“I know it hurts baby, but everything’s going to be fine.”
– Jake, Evil Dead 2
Entre un célèbre Joel Schumacher et un légendaire Ennio Morricone, la disparition de Dan Hicks est passé pratiquement inaperçu et cela est plutôt dommage. Bien sûr il n’était pas une grande figure hollywoodienne ni même un grand acteur à la filmographie longue comme le bras, mais dans le petit milieu de la série B il était une trogne inoubliable et second couteau rare mais toujours appréciable. Car le bonhomme était fun, il n’y a pas d’autre façon de le dire. Né à Pontiac dans le Michigan, il faisait partie de la “famille Raimi” au même titre que Bruce Campbell ou Scott Spiegel, ayant développé une forte amitié avec les créateurs de la saga Evil Dead dans laquelle il joua l’un des personnages les plus mémorables: le bouseux Jake, redneck crasseux qui passe Ash à tabac, balance les pages du Necronomicon à la cave et se fait bouffer jusqu’aux os par l’horrible Henrietta. Un rôle inoubliable qui participa assurément à faire de Evil Dead 2 une œuvre culte. En fait disons-le franchement, sa contribution à la série est sans doute la meilleure qui fut après celle de Bruce Campbell.
On pourrait conclure là le résumé de sa carrière, car jamais celle-ci n’en devint meilleur, mais ça serait passer à côté d’amusantes petites choses. Il y a Bill Roberts, son autre meilleur rôle qu’il tient dans le slasher Intruder. Un film d’horreur se déroulant dans un supermarché qui aurait aussi bien pu être le fameux Priba de L’Armée des Ténèbres puisque toute l’équipe y est réuni: la chose est réalisée par Scott Spiegel, Sam et Ted Raimi s’y font trucider à grands renforts d’effets sanglants signés KNB et Bruce Campbell fait une courte apparition dans la dernière scène. Comme c’était le cas pour Evil Dead 2, Dan Hicks s’y lâche complètement et semble s’éclater à terroriser le reste du casting. Plus tard Sam Raimi lui garda une petite place à l’occasion dans ses films, au coût hélas d’un temps de présence de plus en plus réduit à l’écran. En 1990 il l’intègre au gang de Robert G. Durant dans Darkman où il sort du lot grâce à l’idée de la fausse jambe contenant une mitrailleuse. En 1993 l’acteur fait de la figuration non crédité au générique dans L’Armée des Ténèbres, où il serait l’un des nombreux cavaliers passant devant la caméra.
On peut aussi le retrouver parmi les passagers du train dans Spider-Man 2 et perdu dans la foule de la Cité d’Émeraude dans Le Monde Fantastique d’Oz. Bruce Campbell fit appel à lui pour l’adaptation audio de son propre livre, Make Love ! The Bruce Campbell Way, une aberration de plus de six heures dont il est difficile de venir à bout, et pour son film My Name is Bruce où il apparait brièvement comme plouc fermier, rappel évident au personnage de Jake. D’ailleurs même sans Dan Hicks celui-ci continuera un temps d’exister à travers différents média: on retrouve son squelette pourrissant dans la cave de la célèbre cabane dans la série télé Ash vs. Evil Dead, mais aussi dans le jeu vidéo Evil Dead: Hail to the King, où son cadavre a été projeté dans le passé grâce au vortex interdimensionnel et réanimé en tant que Deadite mécanicien ! Mais pour en revenir à notre acteur, on pourra dire qu’il resta fidèle à La Familia jusqu’au bout. Il accompagna Campbell sur le tournage de Maniac Cop puis sur celui de The Demolitionist, film très comic book mélangeant RoboCop et The Crow au féminin réalisé par le “K” de KNB.
Ce dernier, Robert Kurtzman de son vrai nom, l’invite avec Ted Raimi sur son sympathique Wishmaster, où ils côtoient de nombreuses célébrités du genre: Angus Scrimm, Joseph Pilato, Reggie Bannister, Tom Savini et naturellement Freddy, Jason et Candyman. Dans 2001 Maniacs, remake du classique de H.G. Lewis, il fut l’un des nombreux maniaques figurant sur lesquels on ne s’attarde pas, et il participa le temps d’un épisode à l’étrange expérience que fut la série Ultraman: The Ultimate Hero, un spin-off américain de la célèbre saga japonaise. Non pas une imitation à la Power Rangers, mais une véritable production officielle délocalisée spécialement aux États-Unis. Du reste il faut reconnaitre que Dan Hicks se retrouva cantonné au tout petit budget: il est coupé au montage de l’actioner amateur Koreatown, apparait dans l’invisible Alternate Endings (comédie à suspense interactive qui possède cinq fins différentes) et figure au générique de Porkchop et de l’une de ses suites, Porkchop 3D, slashers shot on video à la Camp Blood où l’assassin utilise une tête de cochon en guise de masque.
Citons pour la forme le film de zombies Dead Season, cheap comme tant d’autres mais pas désagréable dans son genre, Elder Island, soporifique survival soit disant inspiré d’une histoire vraie, et la grosse série B The Blood Hunter, qui suit une équipe de chasseur de vampires à la manière du film de John Carpenter mais sans le talent ni le budget. Plus fou: cet improbable Dick Johnson & Tommygun vs. The Cannibal Cop, parodie grotesque de polar dont il fut également le producteur, avec Debbie Rochon en partenaire de scène. Son dernier crédit sera à titre posthume pour le documentaire Hail to the Deadites de Steve Villeneuve, énième reportage à propos d’Evil Dead qui s’intéresse cette fois plus à ses fans irréductibles et à la popularité de la franchise à travers les âges. La chose est toujours en post-production et Danny ne verra jamais le résultat. Le 5 Juin dernier il annonça être atteint d’un cancer de stade 4, les médecins ne lui donnant plus qu’entre un et trois ans à vivre. “Ok, gotta go. I’m gonna find out just what in the hell is going on down in that fruit cellar.” déclara t-il dans son dernier message Facebook.
Une campagne GoFundMe fut rapidement mise en place pour l’aider à payer ses exorbitants frais médicaux, et sur les 8000 dollars réclamés il en récolta plus de 20.000. L’annonce de sa condamnation jeta un froid, et malgré son année de sursit supposé il ne termina pas le mois. Il décéda chez lui ce 30 Juin, âgé de seulement 68 ans. Triste et injuste, mais il laisse derrière lui deux rôles mémorables que tout les fan d’Horreur et de cinoche d’exploitation se souviendront encore dans les décades à venir. Pas un mauvais héritage pour un acteur de son envergure !
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