Tales From the Darkside (2.15) – A New Lease on Life (1986)

ROAD TO HALLOWEEN V

 

 

Tales From the Darkside

A New Lease on Life

(1986)

 

 

Il y a peu de chance pour que l’on évoque un jour la carrière de John Strysik, petit réalisateur et scénariste n’ayant jamais rien fait de très important. Quand même, il a signé le script de Deathbed pour Charles Band et surtout celui de Stuck pour Stuart Gordon. Il participa plusieurs fois à Tales From the Darkside – ce qui inclut l’épisode dont nous allons parler, et participa même à Monsters avec le mémorable Shave and a Haircut, Two Bites déjà chroniqué dans ce Road to Halloween. Avec A New Lease on Life, il signe un nouvel épisode plutôt notable grâce, encore une fois, à un concept délirant: celui d’un immeuble vivant, en fait un monstre géant déguisé !
Cette idée on la doit en fait au scénariste Michael McDowell, auteur de Beetlejuice, de L’Étrange Noël de Monsieur Jack et du Halloween Candy récemment évoqué ici-même. Avec quelques copains, il livre une histoire rappelant le Festin Séculaire de G.J. Arnaud, dans la collection Gore de Fleuve Noir, où une créature antédiluvienne prenait la forme d’un magnifique manoir mais devait être régulièrement nourri d’êtres humains pour maintenir cette forme, les résidents se chargeant du travail pour conserver leur chez-eux.

 

 

Mais si Le Festin est glauque et violent, A New Lease on Life est pratiquement une comédie. Il faut dire qu’il est difficile de rendre la menace crédible avec vingt minutes d’antenne et un budget minuscule, et la bestiole elle-même ne sera révélée qu’à grand coup d’artifices. Des bruits, des lumières, quelques indices quant à la nature surnaturelle du bâtiment et tout de même un morceau concret de son corps durant à la dernière minute, histoire de donner au spectateur l’impression d’avoir au moins vu quelque chose. Heureusement l’intrigue ne repose pas simplement sur son monstre et préfère explorer la folie de ses habitants et les règles de vie absurdes qu’ils ont mis au point pour cohabiter avec lui.
Ainsi arrive Archie, jeune travailleur ambitieux, dans le plus bel immeuble de la ville: le Saint George. Celui-ci y emménage en raison du loyer ridiculement bas malgré les nombreux avantage qu’offre ce nouveau logement, et s’émerveille tout en se demandant où est l’arnaque. Il va bientôt le découvrir, car à peine est-il entré que les concierges vont détruire son micro-ondes sous son nez ! Apparemment ils n’aiment pas ces appareils émetteurs de radiations, qui selon eux  “empoisonnent” les murs.

 

 

Plus tard c’est la logeuse qui lui impose d’étranges conditions: il ne doit en aucun cas abimer les murs avec des clous, et doit jeter ses ordures tous les soirs – en particulier les déchets organiques qu’il doit balancer comme tel quel, sans sac, à travers un vide-ordure. Et ça n’en fini pas puisque plus tard une voisine vient lui réclamer de l’eau, affirmant qu’elle n’en a pas chez elle, avant de le supplier de déguerpir d’ici au plus vite. Les hommes d’entretien taillent la moquette aux ciseaux à ongles et la proprio s’amuse à jeter des tonnes de nourriture encore consommable dans le débarras, lui reprochant de ne pas en faire autant.
Archie se croit entouré de cinglés, et partant du principe que personne n’a à savoir ce qu’il fait chez lui, décide d’accrocher un tableau chez lui en dépit des consignes. Aussitôt une sorte de grondement résonne dans tout le building tandis que le clou est comme rejeté par le mur, qui se met à saigner un liquide vert… La maintenance va s’occuper du dégât comme d’une blessure, appliquant de l’antiseptique sur le trou avant de décliner son pourboire: “You can’t buy forgiveness” lui reproche t-on. Mais le nouveau venu est trop prit par son travail pour faire vraiment attention à tout ça, continuant sa vie sans faire d’histoire. Jusqu’au soir où il entend sa voisine être évincée de chez elle plutôt violemment et aperçoit les concierges jeter quelque chose de volumineux dans le vide-ordure…

 

 

Le plus amusant c’est que le personnage principal n’est pas présenté comme quelqu’un de “réaliste”, se méfiant de son entourage. C’est un petit con arrogant qui se moque ouvertement de ses voisins, n’a que du mépris pour leur excentricité et enfreint volontairement leurs règles car ne cherchant pas à être amical avec eux. Il va se mettre le Saint George à dos à force de ne vivre que pour lui-même, en particulier le jour où il refuse qu’une dinde très appétissante soit jetée dans la poubelle. Il va l’a voler afin de la manger lui-même mais son appartement va littéralement protester, comme si un tremblement de terre avait lieu. Agacé de cette obsession pour la nourriture et le tri des détritus, Archie va alors commettre l’irréparable en balançant exprès des objets non organique là où il ne faut pas…
La conclusion n’aura rien de surprenante et a vrai dire là n’est pas le sujet. A New Lease on Life n’est pas une histoire d’épouvante où le protagoniste met à jour une horrible conspiration, mais une sorte de parodie où l’on se marre avant tout de l’absurdité de la situation. Tous les personnages sont exagérés à l’extrême, la nature du Saint George nous montrée dès le début via de nombreux indices et l’intérêt de l’épisode réside dans la façon dont les résidents traitent avec soin leur monstre en forme d’immeuble, brossant la moquette avec des peignes minuscules ou gâtant la chose avec des friandises comme on le ferait avec son animal de compagnie.

 

 

Mais la vedette c’est bien le bâtiment lui-même, totalement loufoque dans les étranges propriétés qu’il présente. Le fameux vide-ordure ne cache même pas sa forme d’autel, avec ses portes-bougies gigantesques et ce gong qu’il faut sonner pour ouvrir la trappe. Un logo en forme de dragon rouge est visible un peu partout et bien sûr le nom même de Saint George n’est pas un hasard. La bête possède même des yeux partout via une sorte de panneau de contrôle high-tech installé dans chaque appartement, et qui ressemble un peu au HAL 9000 de 2001: L’Odyssée de l’Espace. Sauf que celui-ci cache une nature organique qui se révèle lorsqu’il s’énerve, devenant translucide et montrant des formes mouvantes à l’intérieur, comme les bio-puces de L’Ascenseur.
Il faut caresser celui-ci pour allumer les lumières, mais s’il est de mauvaise humeur il vous balance un choc électrique. Il prive une résidente mal-aimée d’eau tandis que sa petite chouchoute n’a qu’à présenter un verre pour que coule du saké des tuyaux sans robinets. Si l’on appuie un peu trop sur les murs avec ses mains, ils deviennent mous et gardent l’emprunte quelques instants. Et bien sûr si l’on regarde bien à l’intérieur de la trappe à nourriture, on peut apercevoir une énorme bouche à travers le trou – ou plutôt une gorge, qui doit descendre quelque part jusqu’à l’estomac de la bête.

 

 

Celle-ci fera une indigestion supposée mortelle lorsque Archie lui fera gober un mélange de vaisselle brisée et d’autres débris, ce qui est confirmé par les concierges dans l’épilogue, mais étrangement les scénaristes vont immédiatement revenir sur leur décision et ramener la créature à la vie sans la moindre conséquence, celle-ci attrapant son “bourreau” avec une langue gigantesque pour l’avaler tout rond. Difficile de comprendre pourquoi la réplique a été gardée, à moins que les habitants du Saint George ne savent finalement rien de leur propre dragon qu’ils vénèrent pourtant comme un dieu, et nul doute que l’écriture à six mains est à l’origine de ce petit problème.
Heureusement les écrivains se rattrapent bien vite en concluant l’épisode comme un véritable sitcom, lorsqu’un des résidents fait malgré lui un calembour idiot (il trouve que le comportement de Archie était “difficile à avaler”) qui va faire rire tout le monde. C’est-à-dire les autres personnages et le dragon lui-même, qui y va de son rire caverneux alors que l’image se fige pratiquement en un freeze frame ! Comment ne pas ranger du côté de l’épisode avec un culot pareil ?! Préfigurant quelque part la série Monsters, A New Lease on Life péche juste par son manque de budget qui ne lui permet pas d’être à la hauteur de ses ambitions. Le résultat est cependant assez drôle et créatif pour en faire l’un des points forts de cette seconde saison.

 

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