Retrouvailles, Chapitre 2

RETROUVAILLES

 

II.

 

    Je retire ma main et elle replace ses cheveux. Je m’apprête à lui faire remarquer que c’est inutile mais je m’abstiens. Sorcière, vampire ou simple humaine, Alice est avant tout une jeune femme et sa féminité lui est importante. Même si je ne me serai jamais permis de la critiquer…
– Allez… Examinons tout ça.
Elle acquiesce et me suis jusqu’à ma chambre. Très vite elle retrouve ses petites manies et tourne autour de chacune de mes possessions de façon très intéressée. Au moins cela lui redonne le sourire et je la laisse faire le temps de préparer mes instruments.
    Dans mon dos elle remue, sautille et trottine presque sur ses deux jambes. Notre rivalité s’est toujours expliqué par notre passion commune pour la magie, il est donc logique que de pénétrer dans mon Sanctuaire privé et de pouvoir contempler mes trésors lui plaise énormément. Et s’il n’y avait pas ces blessures, elle tenterait probablement de me voler ou de négocier quelques échanges… C’est là toute l’histoire de notre différent. Je suis très attaché aux études et la valeur matérielle n’existe pas pour moi. Alice, probablement parce qu’elle possède un train d’avance sur moi en terme de connaissances, est fascinée par les choses clinquantes et souhaite les récupérer pour le simple plaisir de posséder. En d’autres termes, si je suis un chercheur, Alice est une collectionneuse.
    Son attitude, en temps normal, me laisse indifférent mais fini par m’agacer à la longue. Pour une fois elle me rassure. Au moins j’ai la certitude qu’Alice est toujours celle que je connais, et qu’elle n’a pas été anéantie par toutes ces épreuves…
– Assieds-toi sur la table s’il-te-plaît.
Elle revient vers moi avec un sourire un peu gênée avant d’obéir et de modifier sa coiffure afin de me donner une bonne vision de son œil.
– Regarde vers la lumière et ne bouge plus.
Je chausse un monocle-microscope et colle mon visage le plus près possible du sien. Je peux sentir son souffle chaud.
    Le globe oculaire est littéralement fissuré, avec une cicatrice zigzaguant tout le long. Je vois nettement où les tissus on été tranchés en deux et constate que son iris et sa pupille ne forment plus un cercle parfait. Lorsque les deux parties se sont recollées l’une à l’autre, un léger décalage d’un bon millimètre s’est effectué. Quel genre d’hôpital a pu laisser passer une telle chose ?

    J’utilise un cristal taillé pour générer un jeu de lumière et tester ses réflexes. Le bilan est très négatif, la pupille ne réagissant pratiquement pas.
– Ta vue doit être très mauvaise…
– Un grand fou.
– Tourne le sur la droite… La gauche maintenant… En haut et en bas ?
Le mouvement est fluide et ne montre aucune trace de paralysie.
– Ça te fais mal ?
– Oui.
Je retire ma lunette et me recule, Alice me fixant en attente d’une réponse.
– L’entaille est profonde. L’avantage c’est qu’en te métamorphosant tu as pu court-circuiter le processus de dégradation des tissus. En temps normal tu te serais probablement totalement régénérée si l’arme n’avait pas été à base d’argent, auquel tu étais allergique sous ta forme de loup.
– Je sais tout ça.
Je lève le doigt pour poursuivre.
– A partir de là, tu te retrouve “bloquée” avec une blessure qui refuse de s’arranger ou de s’aggraver. Donc nous avons deux choix: te débarrasser de ta malédiction puis ensuite traiter les lésions, avec le risque que ta forme humaine ne puisse pas les guérir…
Elle tremble nerveusement.
– … Ce que je peux faire. La deuxième solution étant de s’occuper d’abord de ton œil et de ton genou puis ensuite de défaire la malédiction. Mais pour ça j’aurais besoin des personnes et des armes qui sont à l’origine de ton état et donc que tu te confrontes à mes parents. Est-ce que tu t’en sens capable ?
Elle hésite.
– Tu dis ça comme si nous avions encore des différents, eux et moi…
– Vous n’en avez plus, mais je sais que tu as peur. Je t’ai vu face à eux.
Elle ne répond pas, perdue dans ses pensées. J’imagine que son esprit doit être très perturbé aussi je décide de lui laisser encore un peu de temps pour se décider.
– Bon. On passe au genou ?
Je lui fais un petit sourire confiant pour la rassurer et me rapproche d’elle.
– Installe-toi et donne-moi ta jambe.
Sans un mot elle obéis, s’asseyant correctement et ôtant les pans de jupe pour libérer sa cuisse. Elle la lève et je l’attrape délicatement, me penchant pour examiner l’impact de balle qui troue son genou. Elle se laisse faire mais je sens sa respiration devenir plus rapide. Je lui jette un regard et je lis l’anxiété dans son regard.
– Tu peux t’allonger pour te mettre plus à l’aise, tu sais ? Tu veux un oreiller ?
Elle ne fait aucun commentaire et se laisse doucement partir vers l’arrière, relevant tout de même la tête pour surveiller ma réaction. Pour ma part, mon attention retourne vers sa jambe.

    La blessure par balle est la plus impressionnante, un cratère énorme et très précis: le tireur voulait faire sauter la rotule et maximiser les dégâts. Ma mère a toujours été une tireuse d’élite… La tête a été retirée depuis longtemps mais pas avant le retour à la forme humaine. De ce fait, pas mal de matière osseuse est manquante. Les bords de la plaie sont cautérisés, rigides, mais heureusement non infectés. En revanche je ne peux pas en dire autant des deux autres trous formés sur les côtés de l’articulation…
    Les médecins ont traités la blessure d’une façon très primitive. Ils ont enlevé le corps étranger et fait tenir la fracture grâce à un très ancien système d’attelle. Pour remplacer le genou détruit, une rotule artificielle a été installée et maintenue en place par une épaisse broche directement vissée de chaque côté de l’articulation. Des trous ont été effectués pour ensuite visser le tout à un fixateur externe sanglé sur sa jambe.
    Un tel appareil est désormais conçu avec des matériaux légers et étudiés afin de minimiser la douleur. Dans le cas présent, il s’agit d’un artefact immonde et contre-performant. Les chevilles métalliques, qu’elles doit avoir tendance à resserrer un peu trop, frottent sur l’épiderme et causent de nombreuses brûlures et écorchures qui s’infectent rapidement. Le fixateur lui-même est vieux, ses lanières de cuir mordant la peau. La rotule en plastique ne permet pas de bouger la jambe au maximum, la limitant à de petits pas boiteux, et la broche qui la retient me semble bien trop lourd pour le corps d’Alice.
    Très doucement, je teste des mouvements de jambe, laquelle émet un grincement horriblement à chaque fois. Craignant de lui faire mal, je ne force pas le geste et repose le membre très délicatement contre la table. Alice ne dit rien, ne regarde même plus. L’état de la blessure la dégoûte.
– Je vais retirer le fixateur si tu veux bien. Si je te fais le moindre mal tu me préviens tout de suite.
Elle acquiesce à peine. Je sens qu’il faudrait que je la rassure mais j’en suis incapable. A la place j’entreprends de dévisser les chevilles, j’enlève les sangles et je retire l’appareillage. Je scrute la blessure d’un peu plus près, relevant les différents dommages à soigner. Des copeaux de peau morte bordent les bords de chaque plaie et des croûtes de pus séchés recouvrent les zones les plus abimées.
    Une grimace se forme involontairement sur mon visage. Je relève les yeux à ce moment et ça ne manque pas: Alice l’a vu. Pendant un bref instant nos yeux s’accrochent et son regard pèse sur moi, ce n’est pas difficile de comprendre que ma réaction ne lui a pas plus. Cette déception se fait toujours ressentir lorsqu’elle tourne la tête pour m’ignorer. Je la fixe un moment en pensant à m’excuser mais c’est le poids anormal de son genou qui me ramène à la réalité.
    La jambe d’Alice pend mollement entre mes mains. Sans le fixateur, elle n’arrive même plus à la bouger. Le membre est inerte, inutile. De chaque côté du genou apparaît deux morceaux de métal, comme les boulons dans le cou du Monstre de Frankenstein. Les têtes de la broche… L’envie de retirer cette foutue barre métallique me démange, mais je risquerais de lui faire mal. Tâchant autant que possible d’ignorer nos sentiments à tous les deux, je garde un ton neutre.
– La broche n’est pas adaptée. Il t’en faudrait une plus mince, de meilleur confection.
Aucun commentaire. Cette fois je réagis. Je

 

(…)

Texte inachevé, jamais terminé. Il s’agissait d’une tentative de faire une suite / réécriture de la nouvelle Retrouvailles (abandonnée également), où Alice retourne parmi ses amis après ses mésaventures et tente de renouer avec eux malgré ses peurs et ses blessures. Si ces deux chapitres se situent après celle-ci, j’ai préféré les appeler 1 et 2 par simplicité, d’autant que je n’étais pas sûr de la chronologie au moment de l’écriture. Ci-dessous deux petits morceaux qui devaient apparaitre à la suite du texte, dans le paragraphe laissé en plan.

• Vincent: « Pourquoi tu te n’es pas épargnée….. ? »
• lui applique un baume cicatrisant en attendant

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