12 DAYS OF CHRISTMAS
A Christmas Treat
(1985)
Tim Sullivan, c’est un cas assez fascinant puisque celui d’un gars qui a su s’associer avec les bonnes personnes aux bons moments pour élever sa position dans le cinéma de genre, qui a eu de belles opportunités, mais qui n’en a finalement jamais rien fait de bien probant. Ainsi le bonhomme a commencé très jeune sur le génial Deadly Spawn (où il n’a eu que de tout petits boulots, ce qu’il évite d’ébruiter), fut assistant sur quelques grandes productions (Le Parrain 3), s’est acoquiné avec Eli Roth durant son moment de gloire et se rapprocha de grands magazines spécialisés comme Fangoria ou Rue Morgue pour consolider sa présence dans le milieu et surtout récupérer quelques projets intéressants par leur biais, comme le Hood of Horror avec Snoop Dogg et surtout le remake de 2000 Maniacs qu’il tenta de transformer en une lucrative franchise.
Mais voilà, l’échec total de 2001 Maniacs: Field of Screams en 2010 a mis un grand coup de frein à sa carrière et depuis il n’a pas foutu grand chose. Un segment parmi d’autres sur Chillerama, quelques clips musicaux, une interview pour le documentaire Lost Souls à propos du chaotique L’Île du Dr. Moreau que devait faire Richard Stanley et une apparition dans le gros Z Bloody Bloody Bible Camp qu’il a produit. Du gâchis car il était loin d’être mauvais, comme l’atteste les idées folles qu’il conçoit sur chacun de ses projets et la très bonne tenue de son premier 2001 Maniacs.
Mais peut-être que son égo s’est tout simplement mis en travers de son chemin, Sullivan étant quand même du genre à se vanter à propos de ses débuts percutants dans l’industrie et de ses connexions avec diverses personnalités adorées par les fans. Et un fait qui revient souvent est la réussite de son court-métrage A Christmas Treat, réalisé avec trois fois rien en 1985 lorsqu’il n’avait que vingt et un ans. Alors toujours étudiant à l’université, il met en boite ce petit film de quatre minutes avec pour seul élément notable le costume d’extraterrestre du Nightbeast de Don Dohler, auquel il offre un petit relooking pour l’occasion. Au final son sketch remporte au moins deux récompenses: le Fangoria Short Film Search Award, qui lui permis de mettre en place une relation durable avec la revue, et le Cinemagic Short Film Search Audience Award, publication soutenue par le célèbre Starlog et créée par… Don Dohler. Tiens donc.
Et force est de constater qu’effectivement, même si la durée est tellement réduite qu’elle ne lui permet pas de mettre en images autre chose qu’une simple blague, le résultat vaut le coup d’œil. Pas de quoi crier au génie, mais assurément de quoi rire un bon coup tant la belle morale de Noël en prend pour son grade. Difficile de résumer l’intrigue sans raconter la chute et le lecteur de ses lignes est prié de faire une pause le temps d’aller voir le film qui est disponible en ligne sur YouTube et Vimeo.
L’histoire se déroule pendant la nuit de Noël alors que les parents du jeune Jason mettent leur garçon, forcément excité, au lit. Il a pour consigne stricte de s’endormir car le Père Noël n’offre pas de cadeaux aux enfants désobéissant, mais après quelques temps celui-ci va finir par se relever et sortir de sa chambre en catimini. Et cela tombe bien puisqu’un personnage au manteau rouge et blanc vient d’arriver, déposant des cadeaux au pied du sapin ! Doucement le petit héros s’approche tandis que Santa Claus déguste le traditionnel cookie avec son verre de lait et que la paisible musique The Christmas Song de Nat King Cole accompagne toute la scène. Mais lorsqu’il agrippe son bienfaiteur afin de pouvoir le regarder en face, Jason va être très surpris en découvrant que celui-ci… est un horrible monstre qui va le tuer d’un méchant coup de griffes au visage !
Une créature de cauchemar qui attrape le petit corps sans vie pour le fourrer dans sa hôte, où l’on peut apercevoir une autre victime ! Le twist c’est que ce Père Noël là n’était pas pour les enfants mais pour leurs parents, visiblement très heureux d’être débarrassé de leurs sales mioches en cette nuit sacrée ! Et le court-métrage de montrer le couple remercier chaleureusement la bête, nommée Santa Claws (ça sonne comme Claus mais ça veut dire « griffe »). Merry Christmas !
Ce n’est donc pas grand chose, mais la surprise fonctionne et l’hilarité survient. Doublement même, pour peu que vous ayez la moindre sympathie pour les films de Don Dohler, car voir son amusante créature habillée comme le gentil papa Noël est un petit bonus non négligeable. Impossible de ne pas apprécier Tim Sullivan pour cette petite pépite qui fonctionne toujours autant années après années. Et s’il est difficile de juger de la compétition lors des différents concours auquel le film a participé, il est indéniable que le résultat est fort remarquable. Non content d’avoir décroché la plus haute récompense par deux fois, A Christmas Treat et son auteur firent même la couverture de Cinemagic #25.
Une belle occasion de se mettre avant que Sullivan ne va pas manquer de saisir, exagérant même peut-être un peu puisqu’il aurait eu pour habitude d’offrir son film en VHS comme cadeau de Noël à tous ses amis, à chaque Noël. Un brin prétentieux tout de même, et ça ne s’arrête pas là: selon lui il recevrait aussi un coup de fils annuel de Peter Criss, batteur de KISS, qui tient à lui rappeler combien son œuvre est absolument « sick and demented » et qu’il l’a présente constamment à de nouvelles personnes. On y croit, Tim, on y croit. Depuis plus de dix ans maintenant, la chose est disponible gratuitement sur Internet et dans la qualité tout à fait honorable considérant qu’elle fut tournée en 16mm et probablement entreposée dans un coin de la chambre de son réalisateur pendant des décennies.
En 2015 toutefois, le metteur en scène dépoussiéra son titre de gloire afin de le proposer dans une version collector en Blu-ray et DVD, titrée The Tim Sullivan Enhanced Edition. Supposément pour que l’argent récolté durant les ventes lui permettent de financer de nouvelles séries B. Une magouille qu’il monte avec le vieillissant Tom Holland, qui fera de même de son côté avec son classique Jeu d’Enfant, premier volet des aventures de Chucky qui sont désormais entre les mains du scénariste Don Mancini. C’est sous la houlette TnT Presents (pour Tim et Tom) et en partenariat avec Dread Central (un gros site spécialisé sur le cinéma d’horreur) que les associés tentèrent de refourguer ces nouvelles éditions forcément blindées de bonus: commentaires audio, cartes postales, autographes, certificats d’authenticités, le tout pour un tirage forcément limité de 2500 exemplaires.
Bref, nous sommes là au même niveau qu’un Charles Band et il y a quelque chose de triste que de voir deux types autrefois reconnus dans leur milieu réduit à faire tout ça juste pour que l’on parle un peu d’eux. Rien de bien grave cependant car il n’y a guère de différence entre ceci et les apparitions payantes d’autres personnalités dans les conventions, et au moins cela permet aux collectionneurs de disposer d’au moins une édition tangible de A Christmas Treat qui fut même restauré pour l’occasion. Il y est aussi accompagné d’une version en noir et blanc (et entragement datée de 1983) et de Jason Loves Tracy, un autre court de Sullivan. Après tout pourquoi pas… ?
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