Friday the 13th: Repetition
(2013)
Croyez-le ou non, j’avais prévu d’écrire cette chronique dans le courant de la semaine sans réaliser que ce vendredi était un vendredi 13. A la base je comptais même vous en parler mercredi ou jeudi, avant qu’un coup d’œil sur le calendrier ne change mes plans. Bref ça tombe bien et ça m’évite de me lancer dans un long texte à propos de je ne sais quelle aventure de Jason Voorhees, d’autant que tout a déjà été dit sur le sujet.
Ayant déjà réalisé un article à propos d’un fanfilm sur Vendredi 13 il y a quelques années (et ça venait de chez nous, rappelez-vous), je me suis dis que ça pouvait être amusant à refaire une fois de temps en temps, histoire de remplir un peu le blog et d’exposer un média qui n’est que trop rarement évoqué dans la communauté fantastico-horrifico-Bis. Trop amateur pour les uns, trop anecdotique pour d’autre, pas assez officiel ou tellement commun que cela n’a aucun intérêt… Pourtant il y en a eu du chemin parcouru depuis ces dernières années, et si fut un temps il n’y en avait que pour Star Wars, on peut désormais trouver des courts-métrages intéressant et parfois très réussis, basés sur tout un tas d’univers parfois boudés par leurs propres créateurs.
Bref il y a de la passion, du respect, et si on a déjà fait quelques vidéos dans sa jeunesse, une dimension nostalgique s’installe forcément, permettant de se divertir quelque soit la qualité du film.
Tout ça pour dire que Friday the 13th: Repetition, s’il n’a rien d’unique ou d’extraordinaire, se laisse très facilement suivre sur sa courte durée (moins de quinze minutes) et vous renverra à une époque où vous partiez en expédition dans la forêt avec vos potes et une caméra, en tournant de pseudo films d’Horreur mal foutus, difficile à revoir mais sacrément fun à faire.
C’est un peu par hasard que je suis tombé dessus, parcourant en fait la chaine d’un YouTuber d’origine Serbe, Peter Gagic, alias le Cine-Masochist. Un grand bonhomme adepte de la muscu et qui semble à priori être le type de gars à ne s’intéresser qu’au sport ou à toute autre activité machiste, mais qui se révèle être un incroyable fan de cinéma d’exploitation (ou “Zinema”, comme il le nomme).
Un des intérêts de regarder sa (défunte ?) émission est justement de voir sa passion pour le genre malgré son physique de footballeur américain, du genre à taper sur les Nerds maigrichons. Peter Gagic aime Bruno Mattei, la Série B et Ken le Survivant, ce qui revient à dire qu’il a les mêmes goûts que moi. Et sans partir dans une chronique de Cine-Masochist, j’encourage vivement la vision de quelques épisodes (mention spéciale pour celui sur Adam Chaplin, où il apparaît totalement ivre) entre un Cinema Snob et un Best of the Worst.
Perdu dans sa collection de vidéos, j’y ai découvert ce Friday the 13th: Repetition qui remonte à 2013 et qu’il a commis avec l’aide de son comparse Joseph Choi (en gros, son pote, qui lui prête sa caméra à l’occasion et qui l’aide pour son show). Celui-ci occupe techniquement le poste de réalisateur et de scénariste, mais un coup d’œil au générique montre qu’ils étaient trois ou quatre personnes à tout gérer en terme de tournage, de rôles et d’organisation, dont évidemment Peter Gagic dont l’amour débordant pour Vendredi 13 apparaît fréquemment dans le Cine-Masochist. Pour tout dire, celui-ci se travesti fréquemment en Jason, et a utilisé le masque de hockey comme logo pour l’émission !
En fouillant un peu sur Internet, on peut même constater que les compères avaient pour projet de rendre hommage à Jason depuis 2010, et on retrouve une vidéo nommée Costume Test Footage, où le grand Serbe déambule dans la forêt avec un costume de Friday the 13th Part 3 – très réussi d’ailleurs. Il était évident que les deux allaient tôt ou tard mettre en boite quelque chose de plus conséquent, et c’est sous la bannière Zinematica Production qu’ils tournent leur mini Vendredi 13. Un épisode “banal” dans la vie de Jason, qui ne cherche pas à réinventer la saga ou à explorer le personnage, mais juste à rendre hommage aux Slashers des années 80 et à leur grande… Simplicité.
L’histoire, inexistante, montre un quatuor de jeunes gens se rendre à Crystal Lake, à la recherche du fameux Camp Blood abandonné, pour une session de “tourisme extrême”. Malheureusement pour eux, nous sommes un vendredi 13 et Jason rôde, toujours prêt à massacrer quiconque traine dans son secteur…
Pour vous dire à quel point l’intrigue tient sur un ticket de métro, sachez que ses informations ne se trouvent pas dans le film lui-même mais dans son résumé officiel ! Car vu comme ça, sans recherches, l’histoire paraît encore plus anodine et montre juste une poignée de randonneurs errer dans la forêt à la recherche d’un lieu de visite, se faisant trucider par Jason avant même de s’y rendre !
Pas le temps de développer, il faut dire, avec moins d’un quart d’heure de durée, mais ce n’était de toute façon pas le but.
Friday the 13th: Repetition cherche juste à amuser la galerie avec ses situations absurdes et ses personnages cons comme des balais, le plus drôle étant qu’il s’agit moins d’une parodie que d’une reprise telle quelle des clichés et stéréotypes des années 80. Peter Gagic y joue Ryder, l’habituel sportif moqueur, et va immédiatement traiter son camarade de “gros” juste parce qu’il a du mal à tenir le rythme de la promenade. Douchebag. Il est loin le temps où il n’y en avait qu’un seul par groupe.
Lorsqu’une randonneuse est portée disparu depuis trop longtemps, il minimise forcément: “I’m sure she’s okay”, tandis que la caméra dévoile son corps ensanglanté, paumé un peu plus loin dans les bois. Et quand la situation dégénère et que la panique commence à venir, c’est presque avec découragement qu’il demande aux autres s’il est préférable de quitter les lieux.
Du reste, court-métrage oblige, le scénario se contente de l’habituel carnage, le (petit) casting étant massacré par Jason de façon génialement rétro et toujours avec cette volonté de rendre hommage à une décade de cinéma fou. Ainsi un type se prend un coup de machette en pleine poire, quelque part entre l’handicapé de Friday the 13th Part 2 et le mort-vivant tué par Tom Savini dans Zombie. Le Crazy Ralph de service se fait partiellement décapité, Jason se retrouvant obligé d’utiliser ses deux mains pour l’arracher complètement, tandis que la première victime, nommée Adrienne en clin d’œil à Adrienne King (interprète de l’un des personnages les plus important de la saga) voit sa mort être un improbable amalgame entre celui de Annie du Vendredi 13 original, du gardien de cimetière du 6ème épisode (la bouteille en verre étant ici remplacé par une boite de conserve !) et de cette autostoppeuse mangeuse de banane dans Friday the 13th: The Final Chapter.
Peter Gagic se retrouve évidemment avec la séquence la plus importante, son personnage préférant affronter Jason au corps-à-corps que de fuir. Une tactique qui renvoie au génial Julius de Jason Takes Manhattan, sauf qu’ici le sort réservé au perdant est directement copié sur celui que Patrick Swayze infligeait à son rival dans Road House. Violent, fun et parfait !
Lorsqu’il ne se fait pas trucider à l’écran, le Cine-Masochist interprète lui-même Jason (avec l’aide de deux autres gars) et, comme il le soulignait déjà dans son émission, a particulièrement soigné la gestuelle du personnage. Car si pour beaucoup le tueur de Crystal Lake est le même d’un film à l’autre, c’est surtout Kane Hodder qui a su instaurer son identité définitive, lui donnant un véritable langage corporel: très forte respiration, mouvements d’épaules, gestes de tête plus rapides que le reste du corps… Ils sont tous repris ici. Ce n’est pas un hasard non plus si le look choisi pour cette incarnation évoque Friday the 13th Part VII, le meilleur de tous. Le mort-vivant apparaît décharné, décomposé, avec des vêtements déchirés et jusqu’au détail des mains dont on peut voir l’ossature. Manque toutefois la chaine autour du coup et le détail du masque abimé, vraisemblablement pour des raisons pratiques vu l’absence de budget et de maquillage lourd.
Peu importe car Jason est ici extrêmement convainquant, tant par l’aspect que l’action, et le fanfilm est rempli de thèmes reconnaissables composés par Harry Manfredini au cours de la saga. Cela assure une petite atmosphère qui fonctionne aussitôt que le tueur entre en scène. Moins nécessaire, mais tout de même efficace, l’utilisation du filtre “Grindhouse”, cette fausse dégradation de l’image qui a été popularisé après Planète Terreur.
L’effet est désormais un peu cliché et pas nécessairement souhaitable, mais l’impression de regarder un film endommagé par le temps est toujours sympathique, surtout lorsqu’il permet de diminuer l’aspect numérique des caméras modernes. Ici notamment, plutôt que de jouer uniquement sur les rayures de pellicules, il sert à une décoloration fréquente de l’image avec des piqués de rouges ou de jaunes, comme si elle était brûlée, et créé des erreurs de mise au point à la manière d’un vieux projecteur de cinéma mal réglé.
Ceci confère au film une petite tonalité trash volontaire et originale, les auteurs débordant sur un autre type de film d’Horreur des années 80, le temps d’une séquence qui se réclame plus de Bad Taste, Slime City ou de Street Trash (toutes proportions gardées). Et donc, alors que les héros se perdent en chemin, ils tombe nez-à-nez avec l’habituel fou les prévenant du danger. Le teint blafard, une veine visible au coin du front, il exhibe une main blessée et couverte d’un bandage sale. Il se saisit soudainement d’une paille et la plante dedans, afin de boire… son sang ? Ce personnage décalé va même jusqu’à briser le quatrième mur peu après, s’adressant directement aux spectateurs.
Après le générique de fin, son cadavre réapparaît, le corps décapité attrapant sa propre tête pour mieux la remettre sur son cou, avant de demander au public ce qu’il a manqué !
Nous sommes ici clairement dans un territoire différent que le Slasher et Vendredi 13 en général, mais cette bizarrerie fonctionne tout de même. Un peu comme si, tandis que l’intrigue liée à Jason est en progression, une toute autre histoire, plus proche d’un Troma ou d’un Frank Henenlotter, avait lieu au même moment, les deux protagonistes se croisant le temps d’une scène.
J’avoue que cela m’a interpellé et, persuadé qu’il y en avait sans doute plus derrière cet étrange personnage (qui répond au doux nom de Gerald Gerald Geraldson), j’ai préféré fouiller un peu et effectivement: il s’agit d’une sorte de guest star locale, l’interprète (Gerald Varga) étant un comédien « alternatif » faisant surtout des sketches et du stand-up. Se décrivant comme un “Horror comedian”, il se présente toujours sous cet aspect de goule mi-macabre, mi-blagueuse, et semble taper dans l’humour noir et/ou Trash. Toute l’équipe de Friday the 13th: Repetition se retrouve d’ailleurs à ses côtés dans l’étrange vidéo “One Night Stab” Comedy Special, sorte de démo bric-à-brac de la vedette.
Si je n’y ai pas particulièrement prêté attention, ceci n’étant pas particulièrement ma tasse de thé, impossible de ne pas jeter un œil à Jason Voorhees vs. GG Geraldson, un bonus d’une minute probablement improvisé en cours de tournage. Là, le mort-vivant (qui apparait ultra crédible entre son look, sa carrure et la musique) s’apprête à faire une nouvelle victime dans la forêt… pour se faire défoncer aussitôt par celle-ci. “… the fuck do you want, Jason ?”, demande Geraldson qui essayait tout simplement de pisser. Et celui-ci de lui uriner sur la tronche après l’avoir envoyé au tapis: “This is for Part 7” dit-il, comme si Jason était responsable de l’odieuse censure de cet épisode !
Très con, indéfendable, mais merde, ça fait rire !
Sinon, il n’y a pas grand chose à dire. C’est un petit fanfilm sans argent, limité sur beaucoup de choses et fonctionnant surtout auprès d’un certain public uniquement. Au rayon des défauts on peut quand même évoquer une fin abrupt, ne jouant pas plus que ça avec le concept de la Final Girl et qui donne l’impression qu’il y aurait pu y avoir encore une scène ou deux après tout ça. Le filtre “Grindhouse” détériore parfois un peu trop l’image du film et, dans certains cas, on est moins sur une mauvaise qualité cinéma / VHS et plus sur une compression mal foutue des touts débuts de YouTube. Enfin, pour une raison que je n’explique pas, le monteur à choisi de rajouter quelques grognements sonores lorsque Jason entre en action, et cela devient beaucoup trop envahissant lors de son combat contre le Cine-Masochist. Enfin, le masque de hockey sélectionné possède cette couleur jaune naturelle qui, avec le filtre, devient parfois orange fluo !
Bref, que des petites choses qui ne devraient pas vous empêcher de sourire devant ce court-métrage, si toutefois ce style de fanfilm est votre tasse de thé. Difficile quand même d’en vouloir à un court-métrage amateur qui se conclus avec du Pseudo Echo (et la fameuse His Eyes sur laquelle dansait une jolie punkette dans le mal aimé A New Beginning).
Je ne peux que vous encourager à lui donner sa chance et à visiter sa page Facebook, à partir de laquelle vous pourrez facilement retrouver les différentes vidéos que j’ai évoqué ainsi que quelques images et photos de tournage. Notons par exemple un aimable teaser singeant celui de Jason Takes Manhattan. Et puis quel joli poster, justement dessiné par Peter Gagic !
Tant qu’on y est, n’hésitez pas non plus à tester son Cine-Masochist. Il semble avoir abandonné la vidéo, mais pas la Série B, aussi il n’est jamais trop tard pour lui apporter un peu de soutien.
PS. A repérer tout au long du film, la grosse erreur de débutant que nous avons tous fait: oublier de cacher les sacs et autres affaires de tournage, qui apparaissent alors constamment dans un coin de l’image. Fou rire garanti !
GALERIE
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