The Chicken Run – A Texas Chainsaw Massacre Short Film (2015)

 

The Chicken Run

A Texas Chainsaw Massacre Short Film

(2015)

 

 

Lorsque The Chicken Run a été mis en ligne au tout début du mois, puis relayé par le site Fangoria afin d’attirer l’attention du public, j’ai pu lire pas mal de réactions très négatives dans les commentaires des différentes plateforme. Non pas à propos du film lui-même, que la plupart n’avaient même pas regardé, mais parce que l’annonce présentait la chose comme un court-métrage basé sur le grand classique de Tobe Hooper, le Massacre à la Tronçonneuse original. Clairement, après cette abomination qu’était Texas Chainsaw 3D, plus personne ne veut d’un nouveau film sur la franchise. Plus personne ne supporte la simple idée d’un nouvel opus et encore moins lorsque celui-ci se déclare directement lié au film culte de 1974. C’est totalement compréhensible mais les pauvres ne sont pas au bout de leurs peines, car se profile déjà à l’horizon un nouvel opus, préquelle narrant les origines de Leatherface…
Il faut dire que ce n’est pas vraiment malin de la part de Fangoria et du réalisateur de vendre la chose comme un film “viscéral” et dans la même veine que le film de Hooper. Les propos paraissent évidemment mensongers et racoleurs, de la même manière que la campagne publicitaire du dernier navet de la franchise, qui évoquait une “véritable suite de Massacre à la Tronçonneuse” pour attirer les foules. Et effectivement, The Chicken Run est à des milliers d’années-lumière de son modèle, dont l’atmosphère étouffante est de toute manière impossible à réitérer. Rien que le poster trahit l’aspect rudimentaire du projet, en affichant un Leatherface très propre sur lui et pas vraiment convainquant.

 

 

Il faut toutefois remettre les choses dans leur contexte. The Chicken Run n’a en fait rien d’un rajout officiel à la saga, et pour cause: il s’agit d’un simple fanfilm. Le court-métrage n’a donc pas plus de légitimité envers Massacre à la Tronçonneuse que J’s Night n’en avait avec Vendredi 13 par exemple, et la seule chose qui le différencie sensiblement des nombreuses vidéos similaires trouvables sur YouTube tient de son réalisateur. Celui-ci, Gary J. Tunnicliffe, n’a rien d’un inconnu puisqu’il n’est autre que l’homme derrière le fameux No More Souls: One Last Slice of Sensation. Pour ceux qui ignore de quoi je parle, il s’agit d’une courte vidéo inspirée de l’univers de Hellraiser et montrant un Pinhead vieillissant, sans but car la civilisation humaine a finalement été détruite. Ne trouvant plus aucune joie dans son existence, il décide alors d’utiliser la Configuration des Lamentations sur lui-même afin de ressentir quelques sensations pour une toute dernière fois. Le film avait fait sensation au point d’être récupéré par Dimension Films pour l’inclure sur le DVD de Hellraiser: Deader.
Il faut dire que le bonhomme n’a rien d’un inconnu sur la scène du cinéma d’horreur puisqu’il est un artisan des effets spéciaux de longue date, maquilleur récurrent sur de nombreuses franchises. On le retrouve aussi bien sur des Hellraiser, des Candyman, des Pumpkinhead ou des Return of the Living Dead, et tellement d’autres qu’on ne va pas tous les nommer. Il est également responsable d’un clone d’Alien pas génial mais amusant (Within the Rock, dont le gimmick est de mélanger un peu de l’Armageddon de Michael Bay dans son histoire). Il était forcément tout désigné pour porter le projet qui, à l’origine, était une simple… publicité !

 

 

Il faut remonter un peu plus tôt en 2014, date anniversaire de Massacre à la Tronçonneuse. Un évènement et une source d’inspiration pour beaucoup, et c’est ainsi qu’un célèbre casino de Las Vegas, le Circus Circus, en profite pour créer sa nouvelle attraction. L’établissement est connu pour posséder son propre parc de loisirs, le Adventuredome, qui depuis plus de dix ans fête chaque Halloween en devenant le Fright Dome. L’endroit est évidemment modifié afin de correspondre à la thématique et devient un repaire de zombies, monstres et psychopathes de carnaval venant effrayer les touristes dans des décors de trains fantômes à grand budget. Il s’agit d’une des plus importantes attractions de la saison dans le pays, et il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les responsables ont voulu profiter de la célébration annuelle pour l’occasion.
Tunnicliffe et une petite équipe de vidéastes sont alors réunis afin de tourner une vidéo promotionnelle qui, par la force des choses, va devenir The Chicken Run. Le budget est infime et le calendrier de tournage (qui, de façon symbolique, se déroule au mois d’août, même date à laquelle se déroulaient les évènements de Massacre à la Tronçonneuse) ne laisse guère de marge pour filmer autre chose qu’une seule et unique scène, avec un casting minimaliste et un décor unique. Le réalisateur doit même délaisser les effets spéciaux et le maquillage, qui sont prit en charge par un collègue et ami de longue date, Mike J. Regan (dont le CV équivaut approximativement à celui de Tunnicliffe). Autant dire que nous sommes très loin d’un court-métrage de grande envergure conçu pour la franchise.

 

 

Et pourtant le résultat semble avoir plu. Suffisamment pour le sortir des limbes de l’après Halloween et le baptiser “A Texas Chainsaw Massacre Short Film” pour le distancier de l’évènement Fright Dome. Alors certes au final cela reste une tentative d’exploitation très profiteuse et commerciale, et les commentaires désobligeant qui fleurissent sont dans le vrai, mais nous il s’agit d’un contexte radicalement différent de la production d’un long-métrage pour une sortie en salle. Si l’information avait été un peu mieux retransmise plutôt que jouer sur le côté “inspiré directement du film culte original”, peut-être que les réactions auraient été un peu moins excessives.
Cela étant dit, ce n’est pas pour autant que la vidéo est une réussite. L’origine publicitaire se ressent très fortement et il est tout simplement impossible de s’intéresser à ce qui se passe à l’écran. Même le côté fanfilm disparaît car on ne sent pas particulièrement de volonté de jouer avec l’univers. Forcément, en un jour de tournage et pour une durée totale de 4 minutes le contraire aurait été surprenant, mais il est permis de se sentir déçu par le manque flagrant de substance de l’ensemble.
La fiction ne dure en réalité que 2 minutes 45 et il faut compter sur un générique excessivement long qui présente toute la troupe derrière la caméra. L’intrigue, ou plutôt les éléments présents dans la séquence, tiennent sur un demi-timbre poste: Crissy, une jeune femme à gros seins, se réveille dans un pièce étrange sans comprendre ce qu’elle fait là. Ses poignets sont liés et elle découvre son frère Bobby (merci au site du film pour cette précision) agonisant, empalé sur un croc de boucher. La seule sortie est une énorme porte en métal, mais celle-ci s’ouvre pour laisser apparaître le colossal Leatherface, armé de sa tronçonneuse et venu finir son travail…

 

 

La seule chose visible dans The Chicken Run est la tentative d’évasion de Crissy, laquelle est prisonnière d’une pièce exiguë et sans aucun moyen de défense. Et puisqu’il aurait été vite lassant de voir la jeune femme bondir d’un coin à un autre de l’endroit, le scénario utilise assez habilement la présence d’un clapier à poules, sorte de tunnel qui mène vers une basse-cours extérieur et dans lequel se réfugie l’héroïne pour échapper aux coups de tronçonneuse . Il est difficile de croire que Leatherface ne puisse pas détruire facilement la construction faite de planchettes et d’un grillage d’enclos, mais il fallait bien une excuse pour créer le suspense et faire durer le film un peu plus de 30 secondes.
Et c’est tout ce qu’il y a à en dire, sincèrement. Au-delà de l’aspect Survival, le court-métrage n’a absolument pas le temps de construire quoique ce soit d’autre et tout se termine dès que la jeune femme parvient à s’extraire de son terrier. On ne peut même pas vraiment parler d’acting étant donné que Leatherface n’a rien à faire si ce n’est brandir son outil et que Crissy se contente de pleurer et de hurler. Ce n’est pas mauvais, mais il n’y a vraiment aucun critère de jugement possible.
Quant à l’exécution, elle est loin d’être mauvaise mais le tournage précipité et le manque de budget ne permet pas de rendre la scène aussi tendue qu’elle devrait l’être. La chorégraphie de l’ensemble est peu discernable puisque le montage saute de gros plans en plans serrés, cependant le tout reste correctement emballé et sans shaky cam ou effets visuels à la mode qui pourrait rendre tout ça proprement indiscernable. Autant le dire, la mise en scène est véritablement du niveau d’une publicité. Techniquement acceptable, sans plus.

 

 

Par contre pour le côté visuel “hérité” du Massacre à la Tronçonneuse original, on repassera. Si le court fait l’effort d’avoir l’air un minimum ancien par rapport au dernier essai cinéma, on se rapproche ici beaucoup plus du remake de Platinum Dunes que des images granuleuses de Tobe Hooper. La qualité vidéo est artificiellement rabaissée à l’aide de filtres vidéos comme dans Planet Terror (couleurs délavées, griffures sur l’image) et Crissy porte une tenue volontairement calquée sur celle de Jessica Biel, avec débardeur retroussé au niveau du ventre et mini short moulant, qui est loin d’évoquer le réalisme du film de 1974 et lui donne une allure plus proche de la série B.
Le fanfilm peine également à retrouver toute la folie qui émanait de son modèle et la pièce d’abattoir fait désespérément vide. Très peu de constructions et objets fait d’ossements, de matériel de boucherie et autres éléments de “décoration” si chers aux Sawyers. L’endroit demeure factice et, en fait, ne donne pas une image tellement impressionnante du Fright Dome. Tout au plus peut-on apercevoir quelques tréteaux sanguinolents et un ou deux squelettes suspendus au plafond, recyclés en abat-jours. Au moins la maison utilisée pour le plan extérieur d’introduction apparaît bien décrépie et lugubre, s’inscrivant pour le coup dans la lignée de celle du film culte.
Quelques clins d’œils à noter toutefois, comme Bobby apparaissant empalé sur le croc de boucher et Leatherface ouvrant la porte coulissante derrière laquelle il se cache, deux passages évidemment reprit aux moments qui comptent parmi les plus mémorables de Massacre à la Tronçonneuse.

 

 

Quant à Leatherface, que l’on n’aperçoit finalement que très peu, il apparaît exactement comme sur le poster. Trop propre, trop proche d’une imitation. Il n’est pas abominable mais je reste persuadé que l’on peut trouver bon nombre de cosplay bien plus réussi pour tout aussi peu d’argent. Au moins le comédien qui l’incarne possède la carrure nécessaire et le même côté “empâté” que Gunnar Hansen pour que l’on n’y fasse pas trop attention. Et pour l’anecdote, celui-ci n’est autre que Dave Mattey, qui avait incarné le Toxic Avenger et son double maléfique dans le génial quatrième volet de la saga, Citizen Toxie.
A ses côtés la frêle Melanie Lastrina paraît bien vulnérable, mais j’insiste encore une fois sur la taille impressionnante de sa poitrine qui vient vulgariser un peu l’ensemble. L’actrice aurait été plus sa place dans un fanfilm sur l’univers de Russ Meyer que sur celui de la famille cannibale ! Toutefois ne soyons pas mauvaise langue car le duo s’acquitte très bien de la tâche qui lui est confié et ne détonne pas du reste de l’entreprise.
Au moins The Chicken Run reste consistant d’un bout à l’autre de son projet, et on peut résumer le court-métrage par simple déclaration: passable et aurait pu mieux faire. Critique aussitôt désamorcée par l’origine publicitaire du projet et le fait que l’équipe n’avait qu’une seule journée pour emballer le tout. En l’état, c’est presque un miracle que la vidéo ait pu être recyclée et avoir sa propre vie au-delà du parc d’attraction.

 

 

Il existe évidemment de nombreux fanfilms basés sur Massacre à la Tronçonneuse trouvable sur la toile, et à n’en pas douter plusieurs d’entre eux doivent être supérieur à The Chicken Run. A vrai dire, même le sketch vidéo du Angry Video Game Nerd parait plus réussi, si ce n’était pour son ton ouvertement comique ! Pour autant, il ne s’agit absolument pas d’une perte de temps. Avec une durée d’à peine plus de deux minutes et une disponibilité en ligne gratuite, ce court-métrage mérite vraiment qu’on lui accorde un petit coup d’œil. Ce n’est pas grand chose mais c’est toujours plus digne de votre attention que Texas Chainsaw 3D. De plus les créateurs ont eu le bon goût de dédier leur travail à Marilyn Burns, hélas décédée durant le mois du tournage, ce qui passe toujours mieux que l’apparition peu flatteuse sur laquelle elle a pratiquement terminée sa carrière…

 

 

   

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