dans un vieux jeux vidéos type Resident Evil ou Silent Hill.
Pour finir, la post-synchro est d’une qualité assez médiocre. Le doublage sonne faux et met l’accent sur les répliques trop factices. Ce qui n’est pas sans poser problème puisqu’il devient parfois difficile de savoir si le ton est à la plaisanterie ou non. Franchement par moment on se croirait vraiment dans un sketch de Joueur du Grenier !
Plus anecdotique, il convient de toucher un mot sur le rôle principal, ici tenu par Marc Cossart. Si l’interprète s’en sort très bien grâce à un physique imposant, c’est en revanche un peu moyen dans le costume et la gestuelle. Je pense notamment à la démarche style “je me balade tranquille”, peut-être aurait-il été judicieux d’étudier les expression corporelles de Kane Hodder pour donner un peu plus de dynamisme au personnage.
Question déguisement, je craignais le bleu de travail criard et les gants jaune poussin façon Jason le Mort-Vivant vus sur les photos de tournage, mais heureusement les scènes nocturnes atténuent les couleurs. Le masque, en revanche, paraît bien trop artificiel et c’est à se demander pourquoi l’accessoiriste n’a pas opté pour un véritable masque de hockey, comme celui de la licence.

 

 

Mais très honnêtement il ne faut pas prendre en compte ces “défauts” dans le cadre d’un simple fanfilm. La production ne fut pas choses aisée et pinailler sur de petits détails est parfaitement inutile. Le seul véritable reproche que l’on puisse faire à J’s Night, c’est d’avoir tellement favorisé la forme que le fond semble obsolète en comparaison, mais nul doute que ce résultat n’était absolument pas prévu à l’origine.
Je ne peux donc que vous encourager à regarder ce court-métrage, disponible gratuitement je le rappel, ainsi que de jeter un œil sur sa page Facebook et lui donner un petit Like pour encourager ses créateurs.

En espérant qu’un jour le DVD distribué aux contributeurs Ulule, avec commentaire audio, interview des réalisateurs et message d’introduction personnalisées, puisse être disponible pour d’autres fans…

 

 

 

GALERIE

 

   

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