Le Frisson de la Rose – Chapitre 2

Le Frisson de la Rose

 

II – La Rose

 

Éliane était une jeune femme espiègle et d’un naturel enjoué. Elle aimait faire la fête, tester des choses nouvelles et surtout elle aimait sa petite amie plus que tout. C’était quelque chose d’assez nouveau pour l’une comme pour l’autre puisque si Natasha sortait d’une relation catastrophique avec un homme, et avait besoin de soins, la seconde était du genre a profiter du moment et ne pas s’accrocher pour construire quelque chose. Elle se sentait trop jeune et trop immature pour une relation durable.
Pourtant les choses changeaient, doucement mais sûrement, et là, voyant a quel point sa petite chérie prenait sur elle pour affronter ses peurs et s’en remettre a elle, s’offrant sans retenue, Éliane en eu le souffle coupé. Avait-elle déjà connue quelqu’un prêt a s’investir autant dans une relation avec elle ? Quelqu’un prêt a partager même ce genre de jeu pourtant si personnel ? Presque hésitante a continuer, elle s’empara de la télécommande du lecteur de CD et enclencha une de leurs musiques préférées.
Une mélodie exotique soutenu par des rythmes joyeux se propagea dans la pièce, idéal pour mettre en place une atmosphère détendue et familière mais pleine de souvenirs pimentés. C’était sur cette musique que Natasha avait fait sa première danse, c’était sur cette musique qu’elles avaient commencé à se toucher pour la première fois. C’était sur cette musique qu’Éliane avait osée lui demander si elles pouvaient former un couple, confiante et souriante en apparence mais morte de peur a l’intérieur. C’était le jour de la Saint Valentin et elle s’était envoyée quelques bouteilles pour se donner du courage, manquant presque de tout faire rater car s’enivrant trop vite. Et pourtant, elle avait dit oui.
Les rythmes et envolées de cette musique resteraient a jamais gravés dans sa mémoire.

Plongée dans le noir, Natasha aussi se laissa prendre par les notes envoûtantes. Une foule de souvenirs vinrent remplacer sa vision naturelle et elle se retrouva quelques temps en arrière, alors qu’elle commençait a faire plus que côtoyer Éliane. Les deux étaient devenue presque inséparables et avaient un contact qui allait peut-être plus loin que celui de simples amies. Elle n’était pas dupe de la façon dont la jeune femme la regardait, la détaillant sans jamais oser faire de commentaires, et étrangement cela lui plaisait. C’était valorisant et ça l’aidait a prendre confiance en elle, quelque chose dont elle avait vraiment besoin en cette époque là…
Cette musique, elle s’en souvint, elle l’avait choisi un peu par hasard le jour où elle avait voulu remercier Éliane a sa manière, l’invitant pour une séance de danse privée. Elle s’était vêtue d’une tenue révélatrice mais pas vulgaire, déshabillée sans trop l’être, et elle avait fait son numéro. Inconsciemment peut-être, emportée par la chanson et ces images plaisantes, Natasha commença a faire onduler ses hanches. Attachée comme elle l’était, il était plutôt difficile de reproduire a l’identique les mouvements complexe de son art mais elle se débrouillait. Son corps ne lui était plus étranger et elle parvint a le maîtriser suffisamment pour livrer quelques mouvements gracieux des jambes et du bassin.

Devant le spectacle, Éliane se laissa tomber a genoux pour contempler sa captive. Elle se dit qu’elle resterait bien là a la regarder danser sans rien faire d’autre, à la fois admirative devant cette gestuelle et émoustillée par la tension érotique qui s’en dégageait. Mais elle avait d’autres projets. En vérité la musique avait un autre but que de mettre un peu d’ambiance. Elle permettait de trahir l’ouïe de sa partenaire et de parasiter sa perception de son environnement. Ainsi Natasha était aveugle, mais également en partie sourde, incapable de deviner sa présence avec exactitude. Et Éliane comptait énormément là-dessus pour maximiser les effets de son “traitement” !
Afin de remercier sa prisonnière pour ce moment plaisant, la meneuse du jeu approcha son visage du ventre plat et joliment dessinée qui remuait et lui donna un grand coup de langue sur le nombril. La sensation, chaude, humide et douce, fit sursauter Natasha immédiatement. Difficile de dire si elle était chatouilleuse ou juste particulièrement sensible a cet endroit là, mais le contact – hautement intime – lui arracha un glapissement de surprise.
– Eh!, protesta t-elle d’une voix étranglée.
Éliane sourit. Lécher le nombril de sa danseuse était, depuis peu, devenu une sorte de rituel. Un fantasme qu’elle avait depuis leur première rencontre et qu’elle avait enfin pu concrétiser lorsqu’il fut question de pousser un peu plus loin leur relation physique. C’était érotique sans pour autant prétendre a plus.

S’arrachant a l’envie de goûter à la peau douce de sa proie, Éliane se releva sans un bruit et ramassa une belle rose rouge dans un vase proche. Il était temps de passer aux choses sérieuses et elle avait choisi son arme de prédilection. Belle et élégante, la fleur était l’une de ses roses que les peintres d’autrefois aimaient représenter pour symboliser l’Amour et la Romance. D’un rouge éclatant, elle était grande ouverte, dévoilant ses larges pétales, et sentait bon ce parfum reconnaissable entre mille. La jeune femme la passa sous le nez de son amie pour lui faire respirer cette senteur tout en lui chatouillant les narines. Avec des gestes très lents, elle caressa le petit nez curieux, effectuant des mouvements de rotations différents. Natasha avait le sourire mais ne disait rien, restant dans l’attente d’un évènement plus marquant.
Avec une feinte indolence, Éliane poursuivit son exploration tactile en effleurant le visage de la danseuse avec la rose. Elle traça son chemin sur une joue pour remonter sur les pommettes, sillonna le menton avant de passer sur les lèvres entrouvertes. Un petit balayage sur le front, un autre juste derrière une oreille. La fleur frôla l’autre oreille, son intérieur, le lobe minuscule. Pour Natasha le contact des pétales étaient une expérience nouvelle. Quand bien même la rose caressait sensuellement son visage, s’approchant parfois dangereusement de certaines zones sensibles, son contact lui faisait du bien. Les pétales étaient doux et apaisant, lui donnant une impression de légèreté. Un petit frisson de plaisir lui parcouru l’échine: elle aimait ça.
La captive agrippa les pans d’écharpes qui retenaient ses poignets prisonniers, tirant dessus sensiblement. Cela provoquait une petite tension dans les muscles de ses bras, comme un léger étirement, mais il n’y avait rien de désagréable. Sans savoir pourquoi, elle tenait a pouvoir au moins serrer les cordes même si il n’y avait pas encore de quoi se débattre. Natasha supposait que ces préludes a la “surprise” dont lui avait parlait Éliane seraient bientôt terminés et qu’il lui faudrait endurer quelque chose de plus… attisant.

Bientôt la rose, qui se promenait actuellement sous son menton, descendit plus bas sur sa gorge délicate. La belle aveugle ressentit immédiatement certaines sensations déstabilisantes, alors que sa maîtresse faisait jouer les pétales sur les contours en dentelles de son collier ras de cou.
Un début de chatouillement, mais si léger que cela ne lui faisait rien. C’était discernable mais endurable et Natasha se contenta de sourire. Se sentant d’apprivoiser la sensation, elle rejeta même sa tête en arrière pour offrir plus de liberté à sa compagne. Knismesis, pensa Éliane en observant sa réaction. Les chatouilles douces, supportables, pouvant sensiblement distraire ou plaire selon l’état d’esprit. Pour le moment, elle se contenterait de cela et Natasha semblait réceptive. Elle continua de jouer avec une extrême lenteur, ne la touchant parfois qu’avec la bordure de quelques pétales, soulignant ses traits comme un dessinateur méticuleux le ferait avec du papier fragile.
Inconsciemment, ou peut-être tellement attirée par sa compagne qu’elle ne pu s’en empêcher, Éliane se rapprocha d’elle, encore et encore, jusqu’à déposer son nez contre cette gorge désirable. Natasha se mordit la lèvre et tira sur ses liens, oubliant instantanément la rose. Mais il ne se passa rien de plus. Pas de morsures, pas de coups de langue, pas de baiser. Juste Éliane, le visage niché au creux de son cou, pour sentir l’odeur de sa peau. Et qu’elle sentait bon ! La maîtresse en oublia elle aussi sa fleur, le parfum naturel de sa bien-aimée lui montant à la tête, l’affolant. Son cœur s’accéléra et elle comprit que tout son être voulait cesser ces préliminaires pour aller beaucoup plus loin, passer à l’étape suivante, celle qui était interdite.

Il lui fallut toute sa volonté pour ne pas céder et se calmer, s’éloigner de sa douce et reprendre le jeu. C’était une épreuve de confiance et Natasha comptait sur elle ! Elle se laissait bien faire, elle, et puisqu’elle était attachée, elle n’avait pas le choix !
Rouge comme une pivoine, le corps en feu, Éliane réaffirma sa prise sur la tige de la rose et reprit son activité précédente. Bon sang, pensa t-elle. Ce petit jeu va devenir une torture pour toute les deux !

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