Lost (and found) in the 5th Dimension
Épisode 27
HARVEY MICHAELS, LA MOUCHE
Magnum, P.I. (1987)
saison 7, épisode 16
“Aidez-moi monsieur Magnum, aidez-moiiiiiii !”
Si elle a fait l’objet d’un reboot depuis peu, la vieille série Magnum avec ce moustachu Tom Selleck reste encore dans toutes les mémoires grâce à sa musique entrainante, ses personnages amusants et le précieux savoir-faire de son producteur Donald P. Bellisario, véritable empereur de la télé en son temps puisqu’on lui doit également Arabesque, Code: Quantum, JAG, Supercopter, et plus récemment NCIS. Que des succès faisant chacun l’objet de petits cultes plus ou moins important à travers la pop culture d’hier comme d’aujourd’hui. Et c’est intéressant puisque ces shows ne datent pas d’hier, Magnum lui-même ayant fait ses débuts en 1980. Je n’ai évidemment connu la chose qu’à travers des rediffusions télé, à une époque où le personnage était encore mis en rivalité avec l’ingénieux MacGyver, et bien que les enquêtes toutes simplettes du détectives privées ne pouvaient pas rivaliser avec les exploits limites Bondiens de ce dernier, elles restaient connues de tous les petits bonhommes des cours de récrés.
Les années passants ce sont pourtant bien les aventures de Richard Dean Anderson qui semblent nous rester en tête, les plus marquantes étant généralement les plus effrayantes. Que ce soit ce faux Bigfoot errant dans la forêt ou cet horrible virus faisant vieillir en accéléré une scientifique et son chien, les séquences à la lisière de l’horreur ne manquaient pas. Surtout lorsque Murdoc, la Némésis du héros, était impliqué, celui-ci n’hésitant jamais à balancer un alpiniste du haut d’une falaise ou à plonger quelqu’un dans une piscine d’eau bouillante. Une fois pourtant, c’est bien Thomas Magnum qui a eu le dessus, juste un court instant. Cela s’est déroulé tardivement à la septième saison, lors de l’épisode Solo Flight (chez nous Dialogue au Sommet), au cours de ce qui semblait être un banal clipshow économique pour la production. Un concept désormais oublié tant les séries ont évoluées depuis lors, mais qui permettait aux showrunners de tricher un peu en tournant un fil rouge simple avant de nous refourguer en masse des extraits d’épisodes précédents.
Ici par exemple le détective se rend seul sur une petite île au large de la Californie, partant faire un peu de randonnée loin de tout et surtout du casting. Pas besoin de décors, de figurants ou de véhicules, l’acteur ayant juste à réciter quelques lignes à haute voix pour meubler. Découvrant l’épave d’un vieil avion de combat datant de la Seconde Guerre Mondial, il se glisse dans le cockpit dans un moment d’égarement mais l’appareil se renverse, lui écrasant les jambes. Déjà bien affaiblit par une piqûre de scolopendre, le voici piégé et victime d’hallucination causée par le venin et la chaleur… Ce qui se traduit surtout pas l’utilisation de flashbacks et de quelques vignettes où d’autres acteurs interviennent derrière un fond noir, comme s’ils étaient coincés dans les limbes. Économique comme je le disais, et l’ironie va assez loin puisque de nombreuses références sont faite à Home From the Sea (saison 4, épisode 1, Record Battu en France) qui faisait déjà la même chose avec un Magnum perdu en haute mer et à la merci d’un requin.
Quoiqu’il en soit c’est dans le dernier quart d’heure que les choses vont déraper. Car durant son calvaire, l’accidenté va faire la conversation à une petite mouche coincée sur une toile d’araignée. Un symbole simple qui va finir par se mélanger aux souvenirs désagréables qui assaillissent le personnage rendu fou par sa situation. L’un d’eux est celui de son dernier client qu’il n’a pas pu aider, un dénommé Harvey Michaels qui l’avait engagé pour découvrir qui avait détourné les fonds de la compagnie qu’il représente. L’échec du détective causa l’accusation de ce type malgré son innocence évidente, et l’image de ce pauvre gars lui demandant de l’aide va lui revenir fréquemment. Et puis, après avoir malencontreusement parlé du film La Mouche à la mouche (“L’original, pas le remake”) dans un moment de délire, les deux choses vont finir par se combiner dans esprit. Sans prévenir Harvey va commencer à changer, opérant une métamorphose progressive un peu à la manière de ce sketch des Inconnus sur la centrale nucléaire.
C’est d’abord une étrange fourrure noire qui lui couvre le visage, tandis qu’une patte noire d’insecte remplace l’une de ses mains, exactement comme dans le film de Kurt Neumann. C’est si soudain que cela provoque l’étonnement, d’autant que les effets spéciaux apparaissent assez cheap de prime abord. Puis horreur: la tête d’Harvey cède la place à celle d’une mouche, mais incomplète et aveugle puisque dépourvu d’yeux. Sa bouche est remplacée par un gros trou rouge béant et on peut deviner des sortes de boutons ou pustules couvrant son épiderme. Lorsqu’il parle, sa voix est étouffée et le masque dont est affublé l’acteur gigote de manière obscène. Et enfin la mouche est là, entière, avec ses gros yeux à facettes. Bien sûr pour un adulte cela provoquera plus le rire qu’autre chose et le résultat ne ressemble à rien d’autre qu’un sympathique costume d’Halloween. Pour un enfant en revanche c’était impressionnant, et le fait que Harvey porte toujours son costume-cravate impeccable malgré sa transformation en rajoutait encore plus dans le surréalisme cauchemardesque.
“Help meeee ! Help meeee !” supplie t-il d’une petite voix comme dans La Mouche. Encore à ce jour la version française me reste en tête. Et avec ça, c’est fini, Solo Flight reprenant le droit chemin du banal épisode hebdomadaire de remplissage. Magnum parvient à attraper un vieux tuyau et faire levier, sauve sa peau et résout même son enquête en deux coups de téléphone. Et la petite bête, la libère t-il ? Aucune idée ! La conclusion aura au moins le mérite de nous faire rire lorsque le détective, soufflant enfin sur son canapé, se frappe par réflexe lorsqu’il autre mouche lui frôle la caboche, réalisant trop tard la signification de son geste. Sympa, mais il faut avouer que sans le monstre on oublierait bien vite cette petite histoire qui n’a d’ailleurs rien d’original. Le scénariste, Jay Huguely, repompe en fait complètement un vieil épisode de La Petite Maison dans la Prairie (saison 1, Money Crop, 1975). A sa décharge il participa aussi au script de Jason va en Enfer quelques années plus tard, ce qui explique sans doute pourquoi il trouva le moyen de rajouter une mouche mutante à l’affaire.
Tant qu’à y être dans les révélations surprenantes, on s’amusera d’apprendre que Robert Phalen, l’acteur jouant Harvey Michaels, fut également l’interprète du Dr. Wynn dans Halloween ! Quant aux stock shots de la mouche et de l’araignée parsemants l’épisode, ils furent acheté à Dreamlight Images, Inc, une petite compagnie qui n’a pas fait long feu mais qui fournit aussi quelques images d’archives à Hellraiser III et à Troll 2. Mince, si on m’avait dis qu’un jour je parviendrais à trouver un lien entre Magnum et le cinéma Bis, j’aurai écrit cet article bien plus tôt !
Commentaires récents