L’ENCYCLOPÉDIE DES MONSTRES
• Le Grimoire de Gideon Fisk •
Un livre fait de peau humaine, avec un visage, et contenant des formules permettant d’invoquer des démons, ça vous dit quelque chose ? Et pourtant non, ce grimoire n’est PAS le Necronomicon Ex Mortis. C’est une contrefaçon provenant du film Evil Toons de Fred Olen Ray. La version discount, si vous préférez. Les origines de ce livre remonte au 17ème Siècle, en Angleterre. Il s’agit d’un ancien livre de sorts pour sorciers Kandariens, lesquelles peuvent conjurer les démons de l’enfer qui sont représentés dans ses pages. Dans les années 30, il est ramené en Amérique par Gideon Fisk, joué par le regretté David Carradine, qui désire l’étudier pour obtenir certaines connaissances. Il va alors libérer un pouvoir qui le dépasse…
Le livre contient divers textes et surtout des images obscènes représentant des démons qui peuvent être invoqués si une certaine formule est lue à voix haute. Une créature pourra ainsi prendre une forme “vivante” et s’attaquer aux humains. Fisk cherchera détruire le livre mais échouera et décidera de se suicider. Une réaction qui peut paraître un peu excessive, mais il semblerait qu’il s’agisse du seul moyen restant pour se débarrasser du maléfice. Se faisant, il va cependant damner son âme pour l’éternité et se retrouver dans les limbes, bien vite rejoint par le grimoire…
Au fil des années la maison où s’est déroulé le drame va connaître de nouveaux propriétaires, mais tous vont se volatiliser comme par magie, sans laisser de trace. Des faits à attribuer au grimoire, sans doute, et de quoi donner à l’habitation la réputation d’une maison hanté. Elle va quand même trouver un nouvel acquéreur durant les années 80: c’est pour préparer son emménagement qu’une équipe féminine de nettoyage débarque, devant passer la nuit sur place pour tout remettre en ordre. Dans la cave (et non, ce n’est pas censé être un garage) les filles vont découvrir un coffre ayant appartenu à Fisk et l’ouvriront malgré l’avertissement inscrit sur la malle, découvrant des artefacts en rapport avec le grimoire.
La dague, décrite dans le livre, qui doit être plongée dans le cœur d’un démon afin de l’anéantir.
Un linceul, qui permet d’envoyer l’âme du défunt directement en Enfer.
Et le crâne pourrait être celui de Gideon Fisk, mais cela soulèverait la question de savoir qui l’a rangé là.
L’esprit de Fisk y verra là l’occasion parfaite pour se débarrasser du livre et son âme retourne sur Terre, son but étant de donner un corps vivant à la force démoniaque afin de la tuer avec la dague. Mais pour cela il faut que quelqu’un récite à voix haute une formule particulière inscrite dans les pages du manuscrit. Il donne le livre aux filles durant la nuit et celles-ci vont évidemment feuilleter l’ouvrage. Le hasard fait bien les choses puisque l’érudit du groupe est capable de traduire les écritures, qu’elle assimile à du latin ancien.
“Demons of the mind, hear this summons. Give us your energy to that of the unliving for that wich lives not may never die. We are devoted slaves, give us your bodies for that may live for the life and the death. We beg of you, answers our plea”. Le plus amusant reste la présence d’une petite note en fin de page, avertissant sur le danger de prononcer cette formule à voix haute: “In the name of God, if you value your immortal soul, never ever ever ever read the above incantation aloud, and I mean don’t. Never.”
Il est peu probable que Fisk ait lui-même laissé ce message puisque son plan réside justement dans l’incarnation d’un démon. Serait-ce une mise en garde pour les sorciers débutants ? Quoiqu’il en soit la lecture permet l’incarnation d’une des créatures du livre, celle que l’on dénomme L’Esprit de la Bête. A Minuit précise, elle nous apparaît alors… sous la forme d’un toon. Un monstre de dessin animé que l’on doit à Chas Balun, critique pour Fangoria et Gorezone, et doublé par Fred Olen Ray lui-même. Cette incarnation du Mal est plutôt originale et pas vraiment terrifiante, mais ne nous y trompons pas. C’est un véritable pervers qui ferait passer le loup de Tex Avery pour un gentleman. Il joue les voyeur, saute sur sa proie et la viole. Accessoirement, il la tue en buvant son sang, cachant son cadavre dans la cave.
“In reading the incantation aloud, the spirit of the beast will be release in the world of the living to corrupt, kill and collect souls.”
Cela lui permet de devenir réel et il peut même changer d’apparence, prenant celle de sa victime pour se fondre dans le groupe. Pour gagner sa liberté, il doit désormais envoyer des âmes humaines à son maître et prévoit donc de tuer les autres junes femmes, plus quelques autres en bonus. Sa méthode est plutôt classique, façon vampire avec dentier proéminent, mais il reste très libidineux et ne peux pas s’empêcher de déshabiller ses victimes même si cela ne lui sert à rien. Et il mort Dick Miller à la bite, ce qui paraît presque logique (dick signifiant queue). Pour envoyer les âmes en Enfer par contre, c’est déjà moins commun. Il doit se servir d’un des objets de Fisk, le linceul spirituel (soul shroud), qui envoie l’âme d’un mort en Enfer lorsqu’il est placé sur le corps en une sorte d’emballage cadeau. “Comment tu le sais ?” demande un personnage. “C’est marqué dans un coin !”, répond un autre. Et oui, notice incluse.
La Bête ne se contente pas de tuer tout le monde. S’il lui arrive de se moquer ouvertement de ses victimes, voir de casser le 4ème mur (“I’ll get you in the sequel for this”), elle a également un plan: libérer les autres images du livre et leur donner forme, et pour cela il lui faut quelqu’un pour relire la formule, en l’occurrence celle l’intello du groupe. Heureusement Fisk interviendra à temps pour stopper la créature, lui perçant le cœur avec la dague qu’il aura subtilisé pendant ce temps. La Bête retrouvrae sa forme première et tentera de se réfugier dans le grimoire où il serait a l’abri d’une destruction totale, mais suivant les conseils de Bruce Campbell dans Evil Dead, Fisk et la survivante vont brûler le livre en le jetant dans la cheminé, pla_ant le linceul sur ses restes pour réexpédier tous les démons en Enfer…
L’ouvrage n’est plus et la malédiction de Gideon Fisk est levée, libérant son âme. En guise d’excuse et de remerciement, il offrira un dernier cadeau à la jeune femme avant de disparaître et les récentes victimes du monstre reviendront toutes à la vie sans garder le moindre souvenir des évènements. Comme ci toute cette histoire n’était qu’un rêve. Mais cette histoire est vraie de l’aveu du réalisateur, et le monstre du film aura même joué son propre rôle… On pourra en rire, d’autant plus qu’en réutilisant les démons de Kandar, Evil Toons est plus susceptible de faire partie de l’univers étendue d’Evil Dead que du nôtre. Il reste toutefois très troublant de voir a quel point la mort de David Carradine dans le film évoque celle dont il sera véritablement victime des années plus tard…
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