Oui, il était encore vivant. Une sorte d’effet Mandela laisse à beaucoup l’impression qu’il s’était éteint depuis belle lurette, mais M. Emmet Walsh a été actif jusqu’au bout malgré une présence de moins en moins remarquable vu son grand âge. Celui que Roger Ebert surnomma le “poet of sleaze” débuta sa carrière dans les années 60 et c’est sur les scènes de théâtres qu’il fit ses premiers pas, jusqu’à la consécration en 1969 où il joua à Broadway avec Al Pacino dans une pièce intitulée Does a Tiger Wear a Necktie ? Après cela il fit un peu de figuration au cinéma (Macadam Cowboy et Little Big Man, excusez du peu) et aterna avec régularité entre le grand et le petit écran, travailla avec les plus grands et tapant dans à peu près toutes les catégories. Il retrouva Pacino sur Serpico, tourna avec Morgan Freeman et John Lithgow dans La Mort N’a Pas de Couleur, Christopher Lloyd dans Camp Nowhere, des orques dans Sauvez Willy 2 et Leonardo DiCaprio dans Roméo + Juliette. Kevin Spacey l’engagea sur son Albino Alligator avec Viggo Mortensen et une Faye Dunaway, et on le retrouve aussi en sandwich sur Le Droit de Tuer ? avec Samuel L. Jackson, Matthew McConaughey et Sandra Bullock, ainsi que Un Noël de Folie ! avec Tim Allen, Jamie Lee Curtis et Dan Aykroyd.
A cela se rajoute ses apparitions dans les séries les plus connues, de Starsky et Hutch à NYPD Blue en passant par La Petite Maison dans la Prairie, mais bien sûr tout ceci ne represente qu’une facette de sa carrière. Car M. Emmet Walsh reste surtout connu de ceux qui versent dans les films de genre, préférant la science-fiction, le crime drama et la série B de vidéoclub au vernis hollywoodien. Et là aussi le bonhomme se diversifia, donnant de lui-même sur tous les types de productions, de la plus grosse à la plus modestes. Citons bien sûr Blade Runner et sa collaboration avec les Frères Coen sur Blood Simple et Raising Arizona, sans doute les titres les plus prestieux de sa filmographie, et restons dans les hautes sphères de l’industrie avec le blockbuster Wild Wild West, le magnifique Le Géant de Fer, et – un peu oublié désormais – ce monument des eighties qu’était Bigfoot et les Henderson. Il est même dans La Planète des Singes avec une apparition éclair dans Les Évadés de…, et il participa à la pop-culture moderne en prêtant sa voix à des personnages de show comme Quoi D’neuf Scooby-Doo ? et Adventure Time. Et puis bien sur il y a le reste, les mal aimés et déconsidérés, mais souvent responsables de notre découverte de l’acteur…
Le catastrophe(ique) Airport’ 77 avec Christopher Lee et George Kennedy, l’étrange Guerre des Abîmes, alias Raise the Titanic, où comme le titre l’indique il est question de ramener la carcasse du paquebot à la surface de l’océan. Il donne la réplique à Chuck Norris dans Portés Disparus et à Dolph Lundgren dans Le Scorpion Rouge, deux clones de Rambo II se déroulant respectivement dans la jungle et dans le désert. C’est aussi là où il trouve Bruce Campbell et des suceurs de sang pacifistes dans Sundown: The Vampire in Retreat. Étrangement il ne rencontre aucun monstre dans Critters où il incarne un shérif qui débarque toujours trop tard, ce qui coûte entre autre la vie à un jeune Billy Zane. Néanmoins il croise le chemin de Michael Ironside dans le thriller Objectif Meurtre, et de Ronny Cox (le vilain de RoboCop) dans Marathon Killer, un survival méconnu où traine aussi Art Hindle. Il côtoie un Jim Belushi psychotique dans l’excellent Rétroaction, road movie où une journée meurtrière se répète en boucle grâce à une machine temporelle expérimentale, et fait partie du casting quatre étoiles de l’horrible Roi Scorpion 4 en compagnie de Don “The Dragon” Wilson, Lou Ferrigno, Michael Biehn et Rutger Hauer.
Question télé c’est pareil, et on a pu le voir dans un tas d’anthologies fanastiques / horrifiques entre les années 80 et 2000: Au-Delà du Réel – L’Aventure Continue, Histoires Fantastiques, Night Visions, le revival de La Quatrième Dimension (appelé… La Cinquième Dimension !), le rare mais atmosphérique Voyageur, et bien sûr Les Contes de la Crypte avec l’inoubliable Collection Complete, où il fini empaillé par son épouse. Mentionnons aussi The X-Files et l’épisode réalisé par Mulder lui-même, à propos d’un extraterrestre qui resta sur Terre par amour du Baseball. Bref, M. Emmet Walsh aura laissé sa marque et demeure encore à ce jour l’un des seconds couteaux les plus mémorables de son temps. Il tourna jusqu’à la fin, avec ce Outlaw Posse du revenant Mario Van Peebles sorti ce mois-ci, et il aurait sans doute continué s’il n’avait pas succombé à un arrêt cardiaque juste trois jours avant son 89ème anniversaire. Il nous laisse avec une importante liste d’oeuvres à revisiter, et on ne risque pas d’oublier de sitôt sa contribution au cinéma, quelle que soit la période, quel que soit le budget, quel que soit le genre.
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