Tales From the Crypt
(1972)
La Amicus persiste et signe avec le format de l’anthologie, adaptant ici les comics américains de EC Comics bien avant que la chaine HBO ne produise sa célèbre série du même nom. Tales From the Crypt ne change donc en rien la formule initiée avec Le Train de l’Epouvante du même Freddie Francis en 1965 et en reprend le cahier des charges à la lettre. Ainsi un groupe de personnes se retrouve piégé dans un même lieu (ici une crypte qu’ils exploraient en visite de groupe) tandis qu’un mystérieux personnage (le fameux gardien, qui apparaît bien différent du squelette blagueur que l’on connait et plus proche de la version originale du personnage dans les tous premiers numéros du magazines, à savoir une sorte d’ermite ou de moine lugubre et d’un sérieux mortuaire) va leur montrer à chacun d’horribles visions de leur futur, où ils trouvent tous une fin tragique. Arrivé au quatrième opus, on connait la chanson: les protagonistes sont en réalité déjà mort et ne se souviennent de rien, chaque histoires narrant les mauvaises actions dont ils se sont rendu coupable et qui les aura mené à leur perte.
…And All Through the House (d’après The Vault of Horror #35) ouvre le bal de façon spectaculaire: la nuit de Noël, une femme assassine son mari d’un coup de tissonnier dans le crâne afin de s’emparer de sa fortune. Mais alors qu’elle doit maquiller la scène du crime pour faire croire à un accident, elle doit gérer deux problèmes: sa jeune fille refuse de s’endormir, trop excitée à l’idée que le Père Noël va débarquer, et un fou meurtrier échappé de l’asile rôde dans les parages, justement déguisé en Santa Claus ! Ce segment très “Hitchcock sous cocaïne” montre la lutte acharnée que se livrent les deux assassins, l’un pour pénétrer dans la maison, l’autre pour le repousser, préfigurant quelque part un peu Maman, J’ai Raté l’Avion !, ou plus précisément son inspiration, le français 3615 Père Noël. Le twist, prévisible mais excellent, montre l’héroïne croire à la victoire jusqu’à ce que sa gamine apparaisse dans le salon, accompagnée du maniaque qu’elle pense vraiment être le Petit Papa Noël et qu’elle a laissée entrer. La série Tales From the Crypt adapta également ce segment de façon bien plus violente et moderne avec le génial Larry Drake dans le rôle du croquemitaine, sous la réalisation de Robert Zemeckis.
Reflection of Death (Tales from the Crypt #23) est le maillon faible de l’anthologie, fonctionnant plus sur papier que sur pellicule. Prétextant un rendez-vous, un homme abandonne sa femme et ses enfants pour refaire sa vie avec sa maitresse, mais se retrouve prit de doutes sur le trajet en voiture. Le couple est alors victime d’un accident, et le reste du sketch est présenté à la première personne afin de garder une surprise qui ne fonctionne qu’à moitié puisque dans la réalité, si quelqu’un se relevait d’un crash pareil, son état physique provoquerait forcément la panique chez ceux qu’il croise. Ainsi le protagoniste revient à lui mal en point et seul, sa partenaire ayant disparu. Il tente alors de rentrer chez lui, mais les personnes a qui il demande de l’aide le fuit comme la peste. Sa propre femme ne le reconnaît pas et lorsqu’il se réfugit chez sa concubine, celle-ci est désormais aveugle et prétend que lui n’a pas survécu au drame… lequel s’est déroulé deux ans plus tôt ! Un coup d’oeil dans le miroir et le mari infidèle va comprendre la vérité sur sa situation.
Une révélation qui ne marche pas vraiment, à la manière de ce segment trop court et trop cheap qui semble avoir été conçu afin d’économiser sur le budget. Heureusement le film se rattrape aussitôt avec le triste Poetic Justice (The Haunt of Fear #12) où apparaît rien de moins que Peter Cushing dans le rôle d’un adorable vieillard vivant seul depuis le décès de son épouse. Celui-ci passe désormais son temps à s’occuper de ses chiens et à amuser les enfants du quartier, mais un riche voisin convoitant sa propriété va faire de sa vie un véritable enfer. Après lui avoir retiré la garde de ses animaux, il fait circuler la rumeur qu’il est possiblement un pédophile, puis lui envoie des lettres insultantes durant la Saint Valentin qui vont le pousser au suicide. Mais un an plus tard le vieux Grimsdyke va sortir de sa tombe afin de régler ses comptes, prouvant qu’il peut lui aussi faire un peu de poésie en arrachant le palpitant d’un homme sans cœur… Plus que le final, c’est l’intégralité du sketch qui retient l’attention, grâce à l’interprétation touchante d’un Cushing vulnérable qui venait juste de perdre sa femme à l’époque.
Wish You Were Here trahit un peu ses origines puisqu’au lieu d’adapter The Haunt of Fear #22, il se contente de réutiliser la même source d’inspiration, à savoir la Patte du Singe de W.W. Jacobs. Une statuette chinoise remplace l’artefact mais le concept demeure: un cruel homme d’affaire fait une mauvaise affaire et se retrouve contraint de vendre ses biens pour éviter la faillite. Une décision difficile pour lui, mais encore plus pour son épouse qui n’accepte pas les faits. En retrouvant la statue parmi leurs bibelots, elle fait machinalement le vœu de devenir riche sans trop y penser. Quelques instants plus tard son époux est tué dans un accident de voiture après avoir été pourchassé par une version motarde de la Grande Faucheuse – une véritable imitation du Ghost Rider de Marvel Comics, justement (re)créé par Roy Thomas et quelques autres cette même année 1972 ! La femme hérite d’une assurance considérable mais va tenter de ramener son mari à la vie, inconsciente que l’objet magique réalise les souhaits de façon littérale. La conclusion est particulièrement macabre, avec ce pauvre hère rendu immortel alors qu’il a été embaumé, souffrant le martyre pour l’éternité.
Bien sûr si l’héroïne avait plus de deux neurones elle offrirait la statuette à leur ami qui, en tant que nouveau propriétaire, pourrait alors arranger les choses, et c’est sans doute ce qui a dû se passer si l’on prend en compte le fait que le défunt réanimé se retrouve en Enfer avec les autres à la fin du film. Quoiqu’il en soit l’anthologie frappe fort, n’hésitant pas à verser dans un gore primitif pour marquer le coup (le protagoniste est découpé et éventré au sabre mais toujours vivant, les tripes à l’air tandis que ses membres orphelins continuent de bouger). Blind Alleys (Tales from the Crypt #46) par lui dans un registre plus psychologique avec une belle exploration de la démence humaine: un ancien militaire devient le nouveau directeur d’une maison de retraite pour aveugles. Très strict et un rien corrompu, il rogne sur le budget autant que possible, coupant le chauffage durant l’hivers et rationnant la nourriture. Son comportement exaspère les handicapés qui ne peuvent cependant rien faire puisque l’homme possède un chien de garde féroce.
Lorsque l’un d’eux tombe malade et fini par mourir faute de soins, les non-voyants préparent alors leur terrible vengeance, capturant et affamant l’animal tout en construisant un étrange labyrinthe dans la cave du bâtiment. Le directeur s’y retrouve enfermé et va devoir se frayer un chemin à travers la structure dont les murs sont couverts de lames de rasoir, mais ce qui l’attend au bout n’est peut-être pas la sortie… L’intrigue marque, beaucoup, au point que l’on retrouve encore son influence dans quelques œuvres plus modernes (Robert R. McCammon reprendra l’idée du labyrinthe dans L’Heure du Loup, qui narre les aventures d’un James Bond lycanthrope contre les Nazis, et Snoop Dogg’s Hood of Horror rejoue les évènements en plus gore, avec Ernie Hudson à la place de Patrick Magee dans le rôle du leader des retraités), même si l’image de ces aveugles fabriquant leur traquenard à l’unisson sans rien y voir pourra prêter à sourire.
Dans tous les cas cela conclu ce Tales From the Crypt sur une haute note, prouvant une fois pour toute que le format du film à sketches fonctionnait à merveille pour la Amicus, qui enchaina logiquement sur The Vault of Horror, une autre adaptation des EC Comics fonctionnant sur le même principe. Pas de The Haunt of Fear après cela en revanche, les deux parties décidant d’en rester là faute d’un fort succès critique et / ou commercial. Pas bien grave puisque l’un continua son bonhomme de chemin avec d’autres films similaires (Asylum, From Beyond the Grave) tandis que l’autre connu la consécration sur le tard à travers sa résurrection télévisée, qui n’a encore jamais été égalée à ce jour dans le genre anthologie horrifique.
Le film est vraiment sympa, mais je lui préfère « The Vault of Horror ». La Maison qui tue, Le Jardin des tortures et Le Train des épouvantes sont également très bons. De « From Beyond the Grave » je ne retiens que le dernier segment et « Asylum » ne m’a pas convaincu du tout malgré une intrigue de liaison plutôt chouette.
Le Train et Le Jardin sont les meilleurs selon moi mais je t’avoue que je les aime un peu tous pareil. Y a vraiment que Tales That Witness Madness qui m’avait un peu déçu, mais la conclusion reste plutôt fun.
De Tales that Witness Madness j’ai beaucoup aimé le segment dans lequel Joan Collins affronte un vieil arbre mort. Après, il est vrai que le film n’est pas le meilleur du lot, mais j’ai apprécié l’originalité des divers sketches (pour une fois qu’on nous ressert pas l’habituel vengeance d’outre-tombe). Le Club des monstres est également sympa (mais ce n’est plus vraiment du Amicus comme Tales that Witness Madness). Naïf (pour ne pas dire ringard), quelques peu désuet (déjà à l’époque de sa sortie), mais sympa. La dernière histoire avec son village de goules me plaît énormément.
Très gros fan du Club des Monstres et le côté ringard ne me dérange pas du tout, ça a du charme et la tronche du « président » loup-garou me fera toujours rire. Et d’un autre côté il y a comme tu dis l’histoire des goules et le monologue finale de Vincent Price à propos des humains qui sont les pires des monstres.