Paul (2011)

 

Paul

(2011)

 

 

Voici un film des plus agréables. Original, amusant et touchant. C’est tellement rare de nos jours qu’on ne peut assez le répéter. L’histoire est a priori banal, surtout à notre époque, et semble même être plus là pour profiter de la mode “Geek” qui sévit depuis des années avec le succès du Seigneur des Anneaux, Harry Potter et autres saga du même genre. Attention je ne critique pas, je suis moi-même un gros Geek depuis très longtemps. Seulement là où cette dénomination était autrefois péjorative (et inconnue en France, au même titre que “Nerd”), il s’agit désormais d’un groupe ciblé, comme les Goths, ou ce que vous voulez, et l’Empire Capitaliste a bien su flairer la vache à lait dans cette affaire.
Il faut dire que, malheureusement, une grande partie de ces Geeks ne sont pas Geeks du tout. Ce sont des gens possédant une culture tout à fait normale, mais se retrouvant simplement à aimer expressément Star Wars ou une quelconque franchise qui n’a rien d’obscure. Autrefois il fallait avoir une connaissance poussée dans un domaine franchement méconnu du grand public, aujourd’hui on peut bouffer au McDonald’s et acheter les derniers produits disponibles en grande surface pour entrer dans les rangs.
Et du coup Paul semble au tout départ s’aventurer dans cette direction, avec un couple de héros, fans de science-fiction, visitant l’une des plus grandes conventions américaines. On y trouve du Cosplay, du comics, des livres et des références abondantes à la Pop Culture (enfermé dans l’Area 51 d’Indiana Jones, l’alien donne à Spielberg des conseils pour son E.T. par téléphone !), lesquelles restent toujours bien compréhensibles et identifiables par même le plus lambda des spectateurs (enfin, jusqu’à un certain point, restons d’accord). Le récit lui-même reste en apparence banal, puisqu’il tourne autour de la découverte d’un véritable extraterrestre par nos braves gars, lequel devient leur grand ami et leur fait vivre une aventure inoubliable.

 

 

Bien heureusement le film ne se limite pas à quelques blagues autour de Star Trek ou de Men In Black et possède sa propre vie. Les personnages principaux ont une vie propre et ne sont absolument des Geeks anonymes, à travers lesquels la communauté pourrait s’identifier à 100%. Bien au contraire, et grâce au talent incommensurable de leurs interprètes, le duo Simon Pegg / Nick Frost, ceux-ci finissent bien vite par devenir presque aussi iconique et reconnaissable que les héros du genre. Clive (Frost), écrivain raté, se baladant avec une réplique du katana de Blade (ou “Black Vampire” pour des raisons de droits) et rabat-joie constant. Graeme (Pegg), dessinateur à succès d’une pin-up à trois seins et pour qui Paul est un cadeau tombé du ciel… Mais pas autant que la femme qu’il va rencontrer ! Cette dernière est d’ailleurs la plus intéressante du lot tant son évolution ne manquera pas de faire sourire: handicapée d’un œil, fille d’un taré religieux et condamnée à ne jamais quitter le camping merdique dans lequel elle travail, paumé en plein milieu du désert, elle rêve d’évasion mais reste “bloquée” par ses problèmes. Enlevée malgré elle, soignée, et découvrant après une géniale dispute que Dieu n’existe pas, et qu’elle est donc libre de s’amuser et de jurer autant qu’elle le veut, celle qui évoque un petit oiseau blessé va se trouver un second souffle.
Et puis il y a Paul, bien sûr. Et autant je suis loin d’être fan de Seth Rogen, qui lui prête sa voix, et les CGI qui composent le personnage restent tristement visible (attention, on reste sur la qualité d’un Gollum, pas une bouillie visuelle de DTV), autant le petit gris demeure sympathique lorsqu’il ne verse pas dans la vulgarité façon Seth McFarlane. La plus belle scène du film est peut-être celle où il fini par rendre visite à une vieille femme, toute petite fille lorsqu’il s’était crashé sur Terre, afin de la remercier de l’avoir sauvé en le sortant du vaisseau, et de s’excuser pour avoir tué son chien durant l’incident. Ce qui aurait pu tourner à la pantalonnade devient vite un moment d’émotion lorsque l’on réalise quel genre de vie cette femme a pu avoir, criant partout que les extraterrestres existent et se faisant traiter de folle par tout le monde. Y compris sa famille.

 

 

A leurs côtés gravitent d’autres personnages et on retient surtout Jason Bateman en Man in Black tiré à quatre épingle et devant faire équipe avec un Bill Hader totalement survolté. Le toujours génial Jeffrey Tambor vient jouer une célébrité détestable, et puisqu’un film d’Alien ne peut être parfaitement complet sans Sigourney Weaver, celle-ci vient faire une apparition surprise à la toute fin, exactement à la manière de The Cabin in the Woods un an plus tard.
Quel dommage que la réalisation ne soit pas un peu plus à la hauteur. Le responsable, coupable d’un Superbad franchement pas terrible, emballe le tout avec un savoir-faire technique académique, propre, sans excès, et ne s’invite jamais vraiment dans la folie du scénario et des personnages. J’ai conscience que Frost et Pegg voulaient faire le film aux USA et trancher un peu avec leur incroyable saga anglaise, seulement je n’ose imaginer à quoi aurait pu ressembler Paul s’il avait été mis en scène par ce virtuose de Edgar Wright. Un homme qui n’a pas son pareil pour manier les gags de répétitions et qui a un sens du timing et du découpage tout bonnement parfait. Forcément, ça aurait donné autre chose qu’un extraterrestre qui montre ses fesses à ses copains…
Pas de quoi flinguer l’ensemble du film pour autant, Paul se suffisant très bien comme il est. Il séduira le Geek, mais certainement tout autre spectateur. A mi-chemin entre la SF auto-référentiel, la comédie délirante et la romance à l’eau de rose, il parvient à opérer une alchimie que beaucoup d’autres films américains aimeraient obtenir (clairement l’anti-Ted). Laissez-vous tentez, que vous soyez Geek ou pas, vous pourriez être surpris du résultat.

 

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