Muck (2015)

ROAD TO HALLOWEEN II

 

 

Muck

(2015)

 

 

Muck c’est le projet-arnaque de Steve Wolsh, lequel à naturellement fait appel à Kickstarter et à l’argent d’autrui pour le financer. Sautant sur la mode du film d’horreur “à l’ancienne”, probablement après le succès de Hatchet et de quelques autres, le bonhomme a su tromper son monde en prétextant vouloir réaliser une production old-school qui serait un hommage aux vraies bonnes séries B d’autrefois. Et voilà qu’il promet monts et merveilles, comme le parfait vendeur de voitures: Muck sera très sanglant, avec des effets spéciaux véritables et la garantie qu’aucun CGI ne viendra gâcher le résultat. Il y a aura tout un tas de cascades dangereuses et Kane Hodder sera justement présent au générique. Une manière de légitimiser son bébé aux yeux de la communauté horrifique américaine. Enfin il compte bien rendre le film visuellement somptueux à l’aide d’une caméra moderne (et certainement hors de prix) filmant en 4K Ultra HD, l’une des meilleures résolutions sur le marché. Et accessoirement avec la présence d’un grand nombre d’actrices sexy à gros seins, allant de la Playmate à la Miss quelque chose. Des “beautés” qui évoquent plus les candidates typiques de télé-réalités plutôt que des femmes véritablement séduisantes, mais qui sont certainement aux goûts de Wolsh, qui était comme par hasard en charge du casting en plus d’être scénariste, réalisateur et monteur.
Cerise sur le gâteau, Muck ne forme pas un simple film mais le second acte d’une plus longue histoire. Ainsi l’idée est créer une préquelle, Muck: Feast of Saint Patrick (déjà prévu pour 2016) et une séquelle, qui formeraient le début et la conclusion de l’intrigue générale. Un petit côté Star Wars dans la folie chronologique, mais qui montre bien l’égo du responsable, qui pense d’emblée pouvoir se remplir les poches en prenant les spectateurs pour des vaches à lait. Prétendre pouvoir tirer trois long-métrage de son projet, lorsqu’il n’y a même pas assez de substance pour un seul film, c’est quand même sacrément gonflé de sa part !

 

 

Muck a donc été conçu comme une deuxième partie d’un tout et ne possède aucune introduction. Les premières images montrent un groupe de personnages s’enfuir à travers les marécages de Cape Cod, une presqu’île qui appartient à l’état du Massachusetts et plus particulièrement dans un coin nommé West Craven (rions). A leurs trousses, une bande de tueurs albinos, visiblement un clan d’hommes primitifs qui massacrent tout ceux qu’ils rencontrent. Avec déjà un mort, une disparue et un blessé grave, la troupe trouve refuge dans une grande maison abandonnée, découverte par hasard, et tandis que chacun s’installe en espérant trouver de l’aide ou un moyen de riposter, leurs poursuivants s’introduisent discrètement dans la demeure…
L’idée était certainement d’évacuer la lenteur habituelle des productions du même genre en commençant directement avec les festivités, zappant les longues scènes inutiles de présentations pour nous plonger au cœur de l’action dès les toutes premières minutes. Qui plus est, ce stratagème fonctionne un peu de la même manière que la “bobine manquante” de Planète Terreur, où le spectateur est largué en plein affrontement sans la moindre explication. La perte de repères surprend et donne un second souffle à une situation finalement déjà vu de nombreuses fois. Il n’y a qu’un seul problème dans tout ça, ici: Muck n’est pas du tout le film que mon résumé semble présenter. Muck n’est même pas un film d’horreur. Car Steve Wolsh est un arnaqueur et ne cherche absolument pas à raconter une histoire, faire plaisir aux fans, jouer avec les attentes ou se montrer intelligent. La seule chose qui l’intéresse c’est de filmer des filles en lingerie, ou topless, et d’insister sur leurs formes. Et c’est TOUT.
Ce n’est pas une façon d’exagérer et de dire que Muck comporte beaucoup de nudité. Non, le “film” ne montre strictement rien (ou à peine) des affrontements, scènes gore ou séquences de suspense. A la place la caméra se focalise sur le corps des actrices et le réalisateur passe son temps à les faire se déshabiller, pour une raison ou pour une autre, et peu importe si cela n’a rien à voir avec ce qu’il est censé raconter.

 

 

Un exemple parmi d’autre: l’un des héros parvient à joindre son cousin par téléphone, le suppliant de venir le chercher. Celui-ci est en plein rencard, occupé à draguer dans un bar avec sa compagne et une amie qui tient la chandelle. Alors que l’une des filles s’absente pour partir au toilette et que les deux autres entament une conversation à propos de la communication, le film décide de se concentrer sur celle qui s’est éclipsée… Pour la montrer essayer différents soutien-gorges dans les toilettes pendant au moins deux minutes ! Il n’y a aucun suspense car les personnages ne sont pas dans la zone où rôdent les tueurs, il n’y a pas de comédie puisque la fille est seule dans la pièce, et il n’y a pas d’intérêt puisque ses essayages ne viennent jamais s’intégrer au film par la suite. C’est juste deux minutes de perdues, avec une caméra voyeuse qui glisse sur la poitrine de l’actrice, encore et encore.
Et voilà Muck dans toute sa splendeur. Le générique de début passe son temps à montrer le personnage porté disparu, vêtue d’une simple petite culotte et gambadant dans la boue, sans que rien ne lui arrive et sans que jamais personne ne la retrouve après coup. L’un des héros traverse West Craven au pas de course afin de rejoindre sa petite amie dans la maison abandonnée, mais il croise subitement une demoiselle entrain de se changer et l’observe par la fenêtre. Pour lui cela ne dure que quelques secondes, pour nous, c’est encore une ou deux minutes de perdues, la comédienne remuant l’arrière-train sans arrêt et la caméra zoomant d’avant en arrière sur ses seins et ses hanches.
Si le côté exploitation de la nudité à toujours existé dans la série B ou dans les films d’horreur, cela se limite généralement à une tenue, une scène de sexe ou une manière de mettre en avant une actrice du casting. Ici, c’est tout le reste qui passe à la trappe. Les attaques qui s’ensuivent sont hors champ ou impossible à regarder en raison d’une caméra qui bouge dans tous les sens. Quant au montage, il accentue les floues artistiques ou les lens flares afin de cacher les tueurs et les effets spéciaux qu’utilisait Wolsh pour appâter le contributeur.

 

 

En un mot comme en cent, Muck est une escroquerie. Et même si l’on ferme les yeux sur la nudité vulgaire et constante (vaut mieux pas, on raterait tout le film !), le reste de sa mise en scène prouve que le responsable n’avait aucune ambition artistique. Il tente vainement de copier Quentin Tarantino, à la manière des étudiants en cinéma durant les années 90 et plusieurs segments du film se croisent à la manière de Pulp Fiction, faisant faire des allez-retour entre les personnages et les évènements. Seulement cela se limite à trois fois rien ici, les donzelles se déshabillant en parallèle de conversation et l’idée ne servant que trois ou quatre passages. De la musique décalée est employée constamment dans le film, mais elle n’a pas cette sonorité bizarre et unique comme les sélections Tarantino. Elles ressemblent aux chansons habituelles qui résonnent durant les épisodes d’une série télé à la mode, et me vient alors en tête le pop-up de Scream: The TV Series, qui servaient à acheter les morceaux en ligne.
Une séquence repompe même le décalage horreur / musique rétro, de l’arrachage d’oreille de Reservoir Dogs. Seulement il s’agit d’un viol déplaisant, totalement gratuit et dans un ton très différent du reste du film. Qui plus est il n’y a rien d’autres d’une fille qui hurle là où Tarantino se focalisait sur la performance de Michael Madsen dans le rôle du tortionnaire avant de conclure la scène de façon satisfaisante. Rien de tout cela dans Muck, et Wolsh nous laisse avec une sale impression. Naturellement, l’instant d’après, il reprend son idée de nudité “rigolote” sans se soucier du très mauvais raccord d’ambiance.
Le style Grindhouse est également récupéré pour le générique de fin, avec police de caractères et extraits de mauvaises qualités, mais celui-ci s’étale sur pas loin de 9 minutes et n’intéresse pas du tout. D’autant plus qu’on fini par se gratter la tête lorsqu’apparait crédité un type dont la scène a été coupée au montage…

 

 

J’aimerai m’arrêter là, car je pense avoir parfaitement dressé le portrait de Muck, mais son créateur semble vraiment vouloir tendre le bâton pour se faire battre. La conclusion, qui amène évidemment un cliffhanger censé être résolu avec Muck 3, n’est qu’une fin abrupte, violemment coupée alors qu’il se passe quelque chose à l’écran. Il s’agit bien sûr d’un emprunt à Adam Green et ses Hatchet, qui se terminent tous de cette manière et peuvent être assemblés bout-à-bout pour faire une longue histoire. Seulement si le gimmick de Green était frustrant, il était compréhensible: on avait simplement l’impression d’être coupé en plein milieu d’une scène. Ici la chose est si mal monté qu’on ne réalise même pas ce qui se passe !
L’instant d’avant, les héros terrassent un antagoniste et s’éloignent dans le marécage. Fondu au noir. Un nouveau plan commence et le générique frappe aussitôt. Quelques secondes de plus n’aurait pas été un mal pour montrer les personnages parler, car en l’état on dirait que la scène est issue d’une workprint non finalisée. L’idée est bien de conclure le film sur un évènement surprenant, et quiconque prête attention au film sait ce dont il retourne (les tueurs ont peur de s’aventurer trop loin dans le marais car quelque chose les effraient, et le truc en question est sur le point d’apparaître), mais Wolsh est incapable de mettre correctement en forme son idée…
De toute manière, on le découvre dès les premières minutes du film, lorsque sa merveilleuse trouvaille de “ignorer les présentations, débuter sur l’action” se révèle infructueuse tant il perd son temps à faire parler ses protagonistes, et les faire parler, et parler encore…
Quant à Kane Hodder, là encore il y a tromperie sur la marchandise. S’il est bien présent durant le film, il ne faudra pas cligner des yeux sous peine de le rater: on le voit dans un maximum de deux scènes, dont la première n’est que de quelques secondes ! Il est immédiatement neutralisé par les protagonistes, ce qui en fait l’un des tueurs les moins menaçant du film, et se fait remplacer à la fin par un albinos similaire, à la même carrure, mais incarné par un certain Josh Giodo, cascadeur bien plus jeune.

 

 

En conclusion, Muck est un ratage total et son créateur, Steve Wolsh, à littéralement volé les personnes qui avait cru en lui. Rien de ce qu’il vantait n’apparait dans le film. Même sa belle caméra ne rend pas l’image extraordinaire, puisque le film se déroule essentiellement de nuit dans des décors inintéressant, et que la qualité est de toute façon compressée pour les écrans modernes…
Pour autant ça ne s’arrête pas là, et le truand continue ses méfaits jusqu’à la page IMDB de son œuvre, certainement écrite par ses soins. La section Trivia notamment, où il se vante de beaucoup de choses. Par exemple il explique avoir chorégraphié lui-même la plupart des cascades “impressionnantes” et avoir testés les effets sur lui-même. La Screen Actors Guild lui aurait dit que son scénario est dans le top 5 des plus dangereux qu’ils aient lu, vis-à-vis de la sécurité des acteurs. Le chef du département Son d’Universal Studios aurait tellement été impressionné par le film qu’il aurait fait le mixage lui-même et gratuitement. Enfin, Wolsh aurait eut une vision très particulière de son film sur le plan musical et se serait inspiré de Pierre et le Loup pour la variété de la composition, avec l’idée que chaque personnage aurait son propre thème. Il va sans dire que beaucoup de ces déclarations sont des mensonges.
Et puis, bien sûr, on peut trouver les habituels faux avis qui donnent à Muck un score parfait et une montagne de compliments, alors que n’importe quel utilisateur semble s’accorder à dire que ce long métrage est purement et simplement nul. La pratique est désormais connue, ineffective et en dit long sur l’aspiration artistique du responsable…

 

 

VERDICT: TRICK !

4 comments to Muck (2015)

  • Pascal Gillon Pascal Gillon  says:

    Pas à dire, ça donne envie…de ne pas le voir. Merci pour ce gain de temps 😉

  • agentsmith agentsmith  says:

    je confirme tes dires! film très très mauvais et introduction et fin du film nuls!
    comme on dirait dans une émission sur mtv… next!

    • Adrien Vaillant Adrien Vaillant  says:

      Navré que tu aies dû t’infliger ce truc, toi aussi.
      Et oui voilà, « next », ça résume tout à fait la situation.

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