Qu’est-ce que Creepozoids ?
Un film de David DeCoteau, réalisateur “légendaire” de séries B ayant roulé sa bosse dans le fantastique, l’horreur et le porno gay. Sa réalisation compte parmi les plus célèbres des clones d’Alien, sortant du lot grâce à quelques créatures mémorables, une musique type synthé-disco et la présence des seins de Linnea Quigley. En fait il fut un temps où Creepozoids était le film le plus emblématique de sa filmographie, la chose ayant fait sa petite vie dans les vidéo-clubs grâce à son titre amusant et ses séduisantes illustrations de jaquettes. DeCoteau y reviendra constamment tout au long de sa carrière d’ailleurs, ses protagonistes regardant le film à la télévision (Sorority Babes in the Slimeball Bowl-O-Rama, Dr. Alien, Killer Eye), utilisant le mot “creepozoid” comme une insulte (Alien Arsenal) ou affichant le poster dans leur chambre (Nightmare Sisters) quand celui-ci n’apparait pas dans le hall d’un cinéma (Blonde Heaven). Bref, Creepozoids a marqué son réalisateur comme ses spectateurs de l’époque, accédant au statut de film culte avec le temps. Ce qui est plutôt amusant tant celui-ci n’était pas un “bon” DeCoteau, contrairement à quelques perles comme Puppet Master III ou Sorority Babes qui lui sont supérieurs en tout point. Toutefois au regard de ce que nous livre désormais le bonhomme, avec des trucs comme A Talking Cat !?! ou Bigfoot vs. D.B. Cooper – des aberrations vidéos tellement affligeantes qu’elles frôlent l’arnaque pure et simple et ne peuvent techniquement être qualifiées de films – Creepozoids fait désormais office de produit compétent et regardable, et s’apprécie du début à la fin.
Qu’est-ce qu’un Creepozoid ?
Autant le dire de but en blanc, il n’y a pas de secret: c’est juste un gros monstre. Le Xénomorphe de service, qui n’est pas ici de nature extraterrestre mais un simple mutant ayant vu le jour accidentellement suite à une expérimentation génétique ayant mal tournée.
Mais qu’est vraiment le Creepozoid ? Sa nature exacte, sa fonction, ses origines ? Qu’est-ce qui le différencie de tous ses cousins aliens de série B ? D’ordinaire la question ne se pose pas dans le cadre d’un film où l’intérêt est de voir une grosse bestiole dévorer le casting, et l’explication des évènements est des plus simples, voir oubliable. Ici pourtant, c’est comme si le scénario distribuait des indices ici et là que le spectateur devrait relever et remettre dans l’ordre afin d’obtenir la véritable histoire derrière les évènements de Creepozoids. C’est l’accroche du film qui m’a toujours interpellée: “Les Aliens ont disparus… Les Creepozoïds arrivent…”, en fait une mauvaise traduction de l’originale, plus second degré, “Move over Aliens, here come the Creepozoids.” (Dégagez les Aliens, voilà les Creepozoids). Celle-ci ajoutait aussi un détail intéressant: “Even if you kill them, they’re still deadly.” (Même si vous les tuez, ils restent mortelles). Lorsque, enfant, je passais mon temps dans le vidéoclub du coin à reluquer les jaquettes des étagères, imaginant dans ma petite tête les films qui se cachaient derrière les affiches saisissantes et les images mystérieuses, je me demandais bien ce qu’avaient de spécial ces Creepozoids par rapport aux classiques Xénomorphes dont la réputation n’était plus à faire.
Avec la toute nouvelle édition Blu-ray du film qui vient de sortir pour fêter ses 30 ans, et pour coïncider avec la présence de l’horrible Alien: Covenant dans les salles obscures (au sujet relativement similaire, et pas que pour le côté “Alien”), j’ai trouvé que le moment était opportun pour se pencher sur la question. Qu’il était temps d’explorer le film une nouvelle fois – pas dans le cadre de la traditionnelle chronique, ce que j’ai déjà fais il y a plus de dix ans (publiée sur le site Nanarland et qui, à ma grande surprise, s’y trouve encore !), mais plus dans une logique scientifique de chercheur. Aussi, la qualité de la restauration permet dans ce cas précis d’en apprendre un peu plus sur l’intrigue. Car voyez-vous, Creepozoids a toujours été terriblement moche a regarder, avec des images parfois floues (le repaire du monstre) et plusieurs détails illisibles (les inscriptions de l’ordinateur). Ci-dessous un comparatif entre l’un des DVD français, bootleg et VHSrip amputé de plusieurs minutes, et le Blu-ray édité par Full Moon.
Mais avant d’explorer le sujet, il est nécessaire d’offrir un peu de contexte. Contrairement à la plupart des ersatz d’Alien et de ses suites, le film ne se déroule ici ni dans l’espace, ni sur une autre planète comme c’est habituellement le cas (Creature, Forbidden World, Within the Rock, Dark Side of the Moon, Shadowchaser 3, etc.), mais sur Terre. Et contrairement aux autres productions du genre se déroulant dans notre monde (Xtro II, Metamorphosis), ici l’intrigue n’a pas lieu à notre époque mais ans le futur. Le futur de 1998, ravagé par une guerre nucléaire. S’il ne s’agit que d’un décors permettant de facilement mettre en place les personnages en face du monstre, celui-ci possède un poids sur le déroulement des évènements puisqu’il forme le point de départ de toute l’affaire. Ainsi en 1992 (là encore le futur du point de vue du film, réalisé en 1987) les superpuissances s’engagent dans un échange nucléaire dévastateur qui va détruire la planète et entrainer l’humanité dans un conflit qui existe encore six ans plus tard. Le monde, nous explique t-on, n’est plus que désolation: les villes sont en ruines, le paysage est un wasteland à la Mad Max, et lorsque les survivants ne continuent pas à se battre au nom d’une guerre qui ne veut plus rien dire (nombreux sont les déserteurs), ils forment de petits groupes devant échapper à des pluies acides mortelles et à des “nomades mutants” que l’on ne verra jamais.
Parmi les autres détails que l’on peut glaner sur cette situation apocalyptique, c’est que l’Armée (celle à laquelle appartenaient les personnages) utilise du gaz mortel sur les champs de bataille, exécute les soldats qui n’obéissent pas aux ordres ou les places en première ligne, signifiant une mort assurée, et semble garder l’œil sur ses possessions. Pas étonnant que les héros choisissent de foutre le camp et c’est au cours de leur fuite qu’ils tombent sur un bâtiment abandonné. A priori un bon refuge vu les ressources qu’il contient, jusqu’à ce qu’ils farfouillent un peu et tombent sur… les Creepozoids ! Le reste de l’histoire m’intéresse moins que la vérité derrière ce laboratoire ultra secret et les expériences qui y ont été commises. Si l’intro du film montre une laborantine être bouloté (hors champ) par un pseudo Xénomorphe, tout le reste passe à la trappe par manque de temps, d’argent et de talent. Il faut dire que le premier jet du scénario a été pondu en environ une demi-heure, et qu’après quelques révisions (dont certaines en cours de tournage, l’écrivain David Eisenstark, alias Burford Hauser, reconnaissant que le dernier acte du film ne correspond en rien à celui qui figurait dans les deux versions du script qu’il a produit avec DeCoteau) le tournage n’a duré que deux semaines. Allez faire quelque chose de parfaitement cohérent dans ces conditions !
Le résultat fait un peu penser à certains jeux vidéos comme les Resident Evil, où au-delà de la mission à effectuer, le joueur peu explorer les lieux et découvrir différents documents qui épaississent un peu le background des personnages ou des faits. Quelque chose d’optionnel mais d’amusant à faire une fois la première partie terminée. C’est exactement le même procédé avec ce film, où l’on peut lire quelques entrées numériques dans un vieil ordinateur et extrapoler sur des images et des dialogues afin de comprendre un peu mieux ce qui s’est passé.
Tout commence avec la guerre nucléaire et ses horribles conséquences. La planète est mourante, l’humanité dépassée et le Gouvernement (clairement indiqué comme une entité séparée de l’Armée au détour d’une conversation) tente le tout pour le tout afin d’assurer la survie de l’Homme. Sous le nom de “Research for a Better Tomorrow”, un projet scientifique est mis en place afin d’améliorer le code génétique de l’espèce humaine et lui permettre de survivre quoiqu’il arrive. Aucune date n’est donnée et on ignore exactement quand l’opération fut lancée, mais on peut la situer approximativement durant le milieu du conflit: assez longtemps pour que les pluies acides commencent, mais des années avant que les protagonistes du film ne pénètre dans le bâtiment. Le laboratoire est construit à 400 miles de New Los Angeles et, en 1996, il n’y a personne de joignable à proximité. Une évidence considérant la classification top secrète de la mission et le fait que l’endroit fut développé comme une unité de confinement, afin de s’assurer que le résultat des expériences ne puisse pas s’échapper dans la nature.
A partir de là, et vu la présence de cages pour cobayes, il semble évident que les scientifiques savaient qu’ils allaient jouer avec des substances dangereuses ou fabriquer des mutants. Le terme “biomédical” est d’ailleurs employé par l’un des savants pour décrire ses travaux, ce qui encore une fois n’est pas sans renvoyer à Resident Evil et aux laboratoires d’Umbrella. Ici ce sont les acides aminés qu’étudie l’équipe, qui sont décrits comme des “building blocks for Life”. Petite leçon de biologie:
Les acides aminés sont le fondement de tous les processus vitaux, car ils sont absolument indispensables à l’intégralité des processus métaboliques. Leur tâche principale consiste à assurer le transport optimal ainsi que le stockage optimisé de toutes les substances nutritives (c.-à de l’eau, des lipides, des glucides, des protéines, des minéraux et des vitamines). La plupart des maladies liées au style de vie moderne telles que l’obésité, un taux élevé de cholestérol, le diabète, l’insomnie, les dysfonctions érectiles ou bien encore l’arthrite sont attribuables à des troubles métaboliques de base. Il en est de même pour la perte de cheveux, tout comme pour la formation accentuée de rides. (www.acides-amines.com)
Sur une liste figure d’ailleurs ceux que le corps humain ne peut pas produire de lui-même. Via manipulations génétiques, les chercheurs essayaient d’améliorer l’organisme afin de lui permettre de survivre sans avoir besoin de nourriture – ressource forcément en perdition alors. Ce que le film ne dit pas, c’est qu’améliorer le métabolisme permettrait aussi de d’empêcher le vieillissement, d’accélérer la guérison et probablement d’adapter progressivement le sujet à son nouvel environnement. Rien ne le confirme techniquement, mais cela va dans le sens des mutations développée chez le Creepozoid principal, particulièrement dans un monde dévasté par la radioactivité qui a déjà engendré ses propres monstres (les nomades évoqués dans l’intro). En clair, voici réponse à ma question: le Creepozoid, c’est l’homme de demain sur une planète détruite par une guerre nucléaire. Un monstre pouvant survivre sans nourriture, sans eau, dans un environnement contaminé. Une créature à l’épreuve du temps (logique vu les années qu’il faut au nucléaire pour se dissiper) et pouvant endurer de graves blessures. Évidemment il faut le payer de son apparence et sans doute de son raisonnement, quoique des traces d’intelligence persistent, et même dans le cadre d’un essai concluant sur un cobaye, il y a peu de chance pour que le Gouvernement n’approuve une formule transformant les humains restants en véritable arme biologique.
Et effectivement, jamais le projet n’arriva à terme. Car la naissance du Creepozoid est involontaire, du moins dans le cadre des recherches. A travers le journal personnel d’un Michael Lugano, scientifique, on peut rapidement voir ce qui a dégénéré: le facteur humain, sous stress. Dans une série d’entrées inscrite entre le 12 Octobre et le 18 Novembre (année inconnue), on peut en déduire que ce sont les conditions de vie difficiles qui ont provoquées l’accident. Au 12 Octobre, alors qu’une pluie acide traine depuis une semaine entière, Lugano explique qu’un climat de paranoïa s’est installé depuis le succès d’une expérimentation. La sécurité a été renforcé et les employés ne peuvent plus quitter le bâtiment. Le 13 Octobre il se plaint de la promiscuité, avec l’arrivée de personnel supplémentaire. Les communications avec New L.A. sont limitées et le savant en vient à dire que la situation actuelle tient plus de l’ingénierie sociale que du biomédicale – ce qui indique qu’il se sent exploité par le Gouvernement. 15 Octobre. L’entrée est un peu difficile à considérer puisqu’il y a une différence entre ce qui est écrit à l’écran et ce que lit l’acteur durant la scène. Mettons ça sur le compte du petit budget du film. Mais grossièrement Lugano devient paranoïaque à son tours, sauvegardant son journal sur une disquette qu’il cache dans une étagère, avant de paniquer lorsqu’un de ses collègues – Bennet – traine autour de celle-ci. Étant donnée qu’il s’agit d’une bibliothèque quelconque avec quelques ouvrages pour la détente, il est probable que cet employé ne cherchait qu’à tuer le temps, mais il n’est pas impossible non plus que celui-ci, également suspicieux, essayait de trouver le journal de Lugano…
Le plus important reste la peur panique de l’écrivain à propos d’une hypothèse: et si Bennet s’était injecté la formule sur laquelle travail l’équipe ? (« What if he were taking the stuff himself.« ). Le message est assez trouble et il est difficile de savoir ce que Lugano veut dire par « stuff », toutefois la version alternative lu par un des personnages du film va plus dans cette direction: « What if Bennet was drinking the stuff himself ?« . Une ligne rajoute qu’il pourrait même l’avoir mélangé à la nourriture pour l’absorber. Ainsi se retrouve t-on avec la forte possibilité que, devant la dégradation de la situation, un des savants a prit peur et préféré tenter sa chance avec le projet pour survivre à une éventuelle catastrophe. Bennet serait alors devenu le Creepozoid. Une hypothèse clairement confirmée lorsque le héros du film, après avoir vu le monstre, affirme qu’il devait s’agir d’un humain à l’origine. La dernière entrée datant du 18 Novembre, soit bien plus tard, vient expliquer un ce qui a entrainé la métamorphose. Parce qu’il est devenu fou ou parce qu’il a eu confirmation de ce qu’à fait Bennet, Lugano a décidé de l’assassiner. Il explique s’y être assez bien débrouillé pour que personne ne suspecte quoique ce soit, ayant réussi à effacer toutes traces de son crime malgré le sang qui fut difficile à nettoyer.
Ce qu’il a fait, comment il s’y est prit, n’est évidemment pas expliqué, mais juste sous le bureau où est posé l’ordinateur nous apprennant toute l’histoire se trouve une énorme grille d’aération. Un conduit assez grand pour qu’un humain puisse y ramper et débouchant sur une vaste pièce dont la nature ne nous est pas donnée. Dans le film, lorsque les personnages empruntent ce passage, ils se retrouvent directement dans le repaire du monstre ! On peut faire le rapprochement entre l’acte de Lugano, le fait qu’il ait caché le corps et l’emplacement du nid du Creepozoid: Bennet a été tué, a priori, mais les acides aminés améliorés étaient déjà à l’œuvre. Son assassin a caché le corps dans une pièce déserte où ne se rendent pas les chercheurs et les gardes (quid des agents d’entretien ?) mais, à son insu, l’organisme a survécu et s’est adapté à sa nouvelle condition, prenant une forme monstrueuse se faisant. Exactement comme Resident Evil avec les différents super-virus que l’on y trouve ! Et comme pour confirmer tout ça, lorsqu’un des personnages se rend à l’ordinateur pour la première fois, il découvre que non seulement la grille du conduit est décrochable (le monstre passe plus d’une fois par le passage) mais aussi qu’il y a une tête coupée juste à côté du fauteuil. Très certainement celle de Lugano, “Bennet” s’étant sans doute vengé après sa transformation…
Grâce à la qualité du Blu-ray l’antre de la bête est désormais bien plus visible, même si l’image de base reste très floue afin de camoufler le décors en carton-pâte. Dans ce qui est une reprise du paysage de LV-426 de Alien, la zone est couverte de toiles d’araignée avec ce qui ressemble à des rochers. On peut désormais clairement voir ce qui ressemble à un crâne humain ainsi qu’un bras coupé (choses qui passaient totalement inaperçue autrefois), et quiconque jette un œil au poster original comprendra que l’idée était de représenter une sorte de charnier avec tous ces ossements. Pas un garde-manger, car le monstre n’a plus besoin de se nourrir, mais plutôt un nid. C’est en tout cas comme ça que le magazine Fangoria, qui a couvert le tournage, décrivait l’endroit, et cela a beaucoup de sens étant donné la fin du film. Dans le commentaire audio, le réalisateur utilise les mots “cocon” et “sanctuaire”. C’est la revue qui, encore une fois, fournie quelques indices quant à l’utilité de ce lieu et ce qui se passe réellement en cours de film: ce nid fut fabriqué par le monstre parce qu’il s’apprête à… accoucher ! Une idée folle mais qui, là encore, fonctionne si l’on part du principe que l’expérience de base visait à perpétuer la race humaine. Même si quelques personnes se transforment en Creepozoids et survivent, cela marque quand même l’arrêt de l’espèce sur le long terme. Il faut donc qu’il y ait reproduction pour qu’il y ait survie, et croyez-le ou non mais cela explique même quelques incohérences du film à propos du comportement du monstre.
“I don’t think it wants to kill” (je ne pense pas qu’il veut tuer), dira le héros qui par deux fois est assommé et capturé par le Creepozoid. Celui-ci le ramène dans son nid sans le blesser, comme s’il planifiait quelque chose avec lui, et lorsque l’héroïne vient l’y chercher pour la seconde fois, la créature la tue immédiatement (ce qu’elle ne faisait pas jusque là), visiblement très contrariée qu’on lui enlève sa proie. Elle essaye tout simplement de se reproduire, et si l’idée qu’un monstre mâle enlève un autre homme afin de s’accoupler avec lui vous semble absurde, rappelez-vous de deux choses: 1) mutations génétiques, 2) David DeCoteau est homosexuel et travailla dans le porno. Pour résumé les faits après la transformation de Bennet: le personnel du laboratoire fut attaqué par le Creepozoid, celui-ci utilisant les conduits d’aérations pour se déplacer, amenant à la mort de plusieurs employés comme décrit dans la scène d’intro. “I just think they left in a hurry” (je crois qu’ils se sont dépêchés de partir) déclare un protagoniste devant l’état des lieux. On peut ensuite supposer que les survivants ont trouvé la mort à l’extérieur d’une façon ou d’une autre, expliquant pourquoi le Gouvernement n’a pas fait d’enquête, sans doute trop préoccupé par la guerre en cours. Désormais seule, la créature a poursuivit ses tentatives de reproduction jusqu’à y parvenir, même s’il lui faut visiblement plusieurs années pour arriver à terme (pas vraiment pratique pour aider à la repopulation).
Parmi les détails que l’on peut relever dans le film, la présences de cages pour animaux, présumablement les cobayes, trouées et pleines de sang. Plus tard seront découvert quelques rats mutants, infectés et très agressifs, s’attaquant aux protagonistes. On peut assumer que ces bestioles sont probablement le résultat des tentatives du Creepozoid pour se multiplier en attendant l’arrivée d’humains plus convenables. De manière amusante, on peut même repérer la présence de plaies sur le corps des rongeurs, comme de petites morsures ou blessures. Certes il pourrait s’agit d’un effet sanglant conçu par les responsables des effets spéciaux pour rendre les rats plus dégoutants, mais cela cadre avec le fait que le mutant doit injecter une substance à un hôte pour le transformer. C’est une gelée noire qu’il peut cracher, à la manière de l’acide des Xénomorphes, et que l’on retrouve aussi dans les conduits où il traine. Une substance qui corrompt et doit porter son code génétique, modifiant ainsi l’organisme ciblé. L’analyse de victimes (un des protagonistes du film, mais aussi une momie retrouvée pendue en une sorte de cocon, certainement un des premiers essais de conversion) montre qu’ils auront développés un fort taux de protéines, comme si les acides aminés génétiquement modifiés s’y développaient. Dans tous les cas cependant, la transformation sera un échec et c’est peut-être pour cela que le Creepozoid finira par donner naissance lui-même a un petit rejeton…
Lorsque le film débute, il s’attaque aux protagoniste mais ne les tue pas directement. Jesse découvre son antre et le dérange: il se réveille le lendemain sans souvenir de la confrontation et cela permet à DeCoteau de rejouer la scène du repas d’Alien. Ici, le liquide noir du monstre lui sort par tous les pores de la peaux et sa main montre un début de métamorphose avant le décès. Pourquoi cet échec ? Parce qu’il était entrain de… manger ! Overdose de nutriments. Butch est lui aussi capturé par la bête et ramené au nid, aspergé par le liquide, mais il fini par fondre, le visage complètement rongé, plutôt que de se transformer. Pas d’explications véritables, le film avait juste besoin d’une scène horrifique de plus et de se débarrasser du personnage, mais on peut théoriser sur le fait qu’il ait été mordu par l’un des rats mutants un peu avant. Comme le montre le sort réservé à l’un des personnages féminins, elle aussi blessée par un rongeur, cela entraine également une transformation du métabolisme. Butch, mordu, est déjà infecté, et le rajout de substance par Bennet détruit irrémédiablement son organisme. Enfin Jake est capturé plus d’une fois, même s’il en réchappe miraculeusement, et la personne lui portant secours sera éliminée par le Creepozoid sans doute un peu contrarié.
Plutôt ironique que les seuls humains a être correctement converti le sont par accident, Bennet étant assassiné et Kate ayant été infectée par un des cobayes. Celle-ci montrera des signes de métamorphoses et d’agressivité, ressemblant à une sorte de Deadite tiré de Evil Dead avant d’être supposément tuée lors d’un combat contre une ancienne camarade. Dans tous les cas les Creepozoids apparaissent comme très vulnérable puisque détruits par des moyens conventionnels ou par un mauvais dosage d’acides aminés. A ce titre, Bennet finira de la même manière que Jesse lorsque son ultime proie lui injectera par seringue un surplus d’alimentation. C’est quelque chose que le Blu-ray permet désormais de mettre en avant, tant les anciennes versions du film avaient une image trop sombre pour que l’on ne distingue quoique ce soit durant cette scène. On sait désormais que le monstre se fait injecter de l’Isoleucine, une protéine qui n’est pas produite par le corps humain et ne s’obtient que par alimentation. Un gros: de la nourriture. Le mutant ne supportera pas cette overdose et périra pour de bon… libérant alors sa progéniture qui patientait tout ce temps dans son cerveau ! Car oui, l’idée démentielle de Creepozoids, et difficile à voir à l’écran à l’époque, c’est que le petit monstre qui éclot de la carcasse dans la conclusion du film ne s’extrait pas du ventre de la bête, mais de sa tête !
On peut désormais clairement voir le dôme transparent du crâne se briser en tombant au sol, et la petite créature en émerger ! Cela rend encore plus fou la présence du cordon ombilical. Quoiqu’il en soit voilà le petit Hector, premier Creepozoid produit naturellement. Son nom n’est évidemment pas prononcé dans le film, mais c’est ainsi que l’équipe le surnommait lors du tournage. La chose conserve une apparence vaguement humaine, David DeCoteau ayant voulu rendre hommage à l’excellent It’s Alive. Comme dans celui-ci, le bébé possède des yeux maléfiques, des crocs aiguisés et un instinct meurtrier qui le pousse à attaquer aussitôt qu’il peut ramper ! Sa peau trahit également sa nature d’hybride, mélangeant l’épiderme humain avec celui d’un monstre visqueux. Malgré sa petite taille et sa jeunesse, Hector est capable de traquer sa proie dans une zone sombre et désavantageuse par rapport à son physique, bondir et attaquer comme une bête sauvage. En fait il est très probable que ce Creepozoid puisse tuer un homme dès ses premières heures, si ce n’était pour son cordon ombilical que le protagoniste utilisera pour l’étrangler ! Pour autant, une dernière image montre que le mutant a survécu à l’agression, prouvant une supériorité génétique et terminant le film sur un point d’interrogation qui ne sera jamais résolu. Car si le réalisateur annonça très vite un Creepozoids II, celui-ci ne vit jamais le jour…
Et c’est bien dommage car il y aurait eu matière à explorer la créature, lui donner de nouvelles aptitudes et fabriquer d’autres mutants ! Si l’on en croit l’affiche, cette séquelle nous aurait par exemple montré des insectes infectés, grandissant en taille et remplaçant les rats du premier film, le retour du bébé Creepozoid et apparemment plusieurs mutants type “Bennet” à la manière d’Aliens. En l’état il y a de toute façon beaucoup d’éléments qui ne sont pas explorés ou expliqués, comme la façon dont est né Hector par exemple, et pourquoi le Creepozoid principal continue de vouloir convertir les humains s’il doit déjà gérer son accouchement ? On peut également se demander pourquoi Jake est sans cesse capturé et gardé sain et sauf dans le nid quand le monstre contamine les autres humains. Désirait-il se reproduire avec lui afin d’obtenir un autre bébé plus naturel ? Si les Creepozoids n’ont plus besoin de se nourrir et qu’un aliment provoque une rupture de leur métabolisme, quelle est l’intérêt de leur donner une bouche ? La métamorphose n’aurait-ell pas dû remplacer celle-ci par un système de défense plus approprié ? Et si les mutants sont le résultat d’accidents et de modifications génétiques, pourquoi ce nom de “Creepozoids” ? Que signifie t-il ? Et bien terminons au moins cet article en répondant à ces deux dernières questions !
Il se trouve que le script original, signé Will Schmitz, s’intitulait à l’origine Mutant Spawn 2000. Celui-ci était totalement différant et s’éloignait du schéma d’Alien au profit d’un extraterrestre un peu plus vicieux qui injectait un venin à ses proies. Une substance excitant le centre du plaisir dans le cerveau et provoquant un orgasme aux victimes alors qu’elles se font dévorer ! L’histoire fut entièrement réécrite pour produire un film plus standard mais le titre est resté. En parallèle, David DeCoteau souhaitait absolument tourner un film type Ghoulies avec de petites créatures causant des problèmes. Pas de script, pas d’intrigues, juste un titre: Creepozoids. Un nom sans signification mais inspirée de la chanson Freak-A-Zoid du groupe Midnight Star. C’est Charles Band qui, validant Mutant Spawn 2000, demanda au metteur en scène d’utiliser le titre Creepozoids à la place, plus amusant et agréable à l’oreille. Par pur hasard celui-ci fonctionne quand même puisque le mot “creep”, dont l’une des traductions possible est “ramper”, se retrouve un peu dans le mutant principal du film. En effet les créateurs du costume se sont inspiré de l’excellente créature de Xtro, particulièrement de la scène où elle s’échappe de la forêt, et ont fabriqué un costume où les pieds et les jambes arrières sont… à l’envers ! Si le mutant est rarement montré de plein-pied à la caméra, il reste quand même quelques images de lui où il apparait à quatre pattes, devant donc ramper pour se déplacer. Même chose pour Hector qui ne sait pas encore marcher.
Enfin, et pour dynamiter tout cet article qui repose sur l’idée que c’est le dénommé Bennet qui fut assassiné et transformé en Creepozoid, on peut relever le fait que l’équipe du film avait baptisé leur monstre Zelda durant le tournage. Un faux nom, comme pour Hector avec le bébé, seulement voilà: parmi la liste des employés travaillant sur le projet scientifique, on retrouve en tête une certaine Zelda Bernard. Faut-il croire que c’est cette personne qui est censée être le monstre ? Après tout Lugano était paranoïaque et il s’est passé un certain temps entre ses suspicions à l’égard de Bennet et son passage à l’acte. De plus une des entrées de son journal présente des modifications lorsque lu à voix haute par un des personnages, comme si DeCoteau avait voulu changer quelques détails. Si la créature est en fait femelle, cela expliquerait un peu mieux comment elle a pu tomber enceinte et pourquoi elle cherche à capturer un homme pour se reproduire. Ainsi que sa “jalousie” lorsque Linnea Quigley tente de le secourir. Voilà qui demanderait une toute nouvelle enquête, même si hélas aucune information sur le sujet ne semble exister. Ni dans le commentaire audio pour la sortie Blu-ray, ni dans le livre It Came From the 80s ! qui relate la genèse du film. Étant donné le type de production qu’était Creepozoids, je doute même que quiconque se souvienne de quoi que ce soit à ce propos…
Peut-être aurai-je plus de chance en réexplorant Hybrid, un quasi remake réalisé en 1997 par Fred Olen Ray. Cette fois la bête y était clairement un mâle et violait sans aucune subtilité Brinke Stevens afin d’obtenir une descendance. Mais j’attendrai d’abord qu’un Blu-ray anniversaire fêtant les 20 ans de cette perle puisse voir le jour, des fois que cela améliore quelque chose…
Encore un super boulot hyper détaillé sur ce petit film de monstres que je me souviens avoir vu il y a très longtemps (tu sais que je ne possède pas ta mémoire et ta culture cinématographique sur le sujet). J’ai lu tes théories attentivement et elles se tiennent. Comme tu l’écris, tu es peut-être le seul a avoir été si loin mais cette anecdote sur le vrai-faux nom du monstre est un sacré indice. Et bravo à toi pour avoir exhumé un des moins pires DeCoteau du lot (ça me rappelle une discussion…) 😉
Eh, merci ! 😀
Oui j’ai justement pensé à cette discussion pendant toute la rédaction. Autrefois Creepozoids était un mauvais film, maintenant c’est du haut niveau, faut bien le souligner.
« J’ai lu tes théories attentivement et elles se tiennent. »
Très heureux que tu me démontes pas ! 😀