The Walking Dead
Ep.5.04
Slabtown
La semaine dernière, je concluais mon article en me demandant s’il ne valait pas mieux regarder le classique Jour des Morts-Vivants de George Romero plutôt qu’un autre épisode de la série The Walking Dead, en raison de la qualité déplorable de l’écriture scénaristique. Il faut croire qu’il existe une sorte de force supérieur car, cette semaine, cette nouvelle entrée dans la cinquième saison n’est rien de moins… Qu’un remake déguisé du film en question ! Visiblement c’est passé au-dessus de la tête de pas mal de monde, et pourtant il me paraît impossible de ne pas s’en rendre compte tant les éléments repris sont nombreux et vraiment mal camouflés.
Si je ne peux cautionner un tel choix, le show n’étant pas supposé être un DTV bas de gamme mais une œuvre bien produite et mondialement connue, il me faut admettre que c’est quand même une sacrée amélioration par rapport a ce que l’on a eu droit jusque là. Mais pensez-y un instant: la série fait un meilleur boulot quand elle pille les idées d’un film de 1985, que elle lorsqu’elle raconte sa propre histoire ! Si c’est pas du constat alarmant, je sais pas ce que c’est…
Slabtown prend racine dans la fin de la saison 4, lorsque le personnage de Beth était enlevée dans une étrange voiture sous les yeux de Daryl. La jeune femme revient a elle dans un hôpital tenu par quelques policiers portant toujours l’uniforme malgré la fin de la civilisation. Elle apprend qu’elle fut retrouvée sur la route, agonisante, et qu’elle fut ramenée afin d’être soignée… Et de contribuer à la vie collective de ce nouveau groupe. En effet, les membres de cette communauté sont ici en dette de leur survie et de leur protection par les forces de l’Ordre, et doivent travailler afin de rembourser, puis mériter une telle faveur.
Pour l’officier Dawn Lerner, la responsable, c’est une façon de garder en vie le monde tel qu’il était autrefois, et un espoir pour reconstruire un nouvel avenir. En réalité, il s’agit bien entendu d’un régime totalitaire où il faut obéir sous peine de torture ou de mort. Beth va découvrir a quel point certains résidents préfèrent se laisser mordre plutôt que de continuer à vivre ainsi, ou inversement à sacrifier autrui pour se protéger des conséquences d’une telle dictature. Le concept ne semble a priori avoir aucun rapport avec le troisième volet de la plus grande saga zombie de tous les temps, et pourtant…
Le Jour des Morts-Vivants mettaient en scène un groupe de militaires et de scientifiques (comparable aux policiers et médecins dans l’épisode) vivant reclus dans une ancienne base militaire. La personne en charge, un certain Major Cooper, a fini par trouver la mort et se fait remplacer par le Capitaine Rhodes, un véritable tyran. Ici nous avons Dawn (Rhodes) qui prend la tête de la communauté après la mort de son supérieur Hanson et fait régner la terreur. Son bras droit est un homme mauvais, un connard qui passe son temps a faire des blagues salaces et a fantasmer sur les résidentes du QG. Rhodes avait Rickles et Steele, deux soldats vulgaires qui n’hésitaient jamais a faire des avances a l’héroïne du film, Sarah.
Comptons également ce toubib a priori sympa qui prend Beth sous son aile, représentant des scientifiques et qui m’évoque beaucoup Fisher par son comportement et même son apparence. Enfin le seul véritable ami que la jeune femme se fait, et sur qui elle peut définitivement compter, est un civil qui, comme elle, s’est retrouvé embrigadé de force et doit maintenant servir le groupe pour survivre. Exactement comme Sarah qui ne trouvait finalement amitié, réconfort et sécurité qu’avec deux amis pilotes d’hélicoptère et simples civiles également ! Ce n’est pas un hasard si c’est avec eux qu’elle s’évade finalement, dans une séquence inoubliable où les héros doivent grimper le long d’un silo a missile pour rejoindre la surface. Ici Beth et son compagnon doivent au contraire descendre dans les profondeurs d’une cage d’ascenseur pour rejoindre, tout en bas, un passage les menant vers l’extérieur…
Limite honteux. La seule raison pour laquelle je ferme les yeux, c’est parce qu’on se retrouve malgré tout avec un épisode rythmé et qui parvient a mettre en place tout ses éléments en 40 minutes, là où d’ordinaire The Walking Dead ne se prive pas pour s’étirer interminablement et gagner ainsi plusieurs semaines de diffusion sans rien avoir a raconter. Autre point positif, avoir placé l’hôpital en plein centre ville et donner un visuel plus urbain a l’ensemble. Autant dire que ça nous change de la sempiternelle forêt, c’est assez rafraichissant.
Du reste ce n’est quand même pas bien brillant. Le bâtiment se limite a un simple couloir et deux pièces (le Terminus, avec son unique hangar, avait l’air plus vaste !) et les figurants représentant les policiers et les internes sont à peine visible, donnant souvent l’impression que la communauté se limite a cinq ou six personnes grand maximum. Quant a l’écriture, c’est toujours aussi risible. Il faut voir le flic pervers faire du rentre-dedans a Beth, utilisant une petite sucette qu’il lui colle de force dans la bouche en guise de métaphore sexuelle. On voudrait en faire une parodie qu’il faudrait a peine changer les dialogues. Quant a Dawn, elle va faire un bien triste antagoniste tant elle se montre antipathique. En fait dès sa première apparition, le personnage pourrait porter une pancarte lumineuse avec le mot « méchante » au-dessus de la tête que ça ferait le même effet, et si on peut arguer que Rhodes était loin d’être subtil dans son genre, au moins son acteur Joe Pilato avait un charisme incroyable et une capacité a se montrer tellement odieux qu’on en redemandait. Dawn, elle, est juste pathétique avec ses grands yeux ronds et sa vision étriqué du monde.
Le pire c’est que je sens que le scénario va tenter d’en faire une personnalité complexe, genre rongé par le désire de sauver le monde mais sans parvenir a contrôler les foules correctement. Un peu comme cet hilarant épisode qui montrait le Gouverneur tel un super-héros défendeur de la veuve et de l’orphelin alors qu’il n’était qu’un psychopathe complètement à la masse. Vivement.
Il est clair que Dawn et l’hôpital vont former le nouvel ennemi, l’adversaire a abattre cette saison ou la prochaine. Preuve en est l’apparition de Carol en fin d’épisode, amené sur un brancard alors que Noah est parvenu a s’échapper. Il est évident que Daryl l’a retrouvé et va l’intégrer a la troupe de Rick, son témoignage allant servir a motiver nos héros pour aller sauver Beth et Carol. Mais j’ai franchement du mal a comprendre pourquoi le showrunner essaye de nous vendre cette nouvelle menace a la place des cannibales qui auraient pu permettre pas mal de débordements glauques. Car honnêtement, Team Dawn n’est rien d’autre qu’un double négatif de Team Rick. Son doppelgänger. Et ce concept, en plus d’être un véritable stéréotype, n’a rien de très engageant.
Réfléchissez-y, pratiquement chaque héros possède son pendant maléfique. Celui qui lui ressemble mais qui a choisi une autre voie. Captain Marvel a Black Adam, Flash a son Reverse-Flash, Spider-Man avait Venom et Max Rockatansky était a deux doigts de finir comme Humungus dans Mad Max 2. Bon sang, même Myster Mask avait son Sinister Mask et Captain Planet son Captain Pollution ! Ici Rick, un ancien homme de Loi ayant abandonné l’uniforme depuis longtemps, va faire face a une femme qui porte encore le badge comme si cela lui donnait un semblant d’autorité. L’un s’est opposé a son partenaire, Shane, au point de se battre contre lui et ses idées tandis que Dawn laisse son second faire comme il l’entend, en sachant très bien ce que cela implique. Team Rick s’entre-aide et fonctionne par le respect mutuel, chez Team Dawn on se retrouve redevable de la moindre nourriture et nuit passé sous un toit, et il faut travailler sans discuter pour rembourser une dette assez obscure.
Pour ne rien arranger les choses, les deux groupes partagent un but commun. Abraham est persuadé de pouvoir sauver le monde et ramener la civilisation a ce qu’elle était auparavant, et Dawn croit dur comme fer que la société va revenir un jour où l’autre et qu’il faut continuer autant que possible a agir dans ce sens. Je ne reviendrai pas sur la stupidité monumentale du concept car je me suis déjà prononcé dessus, et qu’il apparaît claire que les scénaristes préparent quelque chose sur le long terme. J’ose simplement espérer qu’ils vont jouer sur les failles de leurs personnages, et leur besoin de croire a un avenir meilleur, et ne pas établir ces idées comme étant légitimes et parfaitement sensées.
Je me contenterai de faire des suppositions a plus court terme et de déduire que Beth va s’affirmer et se rapprocher de plus en plus de la Andréa du comic-book: une adolescente blonde au visage couvert de cicatrices, autrefois innocente et désormais implacable. La dernière où elle remet le médecin face a son crime, sans ciller, avant de s’emparer d’un scalpel afin de se faire justice me semble plutôt clair quant aux intentions des scénaristes. Mais pour voir ça il va falloir attendre car la semaine prochaine l’épisode se focalise apparemment sur Abraham. En attendant, Slabtown nous aura quand même permis de voir une belle amputation chirurgicale sans anesthésie et une artère carotide être arrachée a coups de dents. C’est toujours ça.
// just before writ //
Le soin que tu met comme toujours a très méticuleusement analyser et retranscrire ton point de vue, avec sincérité et qualité me force a lire cet article jusqu’au bout ,avec le respect que cela induit . Mais je partage pas la radicalité de ton discours .Pas sur le fond ou effectivement le remakage Roméroté ne m’avait pas échappé .mais parce que effectivement la série entière, depuis le premier épisode, est articulée entièrement sur du rebootage voire même du pompage aux morts vivants de roméro , mais pas seulement …Hélas depuis Eisenstein , Keaton , Chaplin , Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack , Karl Freund …les réalisateurs ne peuvent plus « créer » ou « inventer » sans qu’irrémédiabelement on soit renvoyés a du « déjà » vu mais si cela est parfois subbjectif ou subliminal .Alors pour une série TV qui plus est étirée sur déjà 5 saisons , sur ce théme , on ne pouvait pas s’attendre a autre chose que retomber dans du vu et revu . Mais pour autant tout en respectant ton point de vue , je rajouterai que , justement , au regard du théme les scénaristes font preuve , meme dans leur pompage les plus criards ,d’un sens de la mise en scéne et du twist end , d’une certaine imagination que je ne leur prêtai plus depuis…x files (déjà un sacré pompeur ) . Et je trouve cela particulièrement couillu dans le mode aseptisé de l’Entertainment…bravo quand meme (le quand meme , c’est le fan de la série qui le rajoute) pour ton travail . sans rancune
Tout d’abord, merci de m’avoir lu jusqu’au bout même si nous ne partageons pas le même avis. C’est sympa et ça donne confiance dans l’idée que je peux écrire un minimum correctement 🙂
Ensuite, et bien aucun problème et je comprends ce que tu veux dire. Le fait est que, même si je suis assez cinglant avec la série je comprends tout à fait que l’on puisse la trouver intéressante ou bien foutu. Je suis capable de reconnaître lorsqu’ils font un bon boulot et je ne manquerai pas de le préciser si un futur épisode remporte mon adhésion. Après c’est juste mon avis, je trouve qu’il y a beaucoup de facilité dans les choix scénaristiques et que certains sont tellement simple que je me sens un peu offensé en tant que spectateur, mais c’est juste un simple point de vue. Et crois-moi, je préfèrerais amplement pouvoir y trouver mon compte chaque semaine.
Maintenant comme je l’avais déjà expliqué, ce n’est pas juste la série télé et j’ai le même truc avec la BD dont j’ai fini par abandonner la lecture en cours de route. J’y retourne de temps en temps mais pour moi, c’est juste pas possible. Ça tourne en rond et ça a perdu de sa force depuis longtemps. Dans l’un comme dans l’autre, j’ai du mal, mais c’est comme ça.
Cela étant dis, je suis entièrement d’accord pour dire qu’ils osent parfois soulever des moments forts, des problématiques intéressantes, mais selon moi l’exécution est juste maladroite. Des réalisateurs plus impliqués, des scénaristes plus soucieux, ou peut-être juste des producteurs moins cons, et ça pourrait devenir *vraiment* bien.
Quant au gore et aux maquillages je n’ai rien a dire là-dessus. Plastiquement c’est irréprochable et ça surpasse aisément des tas de films, petits ou moyens budgets (voir gros budgets, je prends Walking Dead sans problème face a World War Z) et ce côté est l’aspect le plus positif, l’un de ceux qui me pousse a continuer a regarder.
Sans rancune aucune, et j’aimerai pouvoir écrire un article enthousiaste prochainement. Peut-être quand Daryl reviendra sur le devant de la scène !