Frénésie

FRÉNÉSIE

 

    Idiote. T’es qu’une idiote ma belle. Sinon tu serais pas là, prisonnière des bras de cette chose monstrueuse qui fut autrefois une femme. Sinon tu serais pas là, à essayer d’esquiver cette mâchoire béante garnie de crocs. Sinon tu serais pas là, à souffrir et à retenir de jaillir la bête qui est en toi…
    Une seconde plus tôt, je me revois encore dans le coin sombre de l’entrepôt, à surveiller les alentours. Ah ça, je pouvais me sentir fière à me la jouer “Madame sérieuse dans le boulot” et à m’inquiéter de ces bruits de pas, alors que cela ne semblait pas choquer les autres plus que ça ! Mais au final c’est moi la bonne poire ! Très franchement j’aimerais même bien revoir ma tête lorsque cette chose est sortie de l’ombre derrière moi, lorsque sa main toute ridée et griffue s’est plaquée sur ma bouche. Et cette autre main ridée se posant sur mon ventre pour m’attirer à elle dans le noir…
    Et me voilà isolée de tous, une chaussure en moins, face à cette gueule béante qui claque juste sous mon nez. Huit crocs, j’ai tout le loisir de les compter. Elle me soulève comme un rien, me plaquant durement contre une grosse caisse de l’entrepôt, et je n’ai aucun doute quant à ses intentions. Pendant les dix minutes qui suivront, nous jouerons ensemble, moi essayant de la repousser, elle de mordre. Jusqu’à l’inévitable.
    Oh bien sûr je pourrai modifier les faits, ou tout simplement les souligner, comme le fait qu’elle et moi avions sensiblement la même force, ce qui rendait la lutte plutôt ridicule tant ni l’une ni l’autre ne parvenait réellement à avoir le dessus. Mais je ne le ferais pas. Ce n’est pas le point. Le fait est que ce n’est tout simplement pas le sujet de ce récit. Je ne suis pas une guerrière, ni une combattante, mais il s’est pourtant bien passé quelque chose cette nuit là. Le réveil d’une fureur enfouie, d’une nature vampirique m’étant encore inconnue.
    La Aswang avait plongé ses dents dans mon cou, et cela n’avait rien de comparable avec le baiser du vampire, bien plus… subtile. La pression de ses mâchoires se comptait en dizaine de kilos et l’image d’un requin s’imposa à moi. Ma peau fine n’offrit aucune protection à mes muscles, qui se déchirèrent comme du papier devant l’avidité de la créature. La douleur me fit presque perdre conscience, et c’est à ce moment que le phénomène commença…
    C’est ma faute peut-être, je dois avouer que je n’étais moi-même guère rassasiée à ce moment et la blessure me fit perdre une quantité affolante de sang. Alors, tout au fond de mon être, tout au fond des ténèbres de ma damnation, jaillit un cri intérieur. Un appel.

 

Le Sang appelle le Sang.

 

    Fascinée malgré la douleur, il fallu réunir plusieurs condition externe pour parvenir à m’en détourner. Et paradoxalement à me faire céder. Tout d’abord un coup de feu, une détonation de pistolet très proche de moi, me faisant sursauter et m’arrachant à la douce transe qui s’était emparée de moi. Puis une nouvelle morsure, plus puissante encore.
    Rapport d’analyse de situation: un de mes équipiers parvient à comprendre ce qui m’arrive et attaque mon agresseur. En résulte une blessure probablement très douloureuse qui, plutôt que de lui faire lâcher prise, lui fait serrer les dents. Dents actuellement plantée dans mon corps. Résultats observés: grosse perte de tissu et hémorragie externe abondante. Sans parler d’un putain de mal de chien ! Cette saloperie m’avait fait perdre un sacré morceau de chair et de muscle, et ses crocs me sectionnèrent tendons et ligaments. Mon hurlement me sembla sortir de chaque pore de ma peau tandis qu’un voile noir recouvrit ma vue. Perte de connaissance ? Pas vraiment. Cette dernière blessure me vida totalement de mon sang et opéra un changement en moi.

 

Je répondis à l’Appel.

 

    Jamais de ma vie – ni de ma non-mort – je n’ai été si affamée. Je comprends mieux la Aswang maintenant, peut-être aurais-je dû me montrer plus clémente. Mais allez freiner une pulsion bestiale ! Rien à faire: j’ouvre la bouche et pousse un cri primal, ampli des ténèbres antiques de mes ancêtres vampires, tout ceux de ma lignée qui m’ont précédés. Ma force s’en retrouve décuplée et je trouve une faille dans l’étreinte de mon agresseur. Si elle ne me relâche pas, elle perd au moins l’avantage en

 

 

(…)

Texte inachevé, sur le moment mis en attente pour favoriser un autre, écrit exactement au même moment: Une Blessure de Morts-Vivant. Bizarrement, après l’avoir fini, je ne suis jamais revenu sur celui-ci…

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