Flagellation Mentale, Chapitre 8

FLAGELLATION MENTALE

 

Je fini par me réveiller encore une fois. Et je le regrette immédiatement.

Je… rêvais… ?

Pour une fois que ce n’était pas un cauchemar…

… J’étais dans ses bras et il me berçait…

Ma tête semble sur le point d’éclater et mon ventre veut faire un remake d’Alien. Le sang a séché partout autour de moi, j’ai encore dû perdre un bon litre. Je me sens un peu moins faible, mais j’ai la bouche pâteuse. La fièvre n’est pas encore tombée.

C’était comme avant…

Je vais dans la salle de bain. Les carreaux cassés du carrelage m’abîment les pieds. Devant un grand miroir que je fais apparaître, je regarde mon ventre.

Je suis une cicatrice vivante.

… Les sutures sont plutôt bien faite. Je pense que je vais éviter l’infection.

En parlant d’infection… Ça sens bizarre. Le scotch sur mon bras paralysé me démange atrocement. Je renifle. Ça pue.

Les plaies doivent être purulentes. Ça risque de s’aggraver si je ne fais rien…

… Mais au fond, quelle importance ? Quoique… Je pensais bien avoir besoin d’aide pour mon ventre et finalement j’y suis arrivée toute seule…

Je trempe mon bras sous l’eau et défait délicatement le scotch… Quand je pense à ce rêve… C’était agréable… Que dirait Vincent s’il me voyait comme ça ?

Lorsque le ruban adhésif s’enlève, il y a une membrane composée de colle,de chair, de sang et de pus qui relie ma peau au scotch. Je hurle. L’eau ne me fait aucun bien. La blessure est très moche.

Lui qui s’affolait dès que je me coupais le bout du doigt. Dès que je me cognais.

Surmontant la douleur, réprimant les hauts-le-cœur, je m’emploie avec ma main libre à déchirer cette membrane translucide de couleur pourpre. Ce n’est pas que de la colle, et la douleur que je ressens me fait comprendre qu’une partie des chairs à vifs a fini par prendre cette forme. C’est ma propre peau que je déchire.

… Depuis cette époque, combien de temps c’est écoulé ?

Je n’arrête pas de hurler. Enlever tout ce scotch me paraît durer une éternité et chaque millimètre de déchirure me provoque une douleur intense. Des bords des plaies, finalement dégagées, commencent à s’écouler du sang…

Et depuis tout ce temps, jusqu’à quel point ai‑je changée ?

Et du pus… Ça coule, ça ne s’arrête pas. J’ai l’impression d’avoir de l’acide dans les veines. Et lorsqu’enfin le ruban adhésif est complètement retiré, qu’il n’y a plus de membrane le reliant à mes blessures… Je suis paralysée. Terrassée par la douleur.

… Vincent…

Je reprends difficilement mon souffle. Je suis encore trop faible et des points noirs dansent autour de mes yeux. Je frôle encore l’inconscience, mais la douleur m’empêche de sombrer. Et l’air de rien… Je me sens encore vivante malgré ce corps en putréfaction et ce cœur vide.

… Aide moi… S’il te plaît…

Je n’accepterais pas d’être mise à terre comme ça. Cette douleur n’est RIEN ! Je suis plus forte ! Je suis au‑dessus de ça !

Par pitié… Quelqu’un…

“Je suis forte !”

Je bande les muscles de ce bras meurtris et le lance en avant après l’avoir sorti de sous le robinet. Il vient frapper un coin du miroir, ce qui me vaut de me ré‑entailler la main, comme ce matin.

… Au secours.

J’halète, je suis en nage. Le poing toujours contre le mur, les muscles serrés, je contracte. Le sang jaillit par petites gerbes. Le pus également. Je le chasse brutalement de mon corps.

… Je suis perdue… Je sais plus quoi faire…

La douleur semble disparaître maintenant que je suis réveillée. Je lave mon bras et le désinfecte avant de le panser correctement. Puis je m’occupe de mon ventre. Et des autres blessures.

Devant le miroir, j’ai l’impression d’être à moitié devenu une momie. J’éclate de rire.

J’ai conscience que je déraille. Mais je ne peux pas tomber plus bas dans la folie.

Je SUIS la folie…

Je suis forte car je suis une Sang Réel qui ne craint pas la mort. Qui EST la Mort. Qui peut tout détruire. Je suis puissante.

Je n’ai peur de rien. Rien ne peut m’atteindre.

Je n’ai plus besoin du passé. Je suis autre chose maintenant.

Cette humanité je ne la rejette pas. Car elle est partie d’elle-même. Mais ça ne me manque pas. Je n’ai pas besoin de ça. Je n’ai pas besoin des souvenirs de Vincent et de Cynthia…

… Je n’ai pas besoin d’être aimée, je n’ai pas besoin d’amis. Je suis mieux sans !

… Non ?

…Dis-moi, toi qui me regardes à travers ce miroir. Avec ces beaux yeux verts.

… Que suis-je devenu ?

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