Army of Frankensteins (2013)

ROAD TO HALLOWEEN II

 

 

Army of Frankensteins

(2013)

 

 

Prière de ne pas confondre ce Army of Frankensteins avec Frankenstein’s Army, tous deux de 2013, le second étant une mini-résurrection du projet Worst Case Scenario dont j’avais déjà parlé en 2006… Après l’affaire All Hallows’ Eve de l’autre jour, voilà que je me fais encore bien prendre au piège puisque je pensais vraiment avoir affaire à l’œuvre de Richard Raaphorst et que je m’apprêtais à écrire tout un texte à propos de son évolution. Tant pis, c’est un peu les aléas de choisir un film par jour et de chroniquer sans avoir de temps de préparation. Mais que vaut donc ce Army of Frankensteins ?
Voilà qui est difficile à dire tant il ne s’apparente pas exactement à un film et plus à un gros gag, lequel évoque plus une fausse bande-annonce post-Grindhouse qu’un véritable long métrage, mais toutefois pleinement conscient des limites de son budget (contrairement à d’autres productions du même genre). Certains vont aimer le principe et suivre le film en riant avec lui, d’autres vont tout rejeter en bloc devant l’amateurisme général du projet. Car d’un point de vue technique, nous sommes quand même bien bas et il est possible de comparer le résultat à une vidéo YouTube plutôt à du véritable cinéma.
Attention, Army of Frankensteins dispose quand même d’une caméra haute définition, d’une réalisation compétente et d’un montage parfaitement acceptable. Ce n’est pas Danny Draven et son caméscope de supermarché. Toutefois le réalisateur se repose presque entièrement sur des fonds verts et des effets spéciaux digitaux cheap comme on en trouve chez ceux qui savent un minimum gérer le matériel, et beaucoup de chroniqueurs Internet en sont d’ailleurs au même niveau.

 

 

Ce qui rattrape les choses, c’est cette volonté de raconter une histoire. Certes cela ne vole pas bien haut, mais plutôt que de mettre en boite un truc fait en vitesse, atteignant à peine la durée réglementaire d’exploitation (comme la Full Moon par exemple), le responsable et ses scénaristes ont préférés développer leur intrigue et étirer l’aventure jusqu’à presque une bonne heure quarante. Trop long peut-être, car le rythme en prend parfois un un sacré coup et de nombreuses séquences auraient pu être sensiblement rabotées au montage, afin de dynamiser un peu le tout. L’intrigue montre comment Alan, un jeune homme qui tente de faire une belle demande de mariage à sa petite amie, fini par se faire kidnapper par un étrange gamin. Celui-ci possède un équipement high-tech et il pourrait bien être le voleur de tombes qui sévit dans le coin ces derniers temps. Dénommé Igor, il est en fait l’assistant d’un étrange savant fou, le Dr. Finski, vieillard tellement passionné par l’histoire de Frankenstein qu’il a fabriqué son propre monstre (lequel évoque un sosie de George Wendt au teint verdâtre).
Pour une raison indéterminée (comprendre: qui n’est jamais expliqué dans le film !), le scientifique a besoin d’Alan pour achever sa création et il lui vole un œil pour le donner à sa bestiole. Blessé, drogué, perdu, Alan va se déplacer dans le laboratoire et toucher malgré lui au levier destiné à activer le cadavre. Celui-ci n’est pas censé être encore prêt et se réveille en étant particulièrement agressive, attaquant le groupe. Mais le vrai problème est à venir: dans sa maladresse Alan dérègle les inventions de Finski et celles-ci perturbent le Multivers, faisant alors apparaître des dizaines et des dizaines de copies du monstre ! Une multiplication qui ne s’arrête que lorsqu’une faille spatio-temporelle envoie tout ce petit monde 150 dans le passé… en pleine Guerre de Sécession !

 

 

Finski ne survit pas au transport et Alan, désorienté, se retrouve seul avec Igor et une armée de monstres de Frankenstein en pleine vadrouille sur le champ de bataille. Évidemment ceux-ci s’attaquent aux Bleus comme aux Gris et l’enfant explique qu’il leur faut désormais détruire l’original afin de supprimer les clones et d’éviter que l’Histoire ne soit changée à tout jamais. Si le jeune homme n’est guère enchanté à l’idée d’affronter une armée de “Frankensteins”, il réalise que, grâce à aux injections de nanobots effectuées par le savant, il peut parfois voir à travers les yeux de la créature. Réalisant qu’il n’est pas pressé de retourner chez lui étant donné que sa petite copine l’a trompé, il se lance dans l’aventure avec l’aide de Igor et de deux personnes qui ne sont autres que… ses propres ancêtres.
Et ça ne s’arrête pas là ! Alors que Army of Frankensteins semble se diriger vers une simple accumulation de scènes gores et d’affrontement entre soldats et zombies, le scénario bifurque et empruntes sans cesse de nouvelles voies, formant une intrigue bien différente et plus étoffées que celle qu’on imaginait. Par exemple les Sudistes découvrent la formule de Finski et vont l’utiliser pour fabriquer leur propre monstre, plus gros et plus fort, tandis que l’original va rencontrer une infirmière Noire, ancienne esclave, et se reconnaitre en elle lorsqu’il découvre ses cicatrices. Il va alors choisir de se battre du côté des Nordistes afin de mettre fin à l’esclavage ! Quant à Abraham Lincoln, qui a vent de l’affaire, il se dit que cette armée de Frankensteins pourrait bien lui servir… Et dans tout ça se rajoute un triangle amoureux lorsque l’infirmière, en fait l’aïeule d’Alan, tombe amoureuse de lui plutôt que de celui qu’elle devait épouser ! Bon soyons clair, tout ceci est peut-être un petit peu trop dense pour un film censé être un gros B extravagant et auto-parodique dans la lignée de Zombeavers et Wolf Cop. Non pas que cela soit désagréable d’avoir de multiples intrigues pour changer (surtout comparé aux deux titres précités, beaucoup trop courts et faiblards à ce niveau là), mais le public-cible va surtout vouloir des affrontements sanglants plutôt que de la romance et des délires de voyages temporelles à la Doctor Who.

 

 

Soyez rassurez, le film ne se perd pas en route et reste fidèle à son sujet de base. Les Frankensteins se battent fréquemment et furieusement, et les attaques sont assez longues et délirantes pour qu’on ne se sente pas flousé sur la marchandise. Les monstres arrachent des visages, piétinent des têtes qui éclatent alors comme des melons, démembrent et mutilent dans tous les sens: l’un éventre un soldat puis en étrangle un autre avec les intestins qui lui restent en main… Dommage que les effets spéciaux, bien qu’utilisant quelques trucages à l’ancienne, se focalise surtout sur les CGI et le green screen. Ce foutu green screen encore et toujours, aux détourages évidant, avec une différence flagrante de profondeur, de texture et d’éclairage. C’est malheureux car cela vient à chaque fois rappeler que Army of Frankensteins n’est pas vraiment un film, juste une production indépendante sans grands moyens, et il devient moins facile de s’impliquer dans l’histoire.
Les clones du monstre, par exemple, sont des copier/coller qui s’assument en tant que tel, et s’il est drôle au début de voir la même personne déambuler à l’infini, cela fini par lasser et on regrette que ces zombies n’aient pas été conçu avec un peu plus de soin, juste pour se hisser au niveau d’effort de l’écriture. Les démembrements et autres jeux de massacre ne sont pas explicitement gore, restant plutôt sages et comiques, et on fini par se demander qui est l’audience visée: les fans des séries B des années 80s débridées et violentes, ou le public contemporain qui glousse à la vue d’un Sharknado 3 mais qui répugne à voir de véritables films d’exploitation ? Le déséquilibre est constant et la vision du film n’en devient que plus chaotique, soufflant le chaud et le froid constamment et ne parvenant jamais à s’installer vraiment dans les yeux du spectateur.

 

 

Difficile quand même de ne pas sourire lorsque Igor greffe un canon laser Steampunk à la place du bras d’un soldat blessé, dont le membre a été arraché par un chat-mutant que les Sudistes ont inventé par erreur. L’idée de faire s’affronter deux monstres de Frankenstein est plaisante, et l’amitié ultra naïve qui se forme entre la créature et l’infirmière est tellement caricaturale qu’on adhère totalement au changement de bord de la créature, maintenant sauveur de l’humanité (il porte une petite fleur sur sa veste pour montrer son bon côté). Un baiser est échangé par deux amoureux tandis que, derrière eux, un type est mis en pièce par une dizaine de morts-vivants déchainés… Sans parler de la vue subjective par les yeux du monstre, avec les bras tendus bien visible, et les innombrables fausses moustaches qui apparaissent un peu partout.
Regrettable quand même que la fluctuation de ton soit aussi présente dans le scénario, avec certaines séquences qui se prennent bizarrement trop au sérieux. Ainsi la sœur de l’héroïne garde une haine pour les Frankensteins car ils ont tués son prétendant et elle refuse de les voir comme des héros venant abolir l’esclavage. Tout un passage la montre intervenir en pleine bataille décisive afin de tuer l’original, ce qui met le reste du pays en danger puisque permettant l’évasion des Sudistes et de leur propre golem. Cela mène à sa propre mort, laquelle est traité de façon beaucoup trop sérieuse pour fonctionner avec ce qui est montré le reste du temps. Igor connait le même ressort dramatique, se retrouvant supprimé de l’histoire sans véritables raisons si ce n’est de faire comprendre aux spectateurs que l’heure est grave. De plus cela contredit une scène précédente où il absorbe un peu de la formule du savant censée le rendre plus puissant qu’un humain ordinaire. Peut-être existe-t-il une scène coupée le montrant revenir à la vie, ou le réalisateur pensait expliquer cela dans une séquelle, mais au final le résultat n’a rien d’amusant. Il laisse simplement perplexe et ne colle pas au concept et à l’humour très poussif qui règne sur le film.

 

 

Cela ne gâche pas vraiment le plaisir que l’on peut prendre devant Army of Frankensteins, et certains pourront même dire que cela l’aide à s’élever de sa condition de nanar volontaire et ainsi de devenir un véritable mauvais film sympathique. Mais le fait est que celui-ci est impossible à noter en tant que tel, en bon ou mauvais. Seul un public bien spécifique appréciera, et même en son sein certains pourront être totalement hermétique ou simplement déçu. Moi-même je ne sais pas trop où me situer. Ce n’est clairement pas un mauvais film, ni une arnaque: il y a beaucoup de bons éléments, un véritable effort d’écriture, des concepts sympathiques et une ambiance bon enfant. Seulement il y a aussi un soucis de traitement et un manque de budget qui viennent sacrément diminuer l’ampleur du projet, et le résultat en pâtit énormément.
Army of Frankensteins est un produit courageux. Alors qu’il aurait pu se contenter de livrer le minimum syndical, il cherche tout de même à épaissir son intrigue, jouer avec ses idées (la conclusion qui amène à l’assassinat de Lincoln, dont on se demande s’il va suivre son cours historique ou être modifier et créer une timeline alternative, les blessures infligés au monstre original qui se répercutent sur les copies) et prendre des directions inattendues. C’est bien plus que ce qu’on en attendait, et cela devrait compter pour quelque chose. Mais en contrepartie on fini par se perdre en séquences inutiles (tout le côté Retour Vers le Futur avec les ancêtres d’Alan) qui viennent amoindrir l’efficacité du film. Je suppose que l’appréciation globale de ce long métrage est véritablement d’une question de goût. A vous de voir, mais d’emblée vous devriez savoir si une telle production est votre tasse de thé ou non.

 

 

VERDICT: CITROUILLE

 

 

   

2 comments to Army of Frankensteins (2013)

  • Pascal Gillon Pascal Gillon  says:

    Celui là, j’ai bien envie de le mater…

    • Adrien Vaillant Adrien Vaillant  says:

      Libre à toi, mais mate quand même le trailer juste avant histoire de te faire un avis sur la « qualité » visuelle ! Juste au cas où.

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