CSI: NY (4.06) – Boo (2007)

ROAD TO HALLOWEEN V

 

 

CSI: NY

Boo

(2007)

 

 

Voilà bien la première fois de ma vie que je regarde un épisode des Experts en entier, en tout cas en y prêtant vraiment attention. Pour moi ce show, ses multiples spin-off et ses nombreux imitateurs (NCIS et compagnie) n’ont toujours été qu’un bruit de fond, des images auxquelles on jette un œil une fois de temps en temps tout en faisant autre chose. Car le fait est que ces séries procédurières, bien que sans doute révolutionnaire en leur temps, sont insipides, répétitives et particulièrement dérangeantes pour peu que l’on observe tout ça un peu de recul: les “héros” sont la parfaite représentation de la figure d’autorité sévère, arrogante, zélée et moqueuse de tous les torts et travers de la société. Les enquêtes étant souvent les mêmes c’est surtout le cadre qui change pour enjoliver les intrigues: on se retrouve avec des crimes organisés dans tous les milieux, gamers, goth, hackeur, rôliste, sado-maso ou collectionneur de timbres, et à chaque fois l’équipe apporte son jugement, sa critique, ses piques, comme si ces citoyens osant avoir une activité fantaisiste étaient des idiots ou des déviants. En bref, Les Experts est la parfaite représentation de l’Amérique post 11 Septembre sous l’administration W. Bush.
Autant dire qu’il n’y avait aucune raison pour moi de revisiter un type de série télé désormais archaïque et ayant très mal vieilli, mais comment résister à l’idée d’un spécial Halloween réalisé par Joe Dante lui-même ? Forcément, la curiosité l’emporte.

 

 

Las, il ne s’agit pas vraiment d’un mini-film de Joe Dante puisque celui-ci se contente de mettre en scène selon un cahier des charges bien précis et immuable. Quentin Tarantino et Rob Zombie s’en étaient tous les deux plaints lorsqu’ils passèrent également derrière la caméra à l’occasion (sur CSI: Las Vegas et CSI: Miami respectivement). Tout au plus le cinéaste a t-il pu influencer le casting des rôles secondaires et c’est avec plaisir que l’on retrouve l’habitué Robert Picardo dans le rôle d’un petit shérif, Bruce Dern en fossoyeur et, surprise, Julie Adams de La Créature du Lac Noir dans celui d’une vieille dame très perturbée. Le scénario est en fait signé par deux énergumènes habitués aux enquêtes criminelles, même s’il convient d’évoquer Peter M. Lenkoy qui fut responsable du script de Demolition Man. Lui et l’homme de Gremlins auraient pu détourner la série pour en faire une satire amusante, mais il n’y avait aucune chance pour que les producteurs laissent cela arriver.
A la place les affaires vont parodier un classique de l’horreur et s’inspirer d’un autre film moins connu. La construction Boo ne dérive pas de la structure habituelle de la série et offre donc deux cas se déroulant simultanément, les experts se séparant en deux groupes n’ayant que de brèves interactions ici et là. Cas N°1 s’intéresse à un sorte de véritable mort-vivant, que le légiste déclare comme cliniquement décédé avant son meurtre. Cas N°2 est une reprise de l’affaire d’Amityville.

 

 

Le plus drôle c’est que si Cas N°2 s’avère la plus séduisante des deux histoires, elle est la plus chiante à suivre jusqu’à son final qui interpelle par sa méchanceté. A l’inverse, Cas N°1 est amusant à suivre étant donné les différentes pistes suivies par les policiers, pour se conclure dans l’indifférence générale puisque n’égalant pas les révélations de l’enquête précédente. Résultat le spectateur a constamment le cul entre deux chaises, le montage alternant fréquemment entre les deux. Pour résumer: si le tout fait une quarantaine de minutes, il s’agit en fait de deux segments de vingt minutes qui sont hachés menus et mélangés ensemble. Les personnages principaux n’ont pas le temps d’exister, n’étant finalement là que pour lâcher des informations ou résoudre des problèmes. Une seule scène avec Gary Sinise vient rappeler que cette saison possède un fil rouge, lorsqu’il voit le nombre “333” dessiné sur les paupières d’une jolie prêtresse vaudou qui lui évoque un problème personnel et récurrent tout au long de cette saison.
Quant aux personnages secondaires, leur temps d’apparition tient de la plaisanterie: Picardo a deux courtes scènes, Dern n’est là que pour l’introduction et seule Julie Adams et son complice sortent du lot… parce qu’ils sont les coupables et doivent expliquer leurs motivations de façon dramatique comme le veut chaque épisode de CSI !

 

 

Il faut également rétablir une vérité: si la thématique est Halloween, seule les quinze premières minutes se déroulent à cette période, le reste se passant le(s) jour(s) suivant(s). C’est dire si ce Boo n’a rien de spécial par rapport aux autres fillers habituels. D’ailleurs maintenant que j’y pense il n’y a même pas de title screen dans cette série, comme si l’idée d’avoir à nommer les histoires était trop farfelue ! A la place le show se perd dans les innombrables tests des fameux experts, qui étudient sous fond de musique électro à l’aide de gadgets si avancés qu’ils en deviennent insensés: hologrammes 3D, lances-pointeuses lasers, écrans LCD géants, papier électrostatique… Même Batman n’a pas besoin de tout ça pour résoudre un crime.
Que reste t-il alors de Joe Dante et de l’esprit d’Halloween ? Quelques petits trucs quand même, qui sont d’ailleurs plutôt sympa. L’ouverture qui se fait dans un cimetière brumeux et où un vieux fossoyeur explique les origines de l’expression “save by the bell”, avec cette clochette qui donnée aux cadavres récemment inhumé pour s’assurer qu’ils ne soient pas enterrés vivants. Aussitôt son récit terminée, un corps surgit du sol pour l’attraper. Lors des habituels stock-shots des plans aériens de la ville, un immeuble affiche une façade lumineuse en forme de crâne comme sur l’affiche de Visiting Hours. Et le médecin légiste de l’équipe s’éclate à mettre l’ambiance dans sa morgue high-tech, avec un crâne dans un bocal et des petites bougies partout.

 

 

L’affaire du mort-vivant s’ouvre comme il se doit en pleine Zombie Walk, ce qui nous vaut d’hilarant figurants décomposés qui regardent les policier s’affairer avec inquiétude. Le plus amusant étant qu’ils sont de véritables fans de zombies, la production ayant contacté un habitué de l’évènement pour organiser une véritable mini Walk devant les caméras. Sympa, sauf que nos héros  n’approuvent pas: “Zombie flash mob ? Yeah, I don’t get it ever” déclare un grand costaud sur un ton méprisant. Et ses collègues de surenchérir en accusant les participants de vandaliser les magasins, gêner la circulation et d’effrayer les passants, juste pour s’amuser, visiblement scandalisés. Le genre de choses que l’on retrouve constamment dans CSI, et je cherche parfois à comprendre comment la série peut avoir le moindre fan avec une attitude pareille…
Heureusement Joe Dante se rattrape, pratiquant l’autopsie d’un véritable poupée vaudou où sont retirés chaque élément qu’elle contient (photo découpée, grains de café et même une cigarette Morley de X-Files !), fait apparaitre deux sorcières, l’une très inquiétante et semblant sortir du Black Demons de Umberto Lenzi (yeux blancs et visage balafré), l’autre jeune et sexy, donnant carrément envie de se convertir. Enfin il apparait que les scénaristes se sont fortement inspiré de l’Enterré Vivant de Frank Darabont pour la conclusion, remplaçant le final dans la tombe avec les effets de la fameuse drogue utilisée pour donner l’apparence de la mort.

 

 

L’autre segment se montre plutôt démonstratif dans sa reprise d’Amityville. Non seulement le titre du film original est mentionné, mais la scène du crime se déroule dans le même quartier: à Ocean Avenue, Amityville, au 1135 plutôt qu’au 118. Ce qui, avec The Amityville Curse, fait la troisième bâtisse réputée hanté dans la bourgade. Ici l’histoire sanglante de la maison est plutôt intéressante, avec la famille Willens ayant connu un suicide et la disparition soudaine d’une petite fille, ce qui sera forcément en lien avec l’affaire qui a lieue. Et celle-ci s’inspire du massacre des DeFeo, toute la famille ayant été tué à coup de fusil. Pour des raisons de droit il y a évidemment quelques différences (les victimes se nomment les Duncan, une petite fille a survécu en se cachant derrière les murs et le coupable n’est pas celui que l’on croit), mais il est intéressant de voir une relecture de ce mythe orchestré par une série branchée.
Dante y parodie un instant le found footage et certains clichés de la maison hanté (murs qui saignent, vieille folle sortant de nulle part, passages secrets, grenier lugubre) et le scénario lie les deux tragédies de façon plutôt touchante quand on apprend ce qui s’est réellement passé. CSI: NY n’hésite pas à tuer des enfants ni à montrer leurs corps à la morgue, et les aveux du meurtrier donnent une interprétation intéressante de ces actes commis “par le Diable”. Sans aller jusqu’à évoquer la première saison de American Horror Story, Boo réinterprète la légende urbaine du massacre commis dans une belle maison pour lui donner peau neuve.

 

 

Voilà véritablement ce qui sauve cet épisode, tout le reste n’étant finalement que de petites friandises agréables mais pas très nourrissantes. Du coup il est plutôt difficile de dire si ce Boo est meilleur ou moins bon que l’autre Boo ! réalisé par Joe Dante pour la télévision et avec Robert Picardo au casting. C’était en 1986 pour Amazing Stories – et oui, si j’évoque ça c’est pour faire le lien avec la chronique précédente, avec une histoire médiocre de gentils fantômes devant cohabiter avec la nouvelle famille qui emménage dans leur maison. Du pur sentimentalisme à la Spielberg, totalement à l’opposé de l’univers sévère et patriote des Experts, mais tout aussi caricatural. A vous de voir !

 

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