Bien sûr la chose la plus importante associée à Marvel Comics ce mois-ci est le décès de Stan Lee. Concernant son univers fictif cependant, il est difficile d’évoquer quoique ce soit d’intéressant s’y déroulant tant la compagnie semble désormais n’exister qu’à travers controverses, insultes, propagande socio-politique hors-propos et surtout de très mauvais livres écrits et dessinés par des « artistes » dénichés sur Tumblr et payés au lance-pierre, ou par de vieux cons s’amusant à détruire leurs anciens héros désormais trop Blancs et trop macho (Slott avec Spider-Man, Bendis avec Iron Man). Quelques bonnes choses émergent de temps en temps comme l’excellent Immortal Hulk, mais rarement la Maison des Idées ne s’est montrée aussi mauvaise et peu créative.
Il faut dire qu’elle a depuis longtemps perdu la confiance de ses fans à force d’agressivité envers ceux critiquant ses travaux et à cause de ses choix de direction. Secret Empire, le Big Event de Nick Spencer, est particulièrement notable pour avoir détruit l’intérêt d’une grande partie du lectorat jusqu’ici confiant et fidèle. Résultat: non seulement les ventes des différentes revues sont en chute libre, mais les nouveaux évènements organisés autour de l’univers des super-héros n’attirent plus personne. Et ainsi leur grande intrigue actuelle, Infinity Wars – qui surf bien entendu sur le succès du Marvel Cinematic Universe et de son blockbuster Avengers: Infinity War – ne déplace pas vraiment les foules.
Il faut dire que point de départ n’a rien d’extraordinaire et recycle globalement un Event précédent, Battleworld, où le Dr. Doom devenait un dieu et reconstruisait le multivers à sa façon, créant un Terre patchwork à partir de différents mondes parallèles. Ici c’est à peu près la même chose: Gamora, la fille de Thanos popularisée grâce aux Gardiens de la Galaxie, s’est emparée des Gemmes de l’Infini (ou Pierres d’Infinités, comme on dit maintenant) et les a utilisée pour modifier la réalité, piégeant toutes formes de vie à travers la Pierre de l’Âme. Se faisant désormais appeler Requiem, elle a réinventée l’existence en “warpant” tous ces personnages, amalgamant deux êtres en une seule entité: Wanda la Sorcière Rouge et X-23 deviennent Weapon Hex, Ant-Man et Hulk deviennent Little Monster, etc.
Une idée que l’on a déjà vu avant, et pour cause ! C’était là tout le concept derrière l’incroyable crossover Marvel vs. DC, où après s’être affrontés, les héros et vilains des deux camps étaient fusionnés pour donner naissance à Amalgam Comics avec Dark Claw (Batman et Wolverine), Super Soldier (Captain America et Superman) et autres Lobo the Duck. Forcément Infinity Wars n’impressionne alors pas vraiment et surtout ne provoque aucune excitation particulière si ce n’est la vague curiosité de voir comment nos protagonistes préférés ont été modifiés pour l’occasion.
Heureusement il y a un peu d’espoir grâce à quelques scénaristes de la vieille époque qui profitent de l’occasion pour ressusciter certains personnages obscurs qui n’auraient pas eu l’occasion de revenir autrement, et de rappeler que le multivers de Marvel est bien plus vaste que les quelques bouquins publiée en ce moment. La mini-série Infinity Wars Countdown ramenait déjà des vieux briscards des 90s comme Darkhawk ou Death’s Head, à l’origine inventé par la division anglaise Marvel UK et qui fit ses apparitions dans les pages de Transformers et Doctor Who ! Avec Infinity Wars: Sleepwalker, Chad Bowers et Chris Sims ramènent quant à eux Sleepwalker, lui aussi un transfuge des années 90 qui servi un temps de réponse au Sandman de Neil Gaiman. Un petit gars qui ne lui arrive évidemment pas à la cheville mais qui devient ici le seul espoir pour résoudre cette crise inter-dimensionnelle. Et ce mois-ci, avec la sortie du troisième numéro, les choses deviennent suffisamment intéressante pour attirer notre attention.
Issu du Mindscape, basiquement le monde des rêves cachée dans la Pierre de l’Esprit, il voyage à travers une autre gemme et découvre la mystérieuse dimension nommée “The World Pool” dans la Pierre de la Réalité. Une sorte de lieu de stockage de toutes les réalités alternatives de Marvel, où chaque évènement qui y a eu lieu se retrouve chroniqué et archivé… sous la forme de comics !
Tenu par Archivus, qui malgré son apparence cosmique n’est finalement qu’une gérante un rien blasée de boutique de bandes-dessinées, ce monde est un vaste terrain rempli à perte de vue d’innombrables cartons bourrés à craquer de revues forcément familières puisqu’il s’agit… de vraies copies telles qu’elles ont été publiées par dans notre réalité ! Et soit il s’agit d’un simple gag plutôt amusant qui permet de confronter le héros à ses propres aventures (Sleepwalker #1, The Secret Defenders #4 et même le récent Infinity Wars #3) et à des histoires plus ou moins liées à la situation en cours (The Infinity Gauntlet, Secret War, What If… Silver Surfer Possessed the Infinity Gauntlet ? où déjà le Surfeur utilisait les Gemmes pour remodeler l’univers).
Seulement il s’agit aussi d’un clin d’œil à l’Histoire de Marvel Comics et aux fans les plus anciens, qui vont évidemment reconnaitre nombre de titres de maintenant et d’autrefois: Avengers, Black Panther, Captain America, La Division Alpha, Hulk, Iron Fist, Iron Man, Squadron Supreme, Venom, Wolverine, X-Men et ses nombreux dérivés comme X-Force. Et beaucoup de Deadpool… On y trouve aussi bien le Marvel Comics #1 de 1939 que le Spider-Man de Todd MacFarlane, le Captain Marvel original comme son homologue contemporain incarné par Carol Danvers.
On peut apercevoir Apocalypse, Ant-Man, Black Cat, Daredevil, Dr. Strange, Kitty Pryde et Nova, tous provenant aussi bien des années 70, 80, 90 et 2000 afin de représenter chaque décade. Mais le plus important, caché parmi cette multitudes d’illustrations de couvertures, se dévoile lorsque Man-Thing-Thang-Thoom (la fusion de Man-Thing et de Fin Fang Foom) intercepte Sleepwalker et l’emmene plus loin encore à travers la Pierre, lui présentant les “possibilités infinies” du multivers. Outre les nombreux titres canon et quelques scenarii alternatifs qui n’ont jamais été prit au sérieux (What If… Venom Had Possessed The Punisher, qu’il aurait été génial de retrouver durant Venomverse) se cachent quelques bizarreries qui vont beaucoup surprendre.
On retrouve une copie de Conan le Barbare, le célèbre Cimmérien de Robert E. Howard qui commença effectivement son odyssée comics à la Maison des Idées avant de migrer ailleurs. Certes l’annonce de son retour à déjà filtrée il y a quelques temps, mais avoir une confirmation de son existence passée dans le Marvel d’aujourd’hui reste assez fou. Plus fort encore: Han Solo de La Guerre des Étoiles est visible sur une image bien dissimulée ! S’il est impossible de ne pas nier le lien qui existe entre les deux franchises (l’un produisit les premières BD de l’autre dès les années 70, avant même que L’Empire Contre-Attaque n’existe, et Disney produit à la fois les films Star Wars et ceux du MCU), mais c’est la première fois qu’un lien véritable vient confirmer l’existence de ces deux univers au sein d’un même plan d’existence.
Si un crossover parait peu probable pour diverses raisons, la simple idée qu’ils coexistent bel et bien d’un point de vue technique reste franchement incroyable. Et perturbant, tenant à la fois du fan service absolu venant assouvir un fantasme de fan, et de la pire idée de fanfiction qu’il soit… dommage pour le coup que Marvel comme Star Wars soient devenus synonymes de déception et mauvaise qualité. Et dans un registre tout aussi improbable, c’est l’existence de DC Comics qui est reconnu pour la première fois en plus de vingt ans ! Car, très bien caché, un exemplaire de Spider-Boy peut être découvert: un mix de Spider-Man et de Superboy, héros de plusieurs histoires durant Amalgam Comics. Sa présence vient nous rappeler que les évènements de Marvel vs. DC ont bel et bien existé et que les multivers des deux compagnies est toujours intimement liés l’un à l’autre malgré les rivalités et les histoires de droits et d’argent. Remarquez au passage que la couverture n’est pas visible, les responsables ne pouvant évidemment pas utiliser un personnage appartenant à 50% à un autre studio. Pourtant, de son nom, c’est le “Boy” de Superboy qui est visible, plutôt que le “Spider” de Spider-Man…
Enfin, bien que moins délirant en apparence, il faut noter la présence de l’adaptation de RoboCop 2, qui vient rappeler qu’il fut un temps où la boite était commandité par les studios de cinéma afin d’assurer la promotion de certains de leurs films.
Et ainsi la présence de cette couverture en particulier signifie que tout, absolument tout ce qui fut publié à l’époque est en fait une réalité possible ! Et donc que des œuvres comme Les Aventuriers de l’Arche d’Alliance, Blade Runner, Dark Crystal, Dune ou La Planète des Singes font techniquement eux aussi partie du grand tout Marvel en tant que dimensions alternatives. Se connectent alors des titres très différents: 2001: L’Odyssée de l’Espace, Les Aventures de Buckaroo Banzai, House II, Krull, Labyrinth, Sheena, Willow mais aussi Les Dents de la Mer 2 ou encore The Toxic Avenger !
Naturellement, là encore pour des raisons de droits qui ont expirés depuis belles lurettes, tous ces mondes et personnages ne risquent pas de revenir de sitôt dans les pages de nos comics et ce n’est pas demain la vieille que Ash de Evil Dead viendra y repousser les assauts de Godzilla (car oui, eux aussi en font partie). Mais l’important c’est que tout ceci nous a été présenté comme canon, officiel, et cette simple notion se révèle être la chose la plus intéressante et novatrice que tout ce que Marvel Comics a pu nous donner depuis ces quatre ou cinq dernières années au moins. Si l’on peut regretter que La Maison des Idées ne semble justement pas pouvoir exploiter ce potentiel, que ce soit pour des raisons légales ou simplement parce que ses responsables sont des idiots fini, cela n’empêchera pas les lecteurs de rêver un peu. Vu le néant créatif que représente la compagnie en ce moment, ce n’est pas un mince exploit !
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