Messenger (Beetlejuice, 1988)

Lost (and found) in the 5th Dimension

Épisode 30

 

MESSENGER

Beetlejuice (1988)

 

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Carmen Filpi, c’est l’un de ces acteurs dont vous connaissez le visage mais ne vous souvenez jamais du nom. Un vétéran des seconds rôles, voir même de la figuration, doté d’une tronche inoubliable qui colle aussi bien au gros Z comme The Garden of the Dead qu’à la production hollywoodienne comme Wayne’s World. On a pu l’apercevoir à travers tout un tas de série B: Alligator 2 avec Richard Lynch, The Ice Pirates avec Ron Perlman, Le Justicier de Minuit avec Charles Bronson… Il fut le révérend alcoolique que le Dr. Loomis croisait dans Halloween 4, et à la manière de George “Buck” Flower, il fit sa carrière en jouant principalement des clochards. Il en était un dans De Sang Froid avec Charlie Sheen, dans New York 1997, Pee-Wee Big Adventure, Ricky ou la Belle Vie et tout un tas d’autres films et séries télé. Sans surprise il tapa dans l’œil de Tim Burton, qui comme Joe Dante n’est jamais le dernier pour caster des gueules particulières et l’engagea sur plusieurs de ses œuvre: Ed Wood, Pee-Wee et Beetlejuice, où il est absolument méconnaissable, et pour cause !

Son personnage est l’un des nombreux fantômes qui hantent l’au-delà, ou plutôt l’agence d’aide pour revenants où se rendent les protagonistes après leur mort. Tués dans un accident de voiture, Barbara et Adam Maitland découvrent que de nombreux mois se sont écoulés depuis leur décès et qu’une nouvelle famille vient d’emménager dans leur demeure, saccageant tout en s’installant. Incapable de se faire voir ou entendre, et donc d’effrayer ces indésirables, le couple s’en remet à leur manuel de spectres débutants pour trouver une solution et se retrouve dans une sorte de service social pour personnes décédées, où un référent va leur expliquer les étranges règles de l’après-vie. Une caricature évidente des administrations de l’état très proche de celle des Douze Travaux d’Astérix avec sa Maison qui Rend Fou, mais remplie de fantômes cartoonesques à la Ghostbusters: explorateur à tête réduite, assistante de magicien coupée en deux, plongeur avec un requin accroché à la jambe… Clairement l’une des meilleurs séquences du film.

 

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C’est là que nous trouvons notre personnage, simplement nommé “Messager” dans le générique de fin et dont le rôle se limite à une courte scène. C’est lui qui vient chercher les héros dans la salle d’attente pour les mener à leur référante, leur indiquant le chemin à prendre avant de retourner à son travail. Anecdotique sur le papier, mais inoubliable à l’écran en raison de son aspect complètement dingue: l’homme est plat comme une crêpe, complètement écrabouillé parce un ou plusieurs véhicules. A sa mort il ne devait rester de lui qu’une tâche sur la route et il conserve encore des traces de pneus sur le corps. Incapable de tenir debout vu son état, il a été suspendu à des fils, se déplaçant via un système de câbles et de poulies le dirigeant partout dans le bâtiment. Un peu comme un rideau accroché à une tringle que l’on tire dans un sens ou dans un autre ! Il n’est pas le seul dans ce cas d’ailleurs et on peut apercevoir dans le décors un collègue pendu qui opère de la même façon. Mais malgré son apparence, il est plus jovial qu’il n’en a l’air.

A priori un rien agacé – au même titre que tous les autres – de l’ignorance des Maitland qui débarquent sans rendez-vous, sans leur manuel, et peut-être un peu trop tôt considérant qu’ils sont mort récemment, le Messager leur lance le même regard désapprobateur que ses collègues. En vérité personne ne leur en veut et les travailleurs se montrent ainsi avec tout le monde: ils ont atterri là parce qu’ils se sont suicidé, comme l’indique la guichetière à l’accueil, et ne cachent pas leur exaspération, d’autant plus qu’ils doivent s’occuper de victimes d’accidents qui elles auraient préféré continuer à vivre. Un détail qui permet de comprendre que notre bonhomme s’est volontairement mis sur le chemin d’une voiture ou d’un camion pour en finir. Et pourtant, alors qu’il accompagne nos tourtereaux, il n’est pas au-dessus d’une blague: de sa petite voix de dessin animé, il leur demande de quoi il a l’air étant donné qu’il n’y a pas de miroir dans en ces lieux (sur Terre les fantômes n’ont pas de reflets).

 

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N’osant pas lui avouer la vérité, Barbara et Adam élude le sujet et lui dise qu’il a l’air bien, visiblement embarrassé pour lui. Et l’autre de dire d’un air faussement soulagé qu’il se sentait un peu à plat ces derniers temps (“I’ve been feeling a little flat”) avant d’éclater de rire. Ce glorieux spécimen disparaît ainsi de notre vue, se faufilant à travers une minuscule fente entre deux énormes piliers, là où personne ne pourra le suivre. Car le système à pleinement mis à profit son handicap et on peut imaginer qu’il possède tout un tas de raccourcis pour aller et venir sans perdre de temps. C’est hélas la dernière fois que nous voyons le personnage, même s’il est visible en arrière-plan quelques temps plus tard lorsque les Mailand retournent à l’agence pour un autre entretien. Rien à déclarer cependant puisqu’il vaque à ses occupations avec le pendu. Fort heureusement on peut désormais compter sur la haute définition de l’édition Blu-ray du film pour le détailler un peu plus.

Car entre les gros plans sur l’acteur et ce bref moment où un mannequin est utilisé le temps d’un raccord, on peut désormais voir l’état pitoyable de sa carcasse, totalement réduite en charpie. Le Messager tient un document dans une main (Try & lose this one), et en l’observant attentivement on peut voir qu’il porte un costume cravate. Il est désormais possible d’avoir un bref aperçu de ses jambes pendouillantes et inutiles, l’une semblant même avoir été retournée et pliée sur elle même, un peu comme si l’on avait mal repassé la manche d’un pantalon. Des os brisés jaillissent de ses bras, ses doigts sont tordus dans tous les sens et sa peau est craquelées un peu partout en raison des pressions incroyables auxquelles il fut soumis. Même ses cheveux sont stylisés, avec un côté encore bien coiffé et l’autre totalement en pétard. Le soin apporté à l’ensemble est en fait assez ahurissant, surtout pour un résultat à peine discernable à l’écran. De nos jours, on l’aurait sans doute torché à coups de CGI sans trop en faire…

 

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S’il ne jouit pas d’une aussi grande notoriété que son collègue Betelgeuse, n’apparaissant d’ailleurs même pas dans le cartoon, le Messager – souvent rebaptisé Road Kill Man par les fans – a quand même su marquer les esprits et on peut retrouver sa trace ici et là à l’occasion. Des marque-pages et des patches à son effigie sont trouvables sur Etsy par exemple. En Octobre dernier, malgré le virus, les studios Universal créèrent une maison hantée Beetlejuice à l’occasion de leur événement Universal Studio Orlando Fall & Halloween Experience, y reproduisant de nombreux éléments du film. Notre spectre y apparaît alors, toujours accroché à ses fils, répétant quelques répliques aux visiteurs. Théoriquement il devrait revenir à la fin de l’année pour Halloween Horror Nights 30, ce que l’on souhaite de tout cœur. Après tout il est de plus en plus question d’un Beetlejuice 2, alors ça ne serait pas un mal de le mettre un peu en avant pour le rappeler au public. Qui sait, cela pourrait lui valoir un petit caméo…

Mais si c’est le cas, Carmen Filpi ne reprendra pas le rôle, hélas décédé en 2003 à l’âge de 80 ans. Difficile d’imaginer ce qu’il fait depuis tout ce temps au Paradis, mais espérons qu’il y picole bien et s’amuse à faire la manche pour choquer les dévots. Car franchement, cela lui ira mieux qu’un travail à l’administration divine.

 

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2 comments to Messenger (Beetlejuice, 1988)

  • Roggy Roggy  says:

    J’ai revu le film récemment et je suis complètement d’accord avec toi sur cette séquence située dans cette agence pour fantômes. C’est pour moi le meilleur moment de Beetlejuice avec ce personnage particulièrement réussi. Bel hommage en tout cas de ta part et belle plume sur le « Messenger » et cet acteur dont, je t’avoue, je ne connaissais pas bien la filmographie.

    • Adrien Vaillant Adrien Vaillant  says:

      Merci bien Thierry, et content de voir que je ne suis pas le seul à aimer cette scène ! Quant à Carmen Filpi, tu l’as forcément déjà vu plusieurs fois sans faire gaffe ! Dès que tu reconnaitra son visage, tu finiras par l’identifier à chaque nouvelle apparition.

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