Il y a quatre ans j’ai réalisé une petite série de chroniques de films d’horreur, censées fonctionner comme un compte à rebours pour Halloween. Cette année j’ai décidé de réitérer la chose, et Mental Hurlant laisse temporairement sa place pour une nouvelle édition de Road to Halloween. Le concept reste identique, avec le projet un peu fou d’un film par jour, mais la règle est de rester dans le genre qui correspond à la fête. Surnaturel, monstres, fantômes et meurtres sanglants. Pas de comédies fantastiques, pas de films d’action, de SF ni de Thriller…
La première fois, j’avais marqué le coup en prenant pour le thème la fête d’Halloween elle-même, mais cette fois, et parce que j’ai improvisé au dernier moment, la sélection sera totalement faite au hasard. Voilà donc 31 films d’Horreur, sérieux ou amusants, vieux ou modernes, pour tenir jusqu’à la Toussaint.
Tremors 5: Bloodlines
(2015)
Difficile de croire qu’un film comme Tremors 5 puisse voir le jour. Cette année fête le 25ème anniversaire de l’original, et je me souviens encore de ma réaction lorsque, âgé de 6 ans, je découvrais l’affiche devant le cinéma du coin. Après avoir longuement détaillé la créature souterraine qui s’apprêtait à sortir du sol pour bouffer Fred Ward et Kevin Bacon, mon regard s’est immédiatement posé sur le sol et je tâchais d’imaginer pareil situation dans la réalité. Je tentais de calculer la taille de la créature par rapport à moi, en m’aidant du poster, et je me disais que ce film devait être quand même très effrayant. L’idée qu’un monstre puisse demeurer invisible jusqu’au dernier moment, et être assez grand pour vous avaler d’un coup, me paraissait effroyable. N’ayant pas vu le film, et ne sachant pas que les Graboids sont incapable de traverser la pierre, je regardais partout autour de moi en me disant qu’on ne pouvait être en sécurité nulle part !
Des années plus tard je tombe sur Tremors 2, à sa sortie en vidéo, et c’est le coup de foudre pour cette série B hilarante. Je réalise que j’étais bien loin du compte, même si une vision de l’original vient me confirmer que le côté « horreur » est bel et bien là et qu’il a juste été évacué avec le temps et les séquelles. Le dernier film, plutôt un téléfilm, remonte à 2004 maintenant, et la franchise semblait avoir rendu l’âme après une déclinaison en série télé. On peut donc être légitimement surpris de voir ce nouvel opus débarquer si tardivement, bien que cela n’apparaisse pas innocent au regard de certains évènements. Il y a les déclarations de Kevin Bacon déjà, qui avoue avoir gardé une place dans son cœur pour Tremors et être intéressé pour reprendre son rôle de plouc. Et puis il y a Jurassic World, résurrection d’une autre vieille saga impliquant de gros monstres. Ce n’est sans doute pas un hasard si Tremors 5 reprend à son compte la célèbre scène des Rapors dans la cantine de Jurassic Park, remplaçant les dinosaures par un Ass Blaster très agressif. Et puis la mode des reboots à tout va à certainement dû amener la question d’un remake de Tremors premier du nom, ce que les créateurs et les fans ne souhaitent pas le moins du monde.
Mais peu importe les raisons finalement. Tremors est de retour, et l’inénarrable Burt Gummer avec. Toujours interprété par Michael Gross, le redneck paranoïaque ressort les armes pour une nouvelle confrontation avec ses ennemis de toujours, et le scénario reprend exactement la même structure que Tremors 2 et 3: l’ancien héros est désormais seul et oublié de tous lorsque débarque un jeune homme qui l’admire et souhaite le remettre dans le droit chemin. Et au même moment quelqu’un débarque pour expliquer que les monstres sont revenus, obligeant le vieux briscard à s’associer avec l’indésirable fan pour sauver la mise. Rien de neuf sous le soleil et à vrai dire on s’en tape un peu. Quand on en arrive à Tremors 5, on essaye surtout de savoir si le film est drôle et ce qu’il apporte de nouveau aux créatures.
Car la franchise à toujours apportée une nouvelle étape dans le cycle de vie des Graboids, ou en tout cas offert une nouvelle bestiole avec de nouvelles aptitudes, afin d’éviter de répéter la même chose encore et toujours. Tremors avait ses vers géants, Tremors 2 avait les Shriekers, sorte de gros poulets hurleurs absolument adorables, et Tremors 3 avait les Ass Blasters, variation volante de ces derniers, qui allumaient leurs pets pour s’envoler. Tremors 4, lui, changeait la donne en déplaçant l’action à l’époque du Far West et montrait à quoi ressemblait les jeunes Graboids, ici minuscules mais très rapides, sortant du sol à vitesse grand V et à plusieurs pour dévorer leurs proies.
Ce cinquième volet se montre plutôt malin puisqu’il déplace l’action sur un autre continent, en Afrique, et nous présente une variété totalement différente des Graboids. Si les Shriekers brillent par leur absence (même Burt les mentionne, gageons que la production ne pouvait payer pour chaque type de créatures), nous découvrons alors des vers et des Ass Blaster très différents de ceux que l’on connait.
Plus agressif dans le comportement, mais aussi visuellement. Le Graboid reste similaire, mais beaucoup plus gros, plus agile, et couvert de piques (ces petites dents qui lui permettent de naviguer sous terre). Les trois tentacules de sa gueules peuvent maintenant se détacher comme s’il s’agissait de petites bestioles à part, et évoque immédiatement le serpent de Prometheus dans son design (ou les tentacules d’Un Cri dans l’Océan, si vous êtes plus dans le gros B). Le Ass Blaster, lui, perd son long bec et montre une gueule ronde et garnies de dents, comme un Langolier. S’il pète toujours le feu, la chose devient moins ridicule. Plus meurtrière, plus dangereuse, sa taille réduite lui permettant de se faufiler dans les grottes. Intelligent, il conçoit même des pièges vicieux, attrapant une victime pour l’abandonner plus loin et attendre, tapis dans un coin, qu’une autre proie s’approche afin de lui porter secours !
Inutile de dire que Burt, malgré toute son expérience et ses précautions, est bien vite dépassé par la situation et va avoir besoin de toute l’aide qu’il peut trouver. Depuis les évènements de la série télé, celui-ci tente désormais de gagner sa croûte en tournant de ridicules vidéos sur le Survivalisme, sans grand succès. Lorsqu’un grand ponte lui promet de produire son émission en échange de l’éradication du nid de Graboids en Afrique, il saute sur l’occasion et se rend sur place pour une mission qui va s’avérer bien plus compliqué que prévu: ses armes sont confisquées à la douane, le commanditaire lui demande de capturer les Graboids plutôt que de les détruire, et toutes les personnes vivant dans les parages semblent ne pas du tout réaliser à quel point ils sont en danger…
L’intrigue suit donc le schéma classique des suites de Tremors, avec les personnages devant survivre et riposter avec les moyens du bord face à une menace beaucoup plus sournoise qu’il n’y parait. Les clins d’œil sont légions et les fans de toujours retrouveront des petites choses familière tout au long du film (le type avalé par un Graboid mais ressortant sain et sauf, un drugstore qui rappel celui de Perfection Valley, etc.), pour autant, on ne se retrouve pas nécessairement avec les mêmes gags. Ce nouveau volet tente d’innover ici et là (par exemple l’organisateur de la mission se révèle être un braconnier qui espère vendre des œufs de Graboids au marché noir) et joue beaucoup sur les nouvelles capacités des Graboids.
Ceux-ci bondissent comme des baleines hors de l’eau, fond des dégâts considérables compte-tenu de leur taille et les affrontements sont originaux. On retrouve là encore quelques éléments déjà employés auparavant, mais chaque attaque, chaque scène d’action, est suffisamment soignée pour ne pas donner l’impression de revoir exactement la même chose. Un couple s’envoyant en l’air en pleine douche extérieur se fait avaler d’un coup, un hélicoptère disposant de lance-missiles est employé contre un vers géant, Burt et son compagnon fuient à pieds à travers un troupeau de Gnous afin de tromper le Graboids qu’ils ont aux fesses, et l’héroïne utilise une voiture en flammes mais toujours roulante comme piège explosif contre les monstres.
A cela s’ajoute une volonté de travailler autant que possible la mythologie de cette nouvelle variante, en l’associant au tribalisme africain. Dans une grotte figurent des peintures ancestrales montrant des chasseurs s’attaquer aux vers, tandis que le Ass Blaster est représenté en costume au cours d’une danse rituelle. Quelqu’un vient même le comparer à une chauve-souris géante, ne sortant que la nuit pour boire le sang de ses victimes… L’air de rien ces petites touches ici et là permettent de constituer un univers crédible où la bête que l’on connait pourtant par cœur à pu évoluer autrement. C’est assez proche des autres films pour rester un vrai Tremors, mais suffisamment différent pour se démarquer du lot. Certains puristes extrêmes râleront sûrement, mais en vérité l’idée tient très bien la route et donne même envie de voir le concept être étendu à d’autres zones. L’Australie, par exemple, dont l’Outback ferait une parfaite zone de chasse pour Burt comme pour les créatures.
D’ailleurs il semblerait que c’est là que le film devait se dérouler à l’origine, sous le titre de Tremors 5: Thunder From Down Under, qui devait en fait ramener Bacon et Ward. S’il ne reste rien de cette version, un personnage de baroudeur ici présent évoque clairement l’Ozploitation, avec son look similaire à celui de Batista dans Riddick.
Maintenant gardons les pieds sur terre (mais pas trop, les Graboids guettent). J’encense beaucoup ce nouveau Tremors mais cela ne signifie pas qu’il s’agit d’un « grand » film de cinéma. Il n’y aura pas d’autres films comme l’original, ni suites DTV, ni reboot Hollywoodien, c’est indéniable. Tremors 5: Bloodlines demeure un simple film de série B, ni plus ni moins, et pour le marché vidéo. Toutefois, au regard des merdes qui sortent constamment de nos jours, et comparé aux derniers opus (Tremors 3, plus un pilote pour la série, et Tremors 4, qui était surtout un petit téléfilm rigolo), voilà une très belle réussite. Le script possède pas mal de rebondissements, de scènes d’action et d’humour pour que l’on ne s’y ennui pas une seconde, les CGI ont fait un progrès remarquable depuis Tremors 3 et on retrouve même quelques effets spéciaux plus old school pour les gros plans sur les bestioles.
Michael Gross se déchaine toujours autant qu’avant malgré l’âge (son personnage est désormais quasiment chauve afin de ne pas montrer ses cheveux blancs, ce qui surprend, mais je suppose que c’est toujours mieux que de lui faire une teinture comme dans les films précédents) et semble aimer Burt tout autant que nous. Ce personnage de tueur de monstres très con, très beauf, mais adorable, au même titre que Ash des Evil Dead et Reggie des Phantasm. Autant dire que Tremors, la franchise, sera morte et enterrée lorsque l’acteur renoncera à reprendre le rôle. A partir de là, rien ne viendra distinguer la série d’un quelconque Creature Feature certes bien branlé mais sans véritable identité.
Disons le comme-ça: si Tremors 5 n’arrive évidemment jamais à la cheville de Tremors, il constitue une parfaite suite à Tremors 2. Les films sont comparable en terme de rythme et de générosité, et possèdent à peu près le mêmes défauts dû à leurs budgets.
On peut faire la fine bouche et reprocher quelques petites choses, comme par exemple la scène un peu trop longue où Burt est enfermé dans une cage à lion et abandonné dans le désert, la séquence finissant par partir dans un délire à base d’urine pas vraiment marrant. Pas très convaincu non plus par le fait de lui avoir donné un fils, si ce n’est de nous montrer que le personnage à vieilli. Même si le sous-titre Bloodlines est un gros indice à ce propos, la révélation n’intervient que beaucoup trop tard pour que cela ne change quoique ce soit à l’intrigue. De plus Burt n’en ressort absolument pas différent, ni grandit, ni humanisé. C’était donc parfaitement accessoire, mais je suppose que les responsables voulaient rajouter encore un peu de substance distinguer Tremors 5 des autres.
Heureusement la relation fonctionne assez bien puisque Burt Jr. n’a rien d’un beau gosse ou d’un adulte compétent et responsable. A vrai dire, il ressemble vraiment à l’idée qu’on pourrait se faire du fils de Burt Gummer: un gros beauf moustachu, incapable, qui s’éclate d’un rien, et qui n’a aucune connaissance sur quoique ce soit. C’est logique et ça correspond à la saga, donc pourquoi pas.
Mentionnons aussi l’introduction, un peu longue, qui résume tout ce qu’il y a à savoir à propos des Graboids, et qui s’avère particulièrement redondante pour le fan qui connait déjà tout. En revanche tout cet historique est monté avec tout une série d’images et de vidéos qui semblent provenir de travail de fans: fanarts, animations 3D, etc. Je me trompe peut-être, mais si c’est le cas, c’est un sacré hommage à ceux qui ont permis à la franchise de continuer à exister jusqu’à présent !
Très franchement je n’ai rien à redire à propos de ce Tremors 5. C’est un petit B, mais un petit B sympa et efficace, qui est l’un des meilleurs de sa série, et qui a visiblement été conçu avec soin et respect. En fan de films de monstres et de cinéma de vidéo-club, cela correspond parfaitement à mes attentes et me donne même envie d’en voir plus. Pourquoi pas un Tremors 6 où les deux stars de l’original viendrait faire un ultime adieu aux fans, et retrouver Michael Gross avant qu’il ne soit trop vieux pour ces conneries ? Et tant qu’à faire, on pourrait y ramener les deux versions des Graboids et les faire s’y affronter !
Rêvons, cela n’arrivera sûrement jamais…
VERDICT: TREAT !
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