Amazing Stories (2.08) – Go to the Head of the Class (1986)

ROAD TO HALLOWEEN V

 

 

Amazing Stories

Go to the Head of the Class

(1986)

 

 

D’ordinaire un épisode de Amazing Stories s’étend sur une vingtaine de minutes, durée plutôt standard pour les séries télé de l’époque. Toutefois le show s’est fendu de deux “spéciaux” se permettant de dépasser cette durée pour faire pleinement profiter les spectateurs de l’histoire qu’ils ont a raconter. Le premier est The Mission, parfaitement Spielbergien et avec Kevin Costner, à propos du sauvetage miracle d’un bombardier en perdition durant la Seconde Guerre Mondiale. L’autre c’est Go the the Head of the Class, réalisé par Robert Zemeckis, auteur de Retour vers le Futur et créateur des Contes de la Crypte pour HBO. Et autant l’un est une belle histoire faisant preuve de toute la guimauve dont peut faire preuve le réalisateur de Rencontre du 3ème Type, le second va explorer le côté obscure de son metteur en scène qui doit déjà lorgner fortement du côté des EC Comics.
Si Go to the Head of the Class est drôle et inoffensif, il teste quand même les limites de ce qu’il peut se permettre dans le cadre d’une émission destinée à un large public et le résultat est comparable aux plaisanteries macabres lues dans Tales From the Crypt ou Vault of Horror, avec le même humour noir, le même type de situation et l’inévitable twist final.

 

 

Au scénario on retrouve justement des noms familiers que l’on n’associe généralement pas à la boite Amblin mais plutôt à Fangoria. Ce sont Mick Garris et Tom McLoughin, réalisateurs de Critters 2 et de Jason le Mort-Vivant respectivement, et qui ont en commun d’avoir plusieurs fois adapté l’œuvre de Stephen King. Avec l’aide de Bob Gale, scénariste des Retours vers le Futur, ils composent une intrigue qui rend hommage aux films d’horreur gothiques rétro à base de vieux manoirs et de cimetière brumeux. Pas un hasard si les deux premières minutes du film montrent la fin de House on Haunted Hill et que les protagonistes sont des fans de cinéma fantastique et d’occulte. A la manière d’une Joe Dante, Zemeckis multiplie les références et détourne les clichés en guise de clins d’œil, prouvant son amour et sa nostalgie pour le genre.
L’intrigue s’intéresse ainsi à Peter, adolescent qui évoquerait bien Marty McFly s’il n’était pas tout son contraire: maladroit, peureux, idiot et sans copine. Il passe son temps dans sa chambre à regarder de vieux classique et à fantasmer sur Cynthia, une camarade de classe qui le manipule: il lui fait ses devoirs et s’accuse à sa place lorsque leur Némésis, le professeur Beanes, se rend compte de la supercherie.

 

 

L’enseignant, un étrange individu qui n’a que de la haine pour ses étudiants, le prend alors en grippe, exaspéré de ses retards fréquents, et va le punir devant tout le monde pour l’humilier. C’est peut-être parce qu’elle se sent coupable que l’adolescente va lui proposer de se venger, expliquant qu’elle a découvert comment jeter une malédiction sur le responsable de leurs malheurs. Car en passant à l’envers une chanson du groupe Blood Sausage, elle a découvert un rituel de magie noir permettant de donner à la personne de son choix… le hoquet ! De quoi humilier Beanes devant les élèves, même si Peter accepte surtout de l’aider pour passer la soirée avec elle. Manque de bol, il manque un ingrédient bien spéciale pour réussir le sortilège: le doigt d’un membre de famille décédé de leur cible.
Ils se rendent au cimetière pour exhumer le corps dont ils ont besoin, mais le jeune homme panique et n’arrive pas à arracher l’index nécessaire. Prit par le temps, les préparatifs devant être terminés avant le dernier coup de minuit, il va malencontreusement arracher la main entière et l’utiliser, décuplant alors la puissance de l’enchantement.

 

 

Ils vont retrouver le professeur mort à son domicile, terrassé par une fatale crise de hoquet. Découvrant un contre-sort permettant de le ressusciter, le duo va tenter de réparer leur erreur… sauf qu’ils découpent par inadvertance la photo du sujet, séparant la tête de son cou sans même s’en rendre compte ! Leur enseignant se relève en deux morceaux pratiquement indépendant, évidemment très remonté contre eux. En fait Beanes est désormais un être purement maléfique qui compte bien se venger et va les poursuivre avec sa caboche sous le bras. Peter et Cynthia vont tâcher de s’enfuir du manoir, mais même une fois dehors le monstre va continuer de leur courir après…
Le vrai problème avec Go to the Head of the Class ce que malgré son histoire extrêmement simple qui n’a finalement pas grand chose à raconter, l’épisode se perd inutilement en longueur. Il est évident que l’idée était de jouer sur l’ambiance, la lente progression des évènements permettant de créer la surprise avec le retour d’entre-les-morts de l’antagoniste, mais cela s’éternise et le résultat n’en vaut pas vraiment la peine.

 

 

La première partie perd beaucoup trop de temps dans le cimetière avec notamment une séquence inutile où les apprenti-sorciers se cachent dans une tombe pour échapper au gardien de cimetière. Ensuite, et même s’il s’agit du meilleur morceau, il faut avouer qu’il y a un côté répétitif dans la course-poursuite entre Beanes, Cynthia et Peter, le pauvre mort-vivant répétant en boucle les mêmes menaces. La scène fini par perdre de sa puissance et devenir redondante, d’autant qu’en-dehors de gags slapstick où le décapité se cogne à répétition, il n’y arrive finalement rien de particulier. Les protagonistes se courent après à la manière d’un sketch de Benny Hill, et bien vite on ne désire que passer à autre chose. Ce qui n’arrive jamais puisque la suite des évènements se trouve être l’épilogue.
En gros, rendre Go to the Head of the Class plus long que ses compagnons de saison était une erreur, sa longueur inhabituelle ne faisant que le desservir. Plus resserré, plus concis, il aurait marché du tonnerre et amplement mérité son statut de meilleur segment de la série qui du coup semble presque galvaudé. Toutefois il est indéniable qu’il s’agit là du haut du panier en ce qui concerne Amazing Stories grâce à une réalisation solide et à un concept quand même très amusant.

 

 

Il faut dire que le cinéaste s’entoure de quelques collègues de valeurs sûres: à la musique Alan Silvestri, inoubliable compositeur de Predator et de Retour vers le Futur a qui la musique fait ici parfois penser, et dans le rôle du professeur Beanes rien de moins que Christopher Lloyd, qui livre (sans rire) une de ses meilleures prestations. Ce rôle de vieil allumé aux cheveux sales, qui fantasme sur le sexe et la violence dans la littérature classique, semble avoir été fait pour lui et l’acteur s’en donne à cœur joie, entre le rictus exagérément comique de son cadavre à la scène où il force un adolescent à manger un vieux chewing-gum retrouvé collé sous son bureau. Sadique, il punis ses jeunes en leur faisant porter à bout de bras de très lourds volumes avec la promesse d’un sale moment s’ils font tomber les livres…
Avec son look de vieux sorcier, il réside dans une bâtisse qui rappelle bien sûr les Old Dark House movies comme… The Old Dark House, avec son architecture gothique, ses grimoires, ses crânes et le chat noir qui s’y balade.

 

 

Mais c’est une fois mort qu’il devient intéressant, coursant ses bourreaux dans les rues désertes de la ville sous une nuit d’orage, tout en éclatant de rire. Bien sûr Zemeckis tempère cela comme il peut en insistant sur la comédie, la tête disputant son propre corps qui se cogne partout à la manière du Dr. Hill de Re-Animator. Mais même les mimiques rigolote de Lloyd ne parviennent pas totalement à effacer l’image effrayante de cet être surnaturel qu’on ne peut arrêter. Beanes se marre comme un dément, lance son crâne tel un projectile sur ses adversaires, tente de les mordre et jamais ne lâche prise. Go to the Head of the Class aura traumatisé pas mal de gamins en son temps, la série n’allant généralement pas aussi loin même lorsqu’il s’agit de donner dans l’épouvante.
Il faut dire que même visuellement l’épisode se montre marquant, dévoilant pleinement cette tête coupée et son moignon pourrissant. Avec le génie Stan Winston en responsable des effets spéciaux, la caboche vivante est effectivement réussie même si elle paraitra très factice au monde d’aujourd’hui. Non content de reproduire autant que possible les traits de Christopher Lloyd, elle bouge et cligne les yeux, remue les lèvres et se fend parfois d’un rictus mauvais. Autant de détails qui lui donnent presque vie.

 

 

Et il y a d’autres petites choses intéressantes comme le cimetière à l’ancienne avec brouillard, corbeaux, musique d’orgue et un inquiétant fossoyeur qui cache ses bières dans une fosse fraichement creusée. Le comparatif assez intéressant entre le destin de Macbeth et celui de Peter qui se laisse embobiner par une héroïne qui le mènera à sa perte. Et même ce super téléphone en forme de squelette qui se marre quand il sonne – si quelqu’un en trouve un, qu’il me contact immédiatement ! Enfin il y a la conclusion à la EC Comics, qui marche ici presque comme un détournement de cliché: tôt dans l’épisode le héros se cogne et semble s’évanouir, ce qui laisse à penser que tout ce qui s’ensuit n’est qu’un rêve. A l’issue de sa confrontation avec Beane, il perd connaissance au même endroit, dans la même position, avant de se réveiller le lendemain. L’épisode n’était-il qu’un songe ? Non ! Le twist étant que tout ce qui s’est passé à véritablement eu lieu, et que s’il retrouve Beanes à l’école la tête sur les épaules, c’est pour mieux découvrir qu’il se l’est agrafée !

 

 

Un final qui emprunte pas mal aux Griffes de la Nuit pour ce qui est de l’ambiance onirique, avec ces élèves qui écrivent leur copie en parfaite unissons et l’apparition de Cynthia, cette fois punie et vêtue d’une tenue ordinaire contrairement à l’allure de Punkette qu’elle possède habituellement. Peut-être que tout ceci n’est rien qu’un rêve après tout, encore que l’ultime image du jeune homme horrifié évoque surtout un terrible cauchemar dont il ne se réveillera pas, même lorsque le générique arrive… Bref, de façon officieuse, Go to the Head of the Class est le véritable pilote des Contes de la Crypte. Tout y est réuni à l’exception de la violence de Grand Guignol, et quiconque regardera un peu les décors pourra remarquer que la petite ville où se déroule l’histoire a un côté volontairement rétro façon année 50. Comme Hill Valley de Retour vers le Futur, oui, mais aussi comme dans Tales From the Crypt où une grande partie des épisodes se déroulent également à cette époque – en toute subtilité, hommage aux revues originales qui étaient publiées dans cette décade.
Une sacrée réussite en tout cas, qui se retrouvera même récompensée d’une diffusion en salles en Europe, via une compilation réunissant également The Mission ainsi que le très bon Mummy Daddy, où un acteur grimé en momie est confondu avec un véritable monstre par une bande de ploucs.

 

 

Pour terminer, il convient de mentionner l’existence des deux versions de Go to the Head of the Class. L’originale de 43 minutes, et celle raccourcie pour les certaines diffusions télévisées à 38 minutes, qui est celle qui fut traduite chez nous. Les deux montages sont désormais réunis dans les coffrets et compilations DVD disponibles, mais honnêtement la différence est si minime que l’on ne fait même pas la différence. J’ai pourtant essayé de faire une comparaison avant d’abandonner, la vision coup sur coup du même épisode étant plutôt assommante. Ce n’est sans doute pas très professionnel de ma part, mais en même temps je ne suis pas payé ! Mais avec seulement cinq minutes de moins ce n’est pas comme si l’on y perdait au change, surtout en considérant les problèmes de longueurs plutôt handicapant de l’originale…

 

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