Hansel & Gretel: Witch Hunters (2013)

 

Hansel & Gretel: Witch Hunters

(2013)

 

 

Je suis le genre de personne à tout faire à l’envers et après vous avoir parlé de la version Asylum d’Hansel & Gretel, voilà que je m’intéresse enfin à l’original. Et pour résumer succinctement ce que je pense du film, permettez-moi de reprendre une formulation américaine à la mode: “Meh”.
Ce terme à l’orthographe similaire au cri de la vache est une manière de designer une œuvre qui n’est ni bonne ni mauvaise, ni intéressante ni décevante. Car Hansel & Gretel: Witch Hunters est le prototype parfait du blockbuster saisonnier, le film de divertissement calibré pour tous et donc vierge de toute personnalité. Un produit sans âme, techniquement réussi, visuellement simple et au service d’une intrigue passe-partout qu’on a déjà vu une centaine de fois.
On connait tous l’histoire: les producteurs n’aiment pas les prises de risques, craignant que le film ne se plante au box-office et ne fournisse pas le retour sur investissement + intérêt désiré, et en résulte des décisions qui aseptise le projet afin de le rendre visible par tous. Et par conséquent, à vouloir plaire au plus grand nombre, le film n’intéresse plus personne.
Comme toujours des stars sont mises en avant pour appâter le public, sorte d’habillage parfois séduisant, parfois énervant selon les goûts, tandis que la mise en scène est généralement attribuée à ce que l’on surnomme un “Yes Man”, c’est-à-dire un cinéaste sans solide caractère, qui ne risque donc pas d’imposer sa vision des choses au détriment de l’entreprise, acquiesçant à chaque nouvelle demande des producteurs (“fait plus comme-ci, rajoute plus de ça”).
C’est exactement le cas ici avec quelques avec quelques grands noms comme Famke Janssen et Jeremy Renner en tête d’affiche et la présence d’un jeune “débutant” à la barre: Tommy Wirkola…

 

 

Et c’est bien dommage car la seule attente que suscitait le blockbuster résidait dans la présence du réalisateur norvégien, notamment coupable d’un rigolo Dead Snow qui, à défaut d’être vraiment bon, laissait au moins transparaître une attitude un peu rebelle, légèrement trash. Juste de quoi relever un peu la sauce et faire de Hansel & Gretel autre chose qu’un nouveau Van Helsing transparent. Malheureusement, il n’en est rien.
Tout dans le film semble évoquer le ratage de Stephen Sommers, de l’esthétisme rétro-Steampunk (armes improbables, costumes sexy, décors gothiques) aux monstres classiques relookés façon cartoon. Les gags sont les mêmes, les scènes d’actions sont les mêmes, les enjeux sont les mêmes, plusieurs scènes partagent de fortes similitudes (le Bal des Vampires pour une assemblée de sorcières, la mort tragique d’une love interest, le gentil monstre qui offre son aide) et on retrouve grossièrement la même construction: les héros arrivent dans une région menacée pour faire leur boulot, découvre que la menace est plus importante qu’ils ne le croyaient, apprennent que l’antagoniste est directement lié au mystère qui entoure leurs origines et s’allient finalement avec quelques sidekicks pour exterminer les créatures des Ténèbres…
Cette fois au moins on peut s’estimer heureux que l’ensemble ne fasse pas ouvertement écho à quelques jeux vidéos ou animes populaires comme c’était le cas avec Van Helsing. Et encore puisque je pourrais évoquer ce fouet qui ressemble à s’y méprendre à celui d’Ivy dans les SoulCalibur

 

 

Mais pour ceux qui n’auraient pas vu (ou ne veulent pas se souvenir de) Van Helsing, voilà le point de départ d’Hansel & Gretel: il s’agit d’une continuité très libre du célèbre conte pour enfants, dont les évènements ont conduits les héros à devenir des chasseurs de primes spécialisés dans la mise à mort des jeteuses de sorts. Invulnérable à la magie pour d’étranges raisons, Hansel et Gretel parcourent désormais le pays à la recherche de nouvelles cibles et sont responsables de la destruction d’environ 600 sorcières, utilisant une flopée d’armes et de gadgets qu’ils ont eux-mêmes inventés.
Au cours d’une mission de routine dans un village isolé, ils réalisent qu’ils sont au centre d’une affaire plus importante encore que la disparition de quelques enfants puisque Muriel, de la caste des Grandes Sorcières, projette de réunir ses consœurs des quatre coins du monde. Elle vient de mettre au point un rituel qui permettrait à ses semblables de devenir invulnérable au Feu, leur seule véritable faiblesse. Une course contre la montre s’engage entre les chasseurs et les sorcières, Hansel et Gretel devant également faire face à un groupe de villageois hostiles à leur autorité et à la présence d’un puissant Troll qui assiste leurs ignobles adversaires…

 

 

Rien de bien neuf à l’horizon et croyez-moi si je vous dit que le récit enchaine les lieux communs: un jeune admirateur devient l’assistant du duo par la force des choses, le méchant Troll se révèle être un sympathique servant qui va devenir le protecteur de Gretel tandis que son frère va découvrir les joies de l’amour dans les bras d’une guérisseuse, une “sorcière blanche” qui ne jure que par le Bien.
Frère et sœur vont également découvrir le secret derrière leur immunité à la magie: ils sont évidemment les enfants d’une sorcière! De la plus puissante des sorcières blanches mêmes, et s’ils ont été abandonné dans la forêt à leur enfance, c’était pour les sauver d’une foule de villageois en colère. Et devinez qui est derrière cette tragique histoire? Muriel, bien sûr!
Tout ce conclut naturellement lors d’une bataille finale de grande ampleur, nos héros parvenant à se défaire sans trop de mal d’une trentaine d’ensorceleuses à eux seuls. Je ne vous donne là que les grandes lignes d’un scénario banal qui suit un chemin tout tracé sans jamais s’en écarter une seule seconde. Hansel & Gretel ne brillant ni par son originalité ni par son enrobage, il ne lui reste plus que le facteur “spectaculaire” pour rehausser le niveau. Là encore ce n’est pas une grande réussite puisque tout ce qui se déroule à l’écran est on ne peut plus basique. Nous sommes désormais à une ère où il est possible de réaliser à peu près n’importe quelle situation et les grosses productions ont fini par nous blaser à force de surenchère. Tout comme le récit, l’action est ici extrêmement prévisible. Du coup bien qu’efficaces, les scènes restent dans le domaine de l’habituel, le pain quotidien de n’importe quel blockbuster, et ne sont donc pas suffisante pour raviver l’intérêt.

 

 

A tout cela se rajoute les éventuels défauts et problèmes qui ne font rien pour aider. Par exemple comment croire un instant à la menace que représentent les sorcières et leur supposé plan pour survivre aux flammes, lorsque Hansel et Gretel les exterminent tout simplement avec des armes conventionnelles durant le final ? Pourquoi introduire cette sorcière blanche comme héroïne tragique si la dramaturgie n’est même pas soulignée ? Et lorsque se réunissent enfin toutes les sorcières, ce qui devait être le grand moment du film n’est qu’un pétard mouillé: pas un seul instant le film ne s’attarde sur ces nombreuses créatures au design et capacités uniques. Sorcières tribales, orientales, vaudou, naines unijambistes et siamoises adeptes du katana… La bataille finale aurait pu être un festival visuel et technique, mais Tommy Wirkola traite la chose avec un tel dédain que cela en devient honteux !
L’idée que Hansel et Gretel ne craignent pas la magie évacue d’emblée la moindre notion de magie, toutes les sorcières se battant au corps à corps comme des adeptes du kung-fu, et si Jeremy Renner s’éclate dans les bras d’une belle fille nue, on peut se demander pourquoi sa partenaire doit se contenter d’un monstre hideux en guise de prétendant !

 

 

J’ai peut-être l’air d’accabler le film mais ce n’est pas le cas. Toutes ces choses ne sont pas tellement proéminentes et ne m’apparaissent surtout que parce que je n’ai rien d’autre à regarder. Quelques bonnes idées viennent contrebalancer tout ça, comme celle d’avoir rendu Hansel diabétique et dépendant de ses injections quotidiennes suite à sa visite dans la maison de pain d’épice. Si Van Helsing était très family friendly dans son approche de la violence, Hansel & Gretel se lâche beaucoup plus et n’hésite pas à se montrer surprenant dans ses débordements: écartèlement, décapitations, cervelles arrachées, visage écrasé d’un coup de pieds, et jusqu’à un jeune garçon qui se retrouve forcé de tirer au fusil sur sa mère sous l’influence d’une sadique sorcière ! Le ton général vient parfois se rapprocher de L’Armée des Ténèbres auquel un clin d’œil vient faire directement référence, lorsque Jeremy Renner tir un coup en l’air pour gagner un peu d’attention.
Les sorcières abordent un look monstrueux qui n’est pas sans renvoyer au superbe Sorcières produit par Jim Henson, avec des maquillages peut-être trop grotesques mais en tout cas uniques et parfois très intéressants. Un grand bravo également à Famke Jansen, qui reste dissimulée derrière son apparence démoniaque les 3/4 du temps plutôt que d’avoir recours à la facilité de l’apparence humaine dès que possible. Voilà une décision fort honorable.
Et puis un film qui met en boite la saga Twilight, même involontairement, en nommant son gros Troll des bois “Edward”, ne peut que remporter ma sympathie. Cette pauvre Gretel n’en fini plus de faire rire dès qu’elle fait appel à lui lors de scènes résolument sérieuses.

 

 

Outre Famke Jansen qui par miracle ne s’adonne pas au cabotinage dans son rôle de grande méchante, le casting principal d’Hansel & Gretel est un autre bon point. La belle Gemma Arterton (héroïne du Choc des Titans et de Prince of Persia) campe une Gretel dure à cuir, séduisante et compétente, ce qui est beaucoup trop rare pour ne pas être signalé, tandis que le charisme naturel de Jeremy Renner (dans une bonne passe à l’époque, puisqu’on le retrouvait aussi dans Mission: Impossible – Protocole Fantôme, Jason Bourne: L’Héritage et The Avengers au même moment !) joue en faveur du personnage d’Hansel. S’il est clairement moins intéressant que sa sœur, l’énergie que dégage l’acteur suffit à lui donner corps.
Enfin il me serait impossible de ne pas citer Derek Mears, le Jason Voorhees de 2009 dans le rôle d’Edward. Un sidekick sans grand intérêt mais qui se montre déjà beaucoup efficace que l’autre lopette qui brille comme une boule à facettes. Dommage que les autres protagonistes soient sans importance ou peu exploités, comme ces deux sœurs sorcières au service de Muriel.

 

 

Véritable purge pour certains, ce que je comprends parfaitement, Hansel & Gretel: Witch Hunters s’avère juste d’une platitude désespérante. Et peu importe les gimmicks qu’utilisent les producteurs pour ramener du monde, entre la version 3D et la version “extrême” qui sort en Blu-ray, rétablissant (faussement ?) quelques passages sanglants oubliés en salles. Il ne s’agit que d’artifices destinés à faire croire à la vraisemblance du produit.
Alors ne soyons pas dupe face à cette séquelle qui vient d’être annoncée et que Tommy Wirkola et ses producteurs nous promettent déjà d’être “encore plus folle”. Quant la recette fonctionne, il n’y a aucune raison de changer les ingrédients et c’est exactement ce que l’on nous réserve…

 

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